L’attaque en piqué dont a été victime le dollar à la mi-août sonne le glas du mirage économique chinois, que la presse occidentale avait généreusement attribué au capitalisme. Or ce bombardement n’a rien à voir avec le capital. C’est un acte de guerre monétaire anticapitaliste décidé par une puissance souveraine protectionniste dont le système communiste, qui fait l’admiration de nos oligarchies financières, est intact.
Pour que l’on puisse parler de guerres des capitalismes, il faudrait que le crédit procède du capital par l’épargne et non comme aujourd’hui de la création monétaire ex nihilo des banques centrales, qui détruit le capital.
La différence entre l’attaque monétaire d’une banque centrale communiste comme la BPC (banque populaire de Chine) et d’une banque centrale néo-socialiste pseudo-privée, comme la Fed ne tient qu’à un fil : l’une impose son prix au « marché » et l’autre manipule le même « marché » par des effets d’annonce (comme celle de la hausse des taux actuellement attendue de la Fed par des marchés-zombies suspendus aux lèvres de Madame Yellen). Ces effets d’annonces, qui sont de purs actes de langage, ont bien plus d’effets que les mathématiques dirigistes car ils parlent aux croyances des travailleurs employés par les grandes banques qui opèrent sur le marché des changes (que l’on appelle, en jargon, les tradeurs).
On sait aujourd’hui que Roosevelt, qui avait été réélu avec un programme pacifiste, a laissé faire Pearl Harbour afin d’entraîner l’opinion américaine dans la guerre du Pacifique. Toutes choses égales par ailleurs, on peut se demander si l’Amérique a stimulé l’ardeur belliqueuse de la Chine en poussant le dollar dans une spirale haussière, en agitant la perspective d’une hausse des taux que l’état de l’économie américaine ne justifie pas et en repoussant la date de l’admission du yuan dans le panier des DTS (acronyme de droits de tirage spéciaux qui désigne le panier de monnaies de réserve du FMI). [...]
Les véritables raisons de l’attaque surprise : représailles et chantage aux DTS
Les oligarchies néo-socialistes ont toujours maintenu coûte que coûte le village Potemkine chinois afin de ménager l’utopie dirigiste absolue qu’ils rêvent d’appliquer lorsque le capital aura totalement déserté l’Occident. De leur côté, les Chinois, avides de reconnaissance, ont toujours fait leur possible pour complaire à ces oligarchies en devenant le premier pays détenteur d’obligations américaines (du moins jusqu’à aujourd’hui car depuis juin une vague de vente massive de ces obligations est en train de nettoyer les bilans chinois) et en maintenant en dépit du bon sens une quasi parité du yuan et du dollar. C’est ce miroir de l’Occident qui s’est brisé le 11 août 2015.
Gageons qu’il s’agit plus d’une crise de dépit amoureux que d’une mesure destinée a rendre le yuan plus compétitif et la population chinoise moins pauvre (depuis quand le parti communiste se soucie-t-il du peuple autrement que pour le surveiller ?).
Le raid, on l’a vu, est ambigu. Il est à la fois empreint de brutalité interventionniste et d’une volonté contradictoire de déverrouiller les fluctuations du yen. Ce paradoxe ne doit pas étonner qui se souvient qu’une semaine avant le raid le FMI a signifié à la Chine qu’il était trop tôt pour que le yuan entre dans les DTS (droits de tirage spéciaux) panier de monnaies de secours en cas d’effondrement du système monétaire international. Ce refus humiliant explique à la fois l’attaque chinoise (conçue de ce point de vue comme un avertissement au FMI plus que comme une mesure destinée à favoriser les exportations chinoises) et la fluctuation encadrée du yuan, conçue comme un gage donné au FMI de la bonne volonté de la Chine à l’égard des « marchés ».