Il y a quelques jours, le 3 juin dernier, le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahu et des membres de son gouvernement s’en sont pris au mouvement BDS conduit par la Palestine.
Le Premier Ministre a utilisé des éléments de langage normalement réservés au Hamas voire au programme nucléaire iranien – et comme toujours, le Congrès et l’AIPAC les ont répercutés. En décrivant le mouvement BDS comme « une menace stratégique », Netanyahu réagissait à un vote de la direction nationale de l’Union Nationale des Etudiants au Royaume Uni, le 2 juin 2015, s’alignant sur le mouvement BDS. Ce qui l’a incité à twitter :
« Un groupe estudiantin en Grande Bretagne qui a voté le boycott d’Israël refuse de boycotter ISIS. C’est ça, le BDS ».
Netanyahu salissait évidemment le BDS en débitant de purs mensonges. Ce qu’il omettait de dire, c’est que le Conseil exécutif national du syndicat NUS [National Union of Students] avait adopté le 3 décembre une résolution condamnant le Califat (Etat Islamique) « comme étant une organisation terroriste réactionnaire perpétrant des atrocités » contre les personnes des zones où elle opère.
Ce même jour, le Président israélien Reuven Rivlin répercutait un sentiment identique sur la menace stratégique que BDS pose à Israël. Il déclarait à un groupe d’universitaires israéliens :
« Je n’aurais pas imaginé que les universités israéliennes auraient à faire face à un réel danger, mais l’atmosphère dans le monde est en train de changer, ce qui crée une situation où il est impossible de traiter la question sinon comme une menace stratégique de niveau 1 ».
Toutefois il semble que Netanyahu, Rivlin et les tenants d’Israël ont de bonnes raisons de s’inquiéter.
Premièrement, avec l’accord sur le nucléaire iranien se profilant à la fin du mois, Netanyahu et les apologistes d’une poursuite de l’occupation israélienne et d’un niveau insensé de constructions de colonies dans les TPO vont probablement échouer à inquiéter le monde avec leur souci forgé de toute pièces, celui du potentiel iranien de construire une bombe atomique. Le monde habituellement complaisant risque d’aller regarder de plus près l’abominable politique d’occupation et d’apartheid à l’encontre des Palestiniens.
Deuxièmement, le BDS gagne du terrain parce que c’est un mouvement moral. Il montre ce que l’occupation illégale et raciste d’Israël est en train de faire aux Palestiniens. Il met en lumière les crimes contre l’humanité qu’Israël a systématiquement perpétrés contre les Palestiniens depuis 67 ans. Partout dans le monde il donne aux gens dotés d’une fibre morale un choix clair et net : soit se lever pour des valeurs humanistes, soit s’aligner sur une occupation militaire raciste.
Netanyahu et Rivlin savent tout cela. Au niveau universitaire, là où le BDS fait vraiment la différence c’est quand le monde académique international refuse des promotions universitaires israéliennes. Cela réduirait significativement la coopération avec des entreprises israélienne et pourrait mener les revues académiques à rejeter des publications soumises par des Israéliens. Cette perspective figure sur la longue liste de ramifications que les chercheurs israéliens connaissent déjà et fait écho à l’apartheid sud-africaine.
En fait le mouvement populaire non violent fondé par les Palestiniens il y a bientôt dix ans, en juillet 2005, se calque sur les campagnes anti-apartheid en Afrique du Sud. Il appelle à mettre fin à l’occupation, à l’égalité pour les citoyens palestiniens en Israël et à une résolution pour les réfugiés palestiniens de 1948.
Omar Barghouti, l’un de ses fondateurs, explique que BDS a été lancé par une large frange de la société civile « comme une phase qualitativement neuve dans l’ensemble de la lutte palestinienne pour la liberté, la justice et l’autoétermination. » Barghouti dit que plus de 170 importants partis politiques, fédérations syndicales, associations de femmes, groupes pour les droits des réfugiés, ONG et organisations populaires ont appelé à « un boycott d’Israël jusqu’à ce qu’il respecte intégralement ses obligations de droit international ».
Après des années où les autorités et les commentateurs israéliens ont dédaigneusement écarté l’impact de BDS, il semble que Netanyahu, Rivlin, l’AIPAC et le Congrès US l’aient enfin pris en considération. Le Congrès lie irrégulièrement l’adoption d’une législation qui impacte la vie des Américains aux États-Unis à l’interdiction du mouvement BDS. En même temps, Netanyahu et l’AIPAC cherchent en toute redondance et explicitement à lier le mouvement à un « antisémitisme » historique. Le Premier Ministre israélien en a fait la remarque dans son discours-programme à l’AIPAC, prédisant l’échec de BDS parce qu’il « serait du mauvais côté de la frontière morale ».
Ils ne cessent de pointer du doigt ceux qui réclament le droit des Palestiniens à retourner chez eux ou ceux qui ont renoncé à l’option moribonde des deux États (euthanasiée par la cupidité israélienne envers les terres palestiniennes), pour prouver que BDS égale antisémitisme.