Le vrai comte de Kalergi (qu’il faut lire en allemand) était très contre le métissage inconsidéré entre types humains rigoureusement incompatibles fait sous le feu de la passion du moment ou par intérêt économique à court terme de brouiller les identités (pour lui l’un va de pair avec l’autre). Il était pour un métissage entre gens de même talent et de même type de culture, pour la conservation des aptitudes les plus dépendantes du code génétique, autrement dit entre gens de même caste au sens des civilisations orientales antiques, l’Inde et le Japon tout particulièrement, plutôt qu’entre gens de même localité.
Pour lui le mélange des castes est plus grave que le mélange des races car pour lui tous les aristocrates d’Europe et d’au-delà sont bien plus semblables entre eux génétiquement que les classes sociales d’un même pays qui sont souvent issues de peuples très différents conquis ou immigrés à divers moments. Kalergi qui était lui-même un métis de Japonais et d’Autrichien tenait à faire la différence entre le bon métissage dont il croyait être lui-même issu et cet autre métissage qu’il décrivait qui pourrait abâtardir l’Europe par le simple jeu des passions et des intérêts.
On a rendu rétrospectivement Kalergi partisan de phénomènes qu’il décrivait plutôt comme des dangers à éviter, et comme les voyages et les migrations allaient qu’on le voulût ou non rendre les mélanges impossibles à éviter, il fallait en revenir au sens du dharma indien qui accepte les mélanges raciaux jusqu’à un certain point mais pourvu qu’ils résultent dans la mise en commun des mêmes gènes de talent.
Kalergi, parlant pour sa paroisse, disait un très grand bien des mélanges eurasiens, auxquels il imputait la supériorité de beaucoup de Hongrois, d’Est-Européens et plus encore de juifs, mais à de rares exceptions-près il n’avait pas une bonne opinion du tout des mélanges eurafricains.
Oui Kalergi servait un milieu manifestement très peu démocratique de mentalité — le même en fait que celui qui fit la promotion de l’anschluss nazi — qui cherchait par le biais d’une construction européenne en finir avec l’ère des révolutions et des républiques souveraines. Mais la différence essentielle était qu’alors ces milieux oligarchiques qu’il croyait servir réclamaient au nom du retour à un certain ordre social naturel (les castes) que les républiques auraient dévoyé, alors que depuis le traité de Rome et surtout Maastricht on a affaire à un projet transhumaniste.