Hier soir, le Premier Ministre, en difficulté dans l’opinion et au sein de sa majorité, a inauguré la nouvelle saison de Des Paroles des Actes. Combatif, il a cherché à rétablir son autorité tout au long de l’émission, mais il n’a pas vraiment levé le doute qui subsiste sur son choix pour Matignon.
Un gouvernement en grande difficulté
La situation actuelle rappelle celle du gouvernement Juppé en 1995 : l’arrivée d’une nouvelle équipe, qui avait promis plus de justice pendant la campagne électorale, et qui décide de mettre en œuvre un plan d’austérité pour respecter ses engagements européens dans un mauvais contexte économique, d’où un effondrement dans les sondages. Mais 2012 est pire que 1995 car le pays est en récession, le chômage va rapidement battre des records et la chute est encore plus brutale.
Mais outre le problème de contexte, s’est très rapidement posée la question du profil du nouveau président et de son premier ministre, qui semblent tous deux un peu trop apathiques face à l’urgence de la situation. Bien sûr, ils succèdent à un omni-président agité qui concotait une annonce par jour pour occuper le terrain, qu’importe que ces annonces soient mal ficelées ou ne règlent rien. Mais du coup, le tempo apparent de l’équipe au pouvoir apparaît en décalage avec la situation.
Ayrault affirme son autorité
Des Paroles et Des Actes est l’émission idéale pour reprendre la main, par son format et son horaire. La dizaine de ministres convoqués donnait l’image d’une équipe soudée derrière son chef. La communication n’était pas très subtile mais elle peut fonctionner pour les non spécialistes. Comme François Hollande dans son débat face à Nicolas Sarkozy, Jean-Marc Ayrault avait sans doute comme premier objectif de contrecarrer l’accusation de mollesse et d’affirmer son autorité.
Et sur ce point, on peut penser qu’il a rempli son objectif. Les journalistes ont été incapables de lui couper la parole, le premier ministre imposant son rythme et tançant même David Pujadas, accusé de défaitisme. Face à une NKM visiblement peu à l’aise, le débat sur les réformes fiscales, assez brouillon, a plutôt tourné à son avantage en pointant l’injustice de l’équipe précédente, même s’il a manqué de réparti (en oubliant d’évoquer l’ISF ou le manque de professeurs dans le primaire).
Le malaise persiste
Mais malgré tout, et c’est sans doute la raison pour laquelle les journalistes sont finalement si durs avec lui, un gros doute subsiste sur le choix de Jean-Marc Ayrault pour Matignon. L’affirmation de son autorité était parfois brusque (comme quand il a égratigné NKM sur ses relations avec Borloo ou son échec à obtenir les parrainages pour la présidence de l’UMP), contrastant avec l’image assez réussie, beaucoup plus humaine et normale qui ressortait du début de l’émission.
Sa prestation souffre d’une double faiblesse. Tout d’abord, une faiblesse de fond : en refusant de s’engager pour la continuation de Florange, il illustre l’impuissance d’un gouvernement qui refuse d’utiliser les marges de manœuvre qui existent pourtant et rappelle François Fillon, comme souligné par Nicolas Dupont-Aignan. Ensuite, il ne projette pas l’image d’un premier ministre adéquat face à une telle crise. Son naturel effacé persiste à donner l’impression que le gouvernement est balloté par les flots.
Bien sûr, en restant dans ce cadre, le PS ne peut qu’être balloté par les flots de la récession et de la mondialisation, mais un premier ministre plus dynamique pourrait au moins donner davantage le change et sembler avoir plus de prise sur les évènements.