L’ancien bulletin officiel du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE), un think tank fondé par des intellectuels iconoclastes proches de l’extrême-droite, revient avec une nouvelle formule. Plus épais et plus moderne, ce numéro d’”Eléments” veut faire dire “toute la vérité” à Michel Onfray et Patrick Buisson.
C’est avec l’air grave mais décontracté que Michel Onfray, mains dans les poches et chemise noire sur fond gris, pose en couverture du nouveau numéro d’Eléments. Mais ne pas s’y tromper, si l’on ressent encore des traces de son passé de revue savante un peu austère fondée en 1973, le magazine trimestriel de la Nouvelle Droite a changé de peau, avec “une maquette rénovée”, “une pagination augmentée de moitié” et “un passage au tout couleurs”, que vient confirmer le titre de une en grosses lettres roses, “Michel Onfray s’explique”.
Avec un tel invité de marque, tantôt dit de gauche, populiste ou simplement libre penseur, les représentants de la Nouvelle Droite ont frappé fort pour leur retour. Ce mouvement iconoclaste adossé au Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE), avec Alain de Benoist et Michel Thibault en tête, ne se reconnait pas dans l’extrême-droite traditionnelle et prône à la fois le nationalisme, l’anti-américanisme, l’antilibéralisme, le paganisme et l’écologie.
Michel Onfray, au delà du clivage gauche-droite
Interrogé sur son Université populaire, qu’il a fondée en 2002 à Caen, sur son origine rurale et modeste, sur l’islam, sur le rassemblement des deux Normandie et sur ses récents affrontements avec le philosophe Jacques-Alain Miller ou avec la presse de gauche, Libération en tête, Michel Onfray livre surtout dans cet entretien son positionnement politique. A cet égard, il affirme que “la gauche institutionnelle, de Hollande à Mélenchon, de Libération à Mediapart, ne m’aime pas et me calomnie est plutôt une bonne nouvelle”. Le philosophe réitère ce qu’il avait dit dans l’émission “On n’est pas couché” : il ne lit rien de ce qui est écrit sur lui, “que ce soit pour ou contre”.
Le passage de Michel Onfray sur ONPC (durée 67 minutes) :
Mais face à ces critiques, il attaque vivement la “presse idéologique de gauche qui préfère une idée débile de gauche, parce que la gauche dit toujours la vérité, bien sûr, et qui transforme en homme de droite quiconque aura dit de cette idée débile qu’elle est débile.”
Dans cet entretien, Michel Onfray va encore plus loin : il annonce la mort lente du clivage gauche-droite, remplacé selon lui par “ceux qui savent prendre de la hauteur” et comprennent que “l’Occident est fini” et “ceux qui n’ont rien vu, les nigauds, et pensent toujours qu’ils ont un pouvoir sur la falaise qui s’effondre” :
“Actuellement, la droite libérale et la gauche libérale pensent la même chose ; et la gauche antilibérale et la droite antilibérale également, sauf sur la question de l’immigration – une chance pour Mélenchon, un flux à réguler pour Marine Le Pen.”
Populiste – “tribun de la Plèbe” dans la bouche de Sollers – il le revendique. Ou du moins, il “préfère ça à libéral, capitaliste, bourgeois, miterrandien, social-démocrate, social-libéral”. Ce qui est sûr, avance-t-il, c’est qu’il défendra toujours les moins puissants et refuse de se rallier à qui que ce soit :
“Je ne veux pas me retrouver avec les mélenchonistes défenseurs de Robespierre ou les lepénistes partisans de la peine de mort sous prétexte que je partage leur antilibéralisme. (…) Même si le grand d’hier est devenu le petit d’aujourd’hui, je suis du côté du faible. Si Mélenchon ou Marine Le Pen étaient interdits, je serais de leur côté. Même chose avec les chrétiens ou les musulmans. J’essaie de souscrire à cette formule de Nietzsche qui invitait à être seul de son parti…”