Averty ayant été un original bourré de talents, on va donc éviter la nécro pénible des titres de presse classiques : le précurseur du clip, le metteur en scène des yéyés, le truqueur habile des émissions de Maritie & Gilbert Carpentier, etc. etc.
On va juste dire que Jean-Christophe est mort à 88 ans, et c’est amplement suffisant. 88 ans, ça laisse le temps de faire des choses, quand on a l’esprit fertile. On va s’intéresser non pas aux commandes commerciales, c’es-à-dire aux figures imposées à Averty – illustrer les émissions de variétés avec Johnny et sa génération – mais à ce qui faisait kiffer le réalisateur : la déconne stylée dans la forme et dans le fond.
Le but n’étant pas de choquer, mais de produire du 100% original, quitte à désorienter le grand public de l’époque. Au final, ce qui reste, c’est ça : la création pure. Pas étonnant que les grands esprits de la déconne artisanale, Averty et Choron, se soient rencontrés pendant cette période bénie des 30 Glorieuses.
Méliès 2.0
De 1963 à 1964, Averty lance son émission Les Raisins verts. Une innovation tant dans la forme que dans le fond : la technologie életronique naissante y est utilisée à mort, faisant de l’artisan aux ciseaux et pot de colle le roi de l’incrustation dans l’écran. Averty se passe de présentateur, et met en scène l’humour noir, qui a défrisé la France trois ans auparavant avec la naissance du journal Hara-Kiri. Le format des Raisons verts sera le moule de toutes les émissions un peu décalées qui joueront sur l’image et le son, ce qui est la base de la télévision. Un clip, un sketch, un clip, un sketch.
Il y invitera des gens brillants, des déconneurs subtils, et sera le premier (et quasiment le dernier) à donner une lucarne au génial Professeur Choron. Averty était un visionnaire, il avait tout compris. Mais dans d’autres mains, la télévision est devenue ce que l’on sait, un organe de propagande et d’abrutissement. Il ne pouvait en être autrement, dans une France gagnée par l’américanisme tous azimuts.
L’ode à la création du Pr Choron
Vu qu’on est partis un peu sur la déconne, voici une interview brute de décoffrage de Choron par Dechavanne en 1992, il y a 25 ans, quand la bien-pensance n’avait pas encore tout tué.
« Le pastiche c’est vraiment la merde de l’esprit, c’est-à-dire que tu voles l’idée d’un autre, tu vois c’est trop facile, et ces mecs-là se disent humoristes... Les mimes, les imitateurs, les pasticheurs, les gars qui font des calembours tu vois ça c’est de la merde, trouvons une idée originale ! C’est plus difficile. »
Choron n’aimait pas non plus les femmes au pouvoir, parce qu’elles devenaient « plus vaches que les mecs ».