Les Émirats arabes unis et Israël ont convenu de normaliser leurs relations via un accord négocié par les États-Unis, qui, une fois signé, ferait d’Abou Dhabi la troisième capitale arabe à nouer des relations avec l’État hébreu depuis sa création.
Annoncé initialement par le président américain Donald Trump sur Twitter, cet accord verra Israël mettre fin à ses récents projets d’annexion en Cisjordanie occupée, selon les Émirats. Mais le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou n’a pas confirmé : l’annexion de pans de ce territoire palestinien occupé est « reportée », mais Israël n’y a « pas renoncé », a-t-il précisé.
Biden et Trump sur la même longueur d’ondes
« Une ÉNORME avancée », a tweeté Donald Trump, qui a loué un « accord de paix historique » entre « deux GRANDS amis » de Washington.
Son futur opposant à la Maison-Blanche, le démocrate Joe Biden a lui aussi salué un accord « historique » entre les Émirats et Israël : « Israël et les Émirats arabes unis ont franchi une étape historique pour effacer les profondes divisions du Moyen-Orient », a-t-il déclaré. Il a aussi qualifié la décision émiratie d’établir des liens diplomatiques avec Israël de « décision gouvernementale courageuse et grandement nécessaire ».
L’établissement de relations diplomatiques entre Israël et les alliés des États-Unis au Moyen-Orient, y compris les riches monarchies du Golfe, est un objectif clé de la stratégie régionale de Donald Trump pour contenir la République islamique d’Iran, ennemi intime de Washington et de l’État hébreu.
Depuis sa fondation en 1948, Israël a de son côté eu des relations tumultueuses avec le monde musulman et arabe, et la signature de cet accord, dénoncé par l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, ferait des Émirats le troisième pays arabe seulement à entretenir des liens diplomatiques avec lui, après les traités de paix conclus avec l’Égypte (1979) et la Jordanie (1994).
Pour Benyamin Netanyahou, il s’agit d’un « jour historique », l’accord représentant selon lui une « nouvelle ère » pour le monde arabe et Israël.
Le plan controversé de Donald Trump, dévoilé en janvier, offrait à Israël la possibilité d’annexer des territoires et des colonies juives de Cisjordanie, démarche considérée comme illégale au regard du droit international.
Pas encore de date pour la mise en place d’ambassades
Aux yeux des Émirats, en échange de cet accord, Israël a accepté de « mettre fin à la poursuite de l’annexion des territoires palestiniens ».
« Lors d’un appel entre le président [américain Donald] Trump et le Premier ministre [israélien Benyamin] Netanyahou, un accord a été trouvé pour mettre fin à toute annexion supplémentaire », a affirmé le prince héritier d’Abou Dhabi, cheikh Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, sur son compte Twitter.
« L’annonce d’aujourd’hui est une victoire pour le région et pour la diplomatie », a écrit pour sa part l’ambassadeur des Émirats arabes unis à Washington, Youssef al-Otaïba, sur Twitter.
« C’est une avancée pour les relations entre Israël et les pays arabes », a-t-il ajouté, soulignant que l’accord « préserve l’option de deux États (israélien et palestinien), défendue par la Ligue arabe et la communauté internationale ».
Dans le même sens, le ministre d’État aux Affaires étrangères des Émirats Anwar Gargash a souligné que l’accord ouvrait la voie à l’option à deux États.
« La plupart des pays y verront une initiative courageuse pour garantir une solution à deux États, à l’issue de négociations », a-t-il déclaré en conférence de presse.
Il n’a pas voulu donner de date précise pour l’ouverture d’ambassades, précisant toutefois que cela interviendrait « prochainement ».
L’option à deux États a été ignorée jusqu’ici par le président Donald Trump, dont le plan de paix ne comporte aucune référence à un État palestinien vivant aux côtés d’Israël.
Quant à Benyamin Netanyahou, il a tenu un discours bien différent de celui des dirigeants émiratis le 13 août au soir : « J’ai apporté la paix, je réaliserai l’annexion », a-t-il proclamé.
Pour sa part, le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a salué « un pas en avant significatif pour la paix au Moyen-Orient ».
« Les États-Unis espèrent que cette étape courageuse sera la première d’une série d’accords qui mettront fin à 72 ans d’hostilités dans la région », a-t-il déclaré, ajoutant que l’accord serait signé à la Maison-Blanche à une date ultérieure.
De son côté, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays, un allié des Émirats et des États-Unis, est l’un des deux États arabes, avec la Jordanie, à avoir signé un accord de paix avec Israël, a salué le compromis entre Abou Dhabi et Israël.
Les dirigeants Palestiniens rejettent l’accord
Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a convoqué le 13 août au soir une « réunion d’urgence » de la direction palestinienne. L’Autorité palestinienne a décidé de rejeter l’accord et appelle à une « réunion d’urgence » de la Ligue arabe : « Les dirigeants palestiniens rejettent ce que les Émirats arabes unis ont fait. Il s’agit d’une trahison de Jérusalem et de la cause palestinienne ». L’Autorité palestinienne a par ailleurs annoncé le rappel « immédiat » de son ambassadeur à Abou Dhabi.
Le Hamas a lui aussi sans surprise condamné cet accord, qui « ne sert pas la cause palestinienne mais est considéré comme une continuation du déni des droits du peuple palestinien », a déclaré à l’AFP Hazem Qassem, porte-parole du mouvement islamiste au pouvoir dans la bande de Gaza.
Ces dernières années, Israël a développé une coopération officieuse avec des économies régionales comme Bahreïn, les Émirats et l’Arabie saoudite, avec lesquels il cherche à normaliser ses relations.
Interviewé par RT France, le directeur adjoint de l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques) Didier Billion a estimé que cet accord « ne règle rien sur le fond » de la question palestinienne et note que « les dirigeants palestiniens n’ont pas du tout été concertés ».
Il a lui aussi relevé le fait que Benyamin Netanyahou n’avait fait que « suspendre » le processus d’annexion.