Deux jours après l’attaque du musée du Bardo, à Tunis, l’État islamique (EI) vient d’affirmer sa présence au Yémen, avec la plus sanglante des manières. Il a en effet revendiqué des attentats suicides qui, commis le 20 mars contre des mosquées chiites à Sanaa et à Saada (nord du pays), ont fait au 142 tués parmi les membres de la communauté chiite.
Deux mosquées chiites ont ainsi été visées à Sanaa. La première, celle de Badr, dans le sud de la ville, a été la cible de deux kamikazes. Le premier s’est fait exploser pendant la prière hebdomadaire du vendredi et un second a actionné les explosifs qu’il portait alors que les fidèles prenaient la fuite. Au nord de la capitale, quasiment au même moment, un autre terroriste s’en est pris à un second lieu de culte.
À Sanaa, bastion des rebelles Houthis (d’obédience zaïdite, une branche dissidente du chiisme), un kamikaze s’est fait exploser devant une mosquée. Mais sans faire de victime étant donné qu’il a pu être neutralisé par les forces de sécurité qui l’ont empêché de pénétrer à l’intérieur du bâtiment religieux.
Ces attaques ont eu lieu alors que le Yémen s’enfonce dans le chaos. Les autorités légales étant contestées à la fois par la rébellion houthiste, qui, soutenue par l’Iran, est alliée aux partisans de l’ex-président Saleh (qui l’avait combattue quand il était au pouvoir) et al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), qui a revendiqué l’attentat contre Charlie Hebdo commis en janvier dernier à Paris.
Ainsi, pour AQPA, le Yémen sert de base arrière pour mener des attentats à l’étranger. Ayant assis son implantation territoriale dans le sud et l’est du pays depuis 2011, cette organisation terroriste est régulièrement visée par des frappes de drones américains, les autorités yéménites ayant bénéficié d’un appui de Washington en matière de contre-terrorisme.
Seulement, en novembre et en février, et alors que la rébellion houthiste gagnait du terrain, des unités d’AQPA ont annoncé leur allégeance à l’EI. Et cela en raison de désaccords sur la stratégie à suivre. Jusqu’à présent, ces groupes n’avaient mené que des attaques mineures contre les forces de sécurité yéménites et les milices houthistes, notamment dans la région de Dhamar, située à une centaine de kilomètres de Sanaa.
Les attentats du 20 mars ont été revendiqués par un groupe se présentant comme la « province de Sanaa ». L’EI a assuré que ces attaques ne sont que « la partie émergées de l’iceberg » et que d’autres suivront.
Cette revendication a été reçue avec prudence aux États-Unis. Ainsi, Josh Earnest, le porte-parole de la Maison Blanche, a indiqué ne pas être en mesure, « à ce stade », de « confirmer la véracité des affirmations de ces extrémistes selon lesquelles ils sont affiliés à l’EI ».
« Nous avons vu ce type de revendications dans le passé de la part d’autres groupes extrémistes », a-t-il ajouté, avant de souligner qu’elles étaient souvent avancées pour des raisons de propagande. « Il n’existe pas, à ce stade, de preuve claire d’un lien opérationnel entre ces extrémistes au Yémen et les combattants de l’EI en Irak et en Syrie », a-t-il insisté.
Seulement, AQPA, qui a soutenu l’EI face aux frappes aériennes de la coalition emmenée par les États-Unis, a nié toute implication dans ces attaques, en soulignant, via Twitter, qu’al-Qaïda se refuse de s’en « prendre à des mosquées ».