Le 2 mars, je postais sur X une réponse à Vincent Reynouard, le remerciant d’avoir partagé son avis sur la thèse de Xavier Poussard (XP).
Merci Vincent . C'est exactement l'impression que j'ai eue à la lecture de ces 5 n° de F&D, et dont j'ai fait part à X P : dossier très très faible. Brigitte serait le père de ses enfants qui auraient changé de nom pour couvrir la transition de leur mère ? Je n'y ai jamais cru. https://t.co/9Faxu2r3pO
— Laurent Guyénot (@Laurent_Guyenot) March 2, 2025
Je m’étais retenu jusque-là d’exprimer publiquement mon opinion en français pour deux raisons : je ne m’exprime que sur des dossiers que j’estime avoir suffisamment étudié pour avoir une opinion fondée, et je n’avais aucune envie d’étudier ce dossier. J’acceptais le principe qu’il était la « chasse gardée » de XP et qu’il valait mieux que je ne m’en mêle pas. Néanmoins, j’ai toujours partagé sincèrement mon opinion quand on me l’a demandée.
L’heure étant maintenant au bilan, il me semble utile de l’exprimer publiquement. Pour cela, je me suis procuré par Amazon le livre de Poussard. Je l’abordais avec un peu d’anxiété : aurais-je raté quelque chose ? Est-ce que la version aboutie de l’enquête me paraîtrait plus cohérente que mon impression à la lecture des 5 numéros de F&D ? Je le lisais en une journée, puis, le 12 mars, je postais un message sur X : « Après 292 pages, la preuve ultime. Allez, on y croit, on y croit », accompagné de l’image reproduite en tête de cet article.
Cela reflétait mon impression générale. Cette page 293 du livre me semblait emblématique à tout point de vue du style de l’enquête. Voilà deux personnages dont on conçoit, à la vue de leurs photos, qu’ils puissent être frères et sœurs, mais chez qui XP reconnaît des « signes distinctifs indiscutables » qu’ils sont la même personne (p. 295). Que faire sinon ironiser sur une telle assurance ?
Étant donné les réactions (prévisibles) suscitées par mon post, j’ai décidé de relire une seconde fois le livre et d’en donner ici un avis plus détaillé.
Je ne traiterais que de la thèse principale du livre (la thèse transgenre), que le livre n’aborde vraiment qu’à la moitié du livre, à partir de la p. 159, avec la partie IV : « L’affaire Jean-Michel Trogneux ».
Sur la première moitié, je dirais simplement qu’elle constitue à mes yeux du journalisme un peu brouillon, qui fait feu de tout bois pour créer une atmosphère générale, mais reste informatif, même si je ne suis pas capable de juger de l’originalité des informations. Le livre aurait été utile s’il s’était limité à cette première moitié.
Passons à la thèse principale du livre : Brigitte Macron serait née Jean-Michel Trogneux, le 11 février 1945 et non le 13 avril 1953. Jean-Michel serait devenu Brigitte au milieu des années 1980. Brigitte Macron serait donc une femme transgenre âgée aujourd’hui de tout juste 80 ans.
Je n’aborde pas les arguments tirés de la reconnaissance faciale, car je n’ai rien à ajouter à l’analyse de Vincent Reynouard, sinon qu’il me semble que XP s’est rendu coupable de retoucher certaines photos pour forcer son argument, en introduisant par exemple artificiellement « un problème de dentition » supposé prouver que JMT enfant à le même écart dentaire que BM (p. 275). Comment XP est-il passé de la photo de gauche à celle de droite ? (J’emprunte cette illustration » à Albert Ruffont.)

Concernant la thèse elle-même, il faut préciser qu’elle est très fluctuante, et qu’on a du mal à suivre son évolution. Plusieurs versions sont énoncées successivement. Il y a d’abord ce que XP appelle « la thèse Rey » (p. 165), pour afficher ses distances avec cette thèse d’une façon un peu cavalière, puisqu’il l’a lui-même défendue au début de son enquête, entraînant des milliers de gens dans sa conviction. Se fondant sur son intuition que BM est un homme transgenre, Rey a cru la reconnaître dans une photo de famille où figure Jean-Michel Trogneux enfant, photo aujourd’hui bien connue que je reproduis ici pour mémoire, dans une version colorisée et retouchée, pour changer un peu. Cette partie de la thèse n’a pas changé.

Puis, se lançant sur la piste du premier mari de BM, André Auzière, Natacha Rey découvre un certain Jean-Louis Auzière, qui a été le mari d’une certaine Catherine Audoy, et se met en tête que les deux Auzière n’en font qu’un. Selon Rey, Catherine Audoy aurait été, dans un mariage précédent, l’épouse de Jean-Michel Trogneux (JMT) avant que celui-ci ne change de sexe pour devenir Brigitte Trogneux. Elle serait donc la mère des trois enfants (Sébastien, Laurence et Tiphaine) dont Brigitte Macron prétend maintenant être la mère alors qu’elle est leur père. Après la transition de Jean-Michel en Brigitte, le second mari de Catherine Audoy (Jean-Louis = André Auzière) aurait adopté ses trois enfants qui auraient alors changé de nom, troquant leur nom de naissance Trogneux pour le nom Auzière.
Les trois enfants se retrouvent maintenant avec deux mères, une vraie et une fausse, la vraie étant effacée de leur biographie tandis que la fausse devient leur mère officielle, alors qu’elle est leur père. On a du mal à imaginer ce qui a pu convaincre les enfants de se prêter à cette mascarade, renonçant à leur nom de naissance et de baptême, et adoptant celui de quelqu’un avec qui ils n’ont aucun lien biologique — et très peu de lien affectif, selon la biographie autorisée.
Mais surtout, on aimerait savoir comment ils ont fait pour faire modifier leur état civil (certificats de naissance et livrets de famille). Ce sont les objections majeures dont j’ai fait part à XP en 2023.
Je découvre dans le livre (p. 193-208) qu’il a finalement abandonné cette piste Audoy, s’étant laissé convaincre que Catherine Audoy n’a jamais eu d’enfants. En plus, le logiciel chinois de reconnaissance facial Face++, sur lequel XP a tant misé, valide à 81,161 % (very high) l’identité du jeune André Auzière de la photo de mariage de Brigitte, avec le André Auzière chauve qui figure sur son faire-part de décès (p. 196-201), et qui ne peut en aucun cas être le Jean-Louis Auzière époux de Catherine Audoy, contrairement à ce que Rey avaient soutenu.
Exit donc la piste Catherine Audoy-Jean-Louis Auzière, qui pourtant semblait si prometteuse, que XP a longtemps soutenue, et qui a tant fait pour propulser la rumeur au niveau national.
Reste la thèse que BM est JMT. C’est la constante. Mais alors qui, si ce n’est Catherine Audoy, est la mère des trois enfants de BM ? La thèse finale sur laquelle XP s’arrête n’est clairement énoncée qu’à la fin du livre, p. 295-300. Brigitte Macron serait née Jean-Michel Trogneux le 11 février 1945. Mais avant que JMT ne change de sexe et de nom, il y aurait bien eu une vraie Brigitte Trogneux, née le 13 avril 1953 (dont on connaît une photo de communiante et une photo de son mariage avec André Auzière en 1974), mais dont la correspondance avec notre Brigitte Macron selon Face++ n’est que de 50 % environ (low) (p. 235), ce que XP prend pour preuve qu’il s’agit de deux personnes différentes (ignorant la possibilité que la chirurgie faciale fausse le résultat).
La vraie Brigitte Trogneux serait morte avant 1986, et son frère Jean-Michel aurait alors pris son identité, tandis que le décès de la vraie Brigitte aurait été caché ou effacé (par les services secrets ?). Selon le scénario écrit par XP, la vraie Brigitte Trogneux, « se sachant condamnée par une maladie grave confie la garde de ses enfants et son identité à ce frère dont elle est si proche et qui s’est toujours senti femme. »
« Nous pouvons donc conclure que Jean-Michel Trogneux vit, depuis au moins 1986, sous l’identité civile de naissance de sa sœur Brigitte Trogneux. Logiquement, Sébastien, Laurence et Tiphaine Auzière sont donc, à l’état civil, son neveu et ses nièces. Globalement, “Brigitte” a nettoyé son passé (Jean-Michel Trogneux) et a raconté le passé de sa sœur quand il s’est agi de se présenter aux Français. »
Ce qui a changé par rapport à la première thèse (thèse Rey reniée par XP), c’est que Brigitte Macron n’est plus le père biologique de ses enfants, mais leur oncle biologique. Cela suppose que les enfants ont accepté que le décès de leur mère regrettée soit caché et qu’elle soit remplacée par leur oncle transgenre. Mais pourquoi donc auraient-ils accepté de s’encombrer d’un secret de famille aussi tordu ? Et pourquoi donc le veuf éploré aurait-il accepté de remplacer son épouse par un beau-frère ? Je n’ai trouvé aucune réponse dans le livre de XP.
Reste encore deux mystères. Premièrement, comment la mort de Brigitte a-t-elle pu être cachée ? N’y a-t-il eu aucun certificat de décès ? Son cadavre est-il enterré dans le jardin des Trogneux ? Deuxièmement, comment Jean-Michel Trogneux a-t-il fait pour disparaître ? Bien que je n’en trouve pas mention dans le livre, il faut sans doute supposer que ce deuxième mystère est résolu par le troisième mystère, le plus gros de tous : qui est le petit gros ? XP ne se prononce pas. Mais la seule explication, dans le cadre de son hypothèse, est qu’on l’aurait embauché, sur son physique, pour « jouer » Jean-Michel. On l’invite donc occasionnellement à l’Élysée pour faire circuler sa photo.
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