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S’il y avait quoique ce soit d’individualiste dans ce roman, le héros n’aurait pas besoin de tomber amoureux de la femme d’un autre... Car l’archétype, ici, est le même qu’on trouve dans le théâtre de boulevard : le mari trompé, la femme infidèle et l’amant découvert... Avec des répliques du genre « Ciel mon mari ! » et des stratagèmes divertissants comme l’amant caché dans le placard ou sur le balcon (la structure étant trop connue et déjà un peu ennuyeuse, la créativité s’exprime dans la variété des ruses déployées pour consommer l’adultère)... C’est la toute première émergence du théâtre bourgeois... l’incapacité à aimer sans philtre, c’est-à-dire de soi-même, hors de l’emprise d’un tiers, sans vivre sous le regard des autres (Tristan ne peut que convoiter la femme de l’autre et il est incapable de posséder sa propre femme)... c’est soit deux hommes pour une femme, soit deux femmes pour un homme, on n’est jamais seuls, il y a toujours un tiers... La pauvre Yseut ne fut qu’une trophy wife, Marc un cuck et Tristan un beta male (un mâle alpha se serait focalisé sur la conquête du pouvoir lui-même plutôt que sur celle de la femme du patron)... On dira ainsi que c’est un roman d’une “étonnante modernité” ou bien que nos rapports amoureux sont d’un incorrigible archaïsme...