Le récent conflit arméno-turc a changé la stratégie française en matière d’engagement et de défense. Le Monde du 25 juin 2021 écrit :
C’est un phénomène nouveau, un symptôme des conflits hybrides, qui a pris de court et inquiète nombre d’armées dans le monde. Les spécialistes le désignent sous l’appellation de « salve » de drones, ou d’« essaim ». On pourrait parler de « nuée ». Il s’agit en réalité du détournement d’engins sans pilote, de toute taille, jusque-là surtout utilisés pour des missions de renseignement ou des frappes ciblées, à des fins d’assauts groupés, armés, voire kamikazes. Un acte II de la guerre des drones, qui se répète depuis deux ans sur plusieurs théâtres d’affrontements et engendre une discrète course contre la montre des états-majors – y compris en France – pour y faire face.
Cette nouvelle donne tactique était en germe depuis plusieurs années. Mais cette réalité a pris une acuité particulière quand ces méthodes ont été observées lors du conflit dans le Haut-Karabakh, qui opposa l’Arménie à l’Azerbaïdjan à l’automne 2020. La hantise que ce scénario se reproduise ailleurs a notamment conduit la France à considérer cette éventualité comme une urgence opérationnelle pour l’armée de terre et les forces spéciales, jugées vulnérables. La lutte antidrone a ainsi été inscrite au rang des priorités de la révision de la loi de programmation militaire 2019-2025, présentée au Parlement les 22 et 23 juin.
Pour ce qui concerne le futur « conflit majeur » dont parle Sputnik, tous les yeux se tournent vers la Russie et plus précisément l’Ukraine, car le CEMA vient de prendre une teinte antirusse chez nous, et les manœuvres conjointes qui se dessinent se feront sous l’égide anglo-américaine.
Si le traité de désescalade mutuelle START (réduction des armes nucléaires stratégiques) diminue théoriquement le risque de déclenchement d’une guerre américano-russe jusqu’à l’horizon 2025, qu’en est-il d’une guerre sino-américaine ?
Plus sérieux, ce sujet sur le scénario d’une guerre autour du point de cristallisation sino-américain Taïwan.
Si le Président a annoncé le retrait de la France du Sahel, le budget militaire est en hausse pour la troisième année consécutive et les chefs des armées se préparent à un futur conflit de haute intensité. Un exercice d’envergure aura lieu en 2023, les forces américaines et britanniques pourraient également participer.
Après huit ans de présence française au Sahel, le 10 juin Emmanuel Macron a annoncé la fin de l’opération Barkhane en tant qu’opération extérieure. Cette dernière aura été la plus longue et la plus coûteuse depuis la Seconde Guerre mondiale : Paris a déployé plus de 5.000 soldats sur 11 bases militaires dont six au Mali, contre les djihadistes affiliés au groupe État islamique (EI) et à Al-Qaïda. Les massacres de civils se poursuivent pourtant au Mali, au Niger et au Burkina Faso.
Si cette annonce s’inscrit dans la volonté politique déjà évoquée par le chef de l’État en début d’année de réduire à moyen terme la présence militaire française dans le Sahel, il apparaît qu’un conflit de grande intensité impliquant la France dans un futur proche peut être une hypothèse envisagée très concrètement par l’armée.
Fin mars, le magazine britannique The Economist a rapporté la tenue en 2023 d’un exercice militaire de très grande ampleur, baptisé Orion.
L’exercice aura lieu en Champagne-Ardenne, engageant jusqu’à 10.000 soldats et l’armée de l’Air. Il impliquera toute la gamme des capacités militaires françaises, se composera d’exercices au niveau des postes de commandement, de scénarios hybrides, de simulations et de manœuvres à tirs réels. Des forces belges, britanniques et américaines pourraient également y participer.
« Aujourd’hui l’armée française serait incapable d’engager une division, pas un corps d’armée, capable de manœuvrer, et c’est pour ça que cet exercice [Orion] vise à redonner à l’armée française l’habitude à engager et commander des moyens sur de vastes espaces et des durées longues. Et cette évolution paraît particulièrement raisonnable, en particulier si on veut que ce genre de guerre ne se déclenche pas », a commenté Vincent Desportes, général de division de l’armée de terre française, pour Atlantico en avril.
D’après lui, le monde se dirige vers de plus en plus de violences et de conflits armés, les guerres de demain pourraient être des guerres interétatiques extrêmement violentes, même si pas très longues.
« Si un conflit de haute intensité venait à se déclencher, on n’en connaît pas les conditions, mais les candidats sont nombreux, de la Russie, la Chine, les États-Unis, l’Iran, la Turquie, ce conflit serait éminemment dévastateur et la société en serait profondément transformée comme elle l’a été en 1918 ou en 1945 », a-t-il avancé.
Budget en hausse
Le budget de la défense est en hausse pour la troisième année consécutive. En 2021, selon la loi de finances adoptée par l’Assemblée nationale fin décembre, 39,2 milliards d’euros seront consacrés aux armées, soit une hausse de 1,7 milliard par rapport à l’année 2020 (37,5 milliards d’euros).
D’après le communiqué du ministère des Armées, les grands axes du budget seront la montée en puissance des équipements majeurs (157 blindés Griffon et 20 Jaguar pour l’armée de Terre, une nouvelle frégate multimissions pour la Marine nationale et trois nouveaux avions MRTT Phénix pour l’armée de l’Air et de l’Espace), ainsi qu’un investissement en matière d’innovation et de recrutement (l’embauche de 27.000 personnes, dans le renseignement et la cyberdéfense, est prévue).
L’hypothèse d’un engagement majeur
Bien que les adversaires potentiels ne soient pas clairement désignés, la notion de conflit de grande intensité est si répandue parmi les militaires que ce scénario dispose de son propre terme : hypothèse d’engagement majeur (HEM), précisait The Economist dans son article.
Déjà en octobre 2020, François Lecointre, chef d’état-major des armées, avait déclaré dans une interview aux Échos que « d’ici 2030, il faudrait être capable, après six mois de montée en puissance, de soutenir un tel engagement [futur conflit important, NDLR] pendant six mois. Notre analyse géopolitique nous amène à envisager qu’à cet horizon, nous pourrions être conduits à intervenir en coalition à hauteur de cet effort-là ».
En plus de Barkhane au Sahel, depuis 2014, la France mène une opération, au sein de la coalition, contre l’organisation État islamique en Irak et en Syrie. En mars 2020, les 200 soldats participant à cette opération ont été temporairement rapatriés en France métropolitaine en raison de la pandémie de coronavirus.
Les soldats du futur (à partir de 2’17)