La plupart des candidats à la présidentielle en appellent au « peuple ». La gauche socialiste a perdu les ouvriers, la gauche communiste a perdu son influence politique (sauf en termes de militants), la droite libérale a par principe du mal à convaincre les pauvres, seul le Front national bénéficie d’un soutien grandissant d’une partie du peuple français.
Guillume Erner reçoit le philosophe Jean-Claude Michéa pour essayer de comprendre comment la gauche a pu perdre cette assise populaire. L’émission est titrée La gauche contre le peuple ? ; mais aurait pu être titrée Le peuple contre la gauche...
« Mais Rosa Luxembourg ajoutait aussitôt, le problème c’est qu’en décidant de la part de Jaurès, non pas de soutenir la gauche mais de fusionner avec elle, on allait rentrer dans une logique qui ferait qu’au bout de quelque temps, le Parti socialiste dans sa spécificité, c’est-à-dire dont l’ennemi est le capital et pas simplement l’aristocratie, l’Église et le Vieux monde, alors que la gauche avait pour devise “le cléricalisme voilà l’ennemi” sur le fameux discours de 1978 de Gambetta, à partir du moment où elle voulait fusionner avec la gauche, eh bien à terme elle serait phagocytée par elle, et cela d’autant plus comme l’écrivait Lafargue à l’époque, que le Parti socialiste verrait progressivement sa direction tomber aux mains des nouveaux intellectuels issus de l’université, et perdre peu à peu la base ouvrière de sa direction...
[On oublie que ] dans un premier temps, Kautsky et les dirigeants de l’Internationale validaient la position de Rosa Luxembourg mais très vite, on est passé sur l’idée jauressienne qu’il fallait devant le péril de la réaction que le mouvement ouvrier perde sa spécificité, et comprendre que pour l’instant le combat contre la réaction – la nécessité comme dans Clochemerle de bouffer du curé – était prioritaire par rapport à la nécessité de combattre le capital...
Depuis 2008, nous voyons à quel point cette critique socialiste depuis la grande crise des “subprimes”, n’est pas du tout archaïque. »
Malek Boutih sur le Parti socialiste actuel et son électorat :
Michéa sur le libéralisme :