La fréquentation cinématographique atteint 12,77 millions d’entrées au mois de mai 2017 en diminution de 10,1 % par rapport à mai 2016. 93,08 millions d’entrées ont été réalisées au cours des cinq premiers mois de 2017, soit 2,0 % de moins que sur les cinq premiers mois de 2016.
La part de marché des films français est estimée à 36,6 % sur les cinq premiers mois de l’année (38,1 % sur les cinq premiers mois de 2016) et celle des films américains à 55,0 % (53,2 % sur janvier-mai 2016). (Source CNC)
Lena Lutaud du Figaro a beau dire que les salles françaises sont magnifiques, high tech et compagnie, ce qui compte, au fond, c’est le contenu, c’est ce qui est projeté. Un bel écrin pour une bague en plomb déçoit deux fois plus, car la promesse est plus grande que le résultat. C’est tout le problème du cinéma français. Avant, on était mal assis, mais les films valaient le coup. Aujourd’hui, les fauteuils sont de première bourre, mais le niveau moyen des films a baissé, voire chuté.
De plus, il faut se taper 20 minutes de pubs avant la chose. Or qui dit pub dit financement : la télé avec pubs est gratuite, la télé sans pub payante. Le cinéma présente cette anomalie que l’on connaît déjà avec le service public audiovisuel d’avoir de la pub et d’être payant. C’est comme les autoroutes, qu’on paye deux fois : une fois par l’impôt, une fois par le péage.
Tout cela n’arrête pas la grande confrérie qui relance chaque année son commerce à coups de Fête du Cinéma (les 19, 20 et 21 mars c’était déjà le Printemps du Cinéma). La chose a duré 4 jours jusqu’au 28 juin et les places étaient à 4 euros, ce qui devrait être le prix normal. Or les salles étant de plus en plus sophistiquées, les films de plus en plus chers, l’amortissement est de plus en plus difficile à atteindre. La qualité moyenne des films français achevant ce qui reste de potentiel de remplissage. La stat est brutale : le taux de remplissage moyen n’excède pas 20%. Le cinéma français perd de l’argent, il n’est pas rentable, le public le boude, mais l’exception culturelle le sauve.
Voici le pitch d’un film français, L’Ombre des femmes, qui a été présenté à Cannes en 2015 en ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs :
Pierre et Manon sont pauvres. Ils font des documentaires avec rien et ils vivent en faisant des petits boulots.
Pierre rencontre une jeune stagiaire, Élisabeth, et elle devient sa maîtresse. Mais Pierre ne veut pas quitter Manon pour Élisabeth, il veut garder les deux. Un jour Élisabeth, la jeune maîtresse de Pierre, découvre que Manon, la femme de Pierre, a un amant. Et elle le dit à Pierre…
Pierre se retourne vers Manon parce que c’est elle qu’il aimait. Et comme il se sent trahi, il implore Manon et délaisse Élisabeth.
Manon, elle, rompt tout de suite avec son amant. On peut supposer que c’est parce qu’elle aime Pierre.
Ce n’est pas une blague, même si ça y ressemble. Il y a un scénariste ou qui se croit scénariste qui a pondu ça, il s’est trouvé un réalisateur pour le tourner, un producteur pour le financer, un distributeur pour le diffuser, et le jury de Cannes pour le sélectionner. On marche sur la tête. Du Philippe Garrel dans la droite ligne de la Nouvelle Vague, 50 ans après, en noir et blanc, avec aide du CNC, la totale.
Le cinéma français est une tête de poulet sans corps, une tête coupée du public et du réel qui vole vers le renard. La fin est proche, mais le système perdure et accélère son propre détraquage.