Le président Petro Porochenko doit promulguer prochainement une série de lois mémorielles, adoptées par le parlement de Kiev le 9 avril dernier.
Ces textes interdisent notamment « toute négation publique du caractère criminel » des régimes « communiste et nazi ». L’utilisation publique de leurs symboles est également prohibée (sauf à des fins scientifiques, éducatives, ou dans les cimetières). Jouer l’hymne soviétique sera par exemple passible de cinq ans de prison et le Parti communiste ukrainien pourrait ainsi être dissout, puisque la faucille et le marteau constituent son logo. Les lois stipulent qu’en cas de violation de la législation, les contrevenants risqueront jusqu’à dix ans de prison et que les organisations, partis ou médias concernés seront interdits.
On peut néanmoins douter que Kiev interdise le régiment Azov, dont le logo reprend pour symbole un soleil noir et la Wolfsangel, des symboles prisées par l’imagerie SS. Financé par l’oligarque israélo-ukrainien Ihor Kolomoïsky, le régiment Azov a été intégré aux « forces de défense » par l’état-major ukrainien en 2014 afin de mater la rébellion dans l’est de l’Ukraine.
Une loi ordonne par ailleurs que les statues des dirigeants soviétiques soient déboulonnées et que les communes ou voies publiques dont le nom fait référence au passé communiste de l’Ukraine soient rebaptisées. L’intégralité des archives du KGB doit être déclassifiée et transférée à un Institut de la mémoire nationale. Une loi doit également offrir un statut légal et garantir « l’honneur et la mémoire » des« combattants pour l’indépendance de l’Ukraine au XXe siècle ». Sont notamment concernés les membres de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA) qui collaborèrent avec les nazis et à qui sont généralement attribués les massacres des Polonais en Volhynie (35 à 80 000 civils).
« Kiev utilise des méthodes qui portent atteinte à la liberté de pensée, d’opinion ou de conscience. En mettant au même niveau les agresseurs fascistes et les soldats ayant combattu le fascisme [...], les autorités ukrainiennes [...] tentent d’effacer de la mémoire collective des millions d’Ukrainiens », a réagi Sergueï Lavrov, le ministère russe des Affaires étrangères, le 10 avril au soir.
En février 2014, l’adoption par la Rada, le parlement de Kiev, d’une loi interdisant l’enseignement du russe avait mis le feu aux poudres dans les régions russophones de l’est du Pays. Dans la même veine, Kiev, par ces nouvelles mesures, rouvre les plaies de l’histoire torturée de l’Ukraine au XXe siècle, rendant toute réconciliation nationale désormais impossible.