La commande historique de 900 appareils qu’a engrangée Airbus lors du salon du Bourget consacre son triomphe. Face à Boeing, bien sûr, l’éternel concurrent américain, dont la défaite prouve que la puissance économique des Etats-Unis, loin de ce qu’affirment les atlantistes de tout poil, n’est pas nécessairement invincible dès lors qu’on se donne les moyens de l’affronter.
Mais, plus discrètement, cet énorme succès est aussi le triomphe de l’Europe des nations, traditionnellement portée par la France jusqu’au traité de Maastricht, face à une intégration supranationale européenne aujourd’hui en pleine capilotade avec l’interminable agonie de son fleuron, l’euro.
Quel contraste saisissant, en effet, entre l’excellente santé des consortiums multinationaux européens (Airbus, Ariane, Eurocopter,…), qu’avait portés de Gaulle avec une résolution sans faille et qui produisent après quelques décennies de persévérance tous leurs résultats, et la déconfiture d’une monnaie unique à vocation politique (obliger à la création d’une Europe fédérale par la gestion monétaire) qui n’a pas davantage assuré la prospérité des peuples, la bonne gestion des finances publiques, que la stabilité monétaire du continent.
Les euro-réalistes que nous sommes, volontiers caricaturés en « europhobes » par les jusqu’au-boutistes du dogme européiste parce qu’osant contester leur projet grandiose d’abolition de la nation (comme si c’était possible !), ne doivent pas bouder aujourd’hui leur plaisir ni s’interdire de donner de la voix.
Voilà notre Europe, cette Europe qui rit face à leur Europe qui pleure ! C’est cette Europe, nullement incompatible avec ses nations – au contraire, elles sont la première de ses richesses - que nous aimons et voulons promouvoir : ce sont 25, 50, 100 coopérations industrielles, scientifiques, technologiques, éducatives, culturelles,… que la France, l’Allemagne, et tous les pays qui voudraient s’associer à ce couple franco-allemand réconcilié, devraient lancer sans tarder pour assurer à l’Europe, comme aux pays partie prenante, en 2025 ou 2050 le rang qu’elle mérite !
Bien sûr, à plus court terme, ces investissements massifs garantiraient à l’Europe une victoire décisive sur le chômage de masse, cancer de nos sociétés. Dans le contexte de l’Europe supranationale d’aujourd’hui, dont les partisans ne cessent de prétendre qu’elle fait la force de ses pays-membres, jamais l’effort de recherche-développement, jamais l’investissement industriel, n’aura été en tendance aussi insuffisant. Pendant ce temps, les Chinois, les Indiens et les autres ne nous attendent pas. Il n’est pas encore trop tard mais le temps presse…
C’est cette profonde réorientation de l’Europe, qui passe aussi par un renforcement de son pacte social, le rétablissement de ses barrières douanières, une transformation complète de sa monnaie unique en monnaie commune, ou encore l’assouplissement de son dogme de la concurrence, que je vous proposerai lors de la prochaine élection présidentielle. Pour que nous habitions enfin l’Europe qui rit, plutôt que l’Europe qui pleure !