Jeanne était une fille inspirée, une vraie croyante humble et sincère qui a vécu sa foi et sa mission jusqu’à la mort. C’est à très juste titre qu’elle a été canonisée, car dans une époque de défaite, d’illégitimité et de division, elle a provoqué une explosion d’espoir qui a enclenché le processus qui a mené à ce que les Anglais soient chassés pour de bon.
Cependant, dans son entourage et plus loin, il était surtout question d’intérêt et de calcul. La légitimité du roi anglais sur une partie de la France (au départ, la France est ce qu’on appelle aujourd’hui l’Île-de-France, mais étant le fief de la monarchie depuis des temps très reculés, par métonymie on s’est mis à appeler tout territoire qui reconnaissait l’autorité royale du nom de France) était soutenue par l’Université de Paris, que le Pape, qui était plutôt du coté du Dauphin mais de manière très timorée, n’a jamais désavouée ou excommuniée. L’Eglise était donc divisée, à l’image du territoire. L’autorité du Dauphin était contestée par les Bourguignons, et à peu près ignorée par le duc de Bretagne. Ces deux grands féodaux font et défont le roi selon leur bon vouloir, car même en temps de paix, il ne peut de toute façon pas régner sans eux. Le pouvoir du roi, en dehors de ses possessions et forces propres, est l’aide que viennent lui fournir ses vassaux dans l’exercice de celui-ci.
Je la jouer genre France éternelle, une et indivisible, avec un roi choisi et régnant pour la gloire de Dieu, c’est vivre dans le fantasme historique comme le premier gauchiste boutonneux venu qui va venir expliquer qu’avant 1789 on mangeait sa propre merde sous les coups de fouet d’un dictateur sanguinaire et tout puissant, puis que d’un seul coup c’était maxi bucket de chez KFC pour tout le monde.
L’histoire est une science. Les passionnées obsessionnels ne s’y font pas, mais alors qu’ils se taisent. Répandre des mensonges, même pieux, est un crime contre la vérité, qui ne jaillit pas des concepts et des idéaux, mais qui dans le domaine de l’histoire est une accumulation lente et très loin d’être idéale de faits complexes et partant dans tous les sens, et qui ne peut être analysée qu’à partir des faits, tirés des sources, que la science historique a pour but de décortiquer, classer, synthétiser. Et ton "analyse", Charles Antoine, à des vieux relents de romantisme fin XIXe bien périmé, inséparable d’une certaine mentalité bourgeoise qui cherche à se donner des frissons en niant le réel pour vivre dans le fantasme.