C’est le sénateur Bockel qui va se frotter les mains autour de son rapport sur la cyberdéfense. Dans un document en phase de finalisation, la Commission du renseignement du Congrès envisage d’asséner un gros coup de pied aux chinois Huawei et ZTE.
« Sur la base d’informations classifiées et non classifiées, indique le document dont a eu copie l’AFP, Huawei et ZTE ne peuvent pas garantir leur indépendance par rapport à l’influence d’un État étranger et cela pose donc en conséquence une menace pour la sécurité des États-Unis et notre système ». La question touche à la cybersécurité et aux faits d’espionnage. « La Chine a les moyens, l’occasion et les motivations pour utiliser les sociétés de télécoms à des fins malveillantes » indique encore cette commission du congrès qui recommande de « bloquer les acquisitions, les prises de participation et les fusions impliquant Huawei et ZTE compte-tenu de la menace qu’elles représentent pour les intérêts de la sécurité nationale des Etats-Unis. »
En juillet dernier, Jean-Marie Bockel, sénateur du Haut-Rhin, proposait dans son rapport d’interdire le déploiement et l’utilisation d’équipements de cœur de réseaux des Chinois Huawei et ZTE. Ils « présentent un risque pour la sécurité nationale » croit savoir le parlementaire qui prend appui sur des propos tenus par Huawei en Australie. Des représentants « auraient indiqué que, pour mieux assurer la sécurisation des flux de ses clients, Huawei « analysait » (grâce aux techniques dites de « deep packet inspection » ou DPI), l’ensemble des flux de communications (courriers électroniques, conversations téléphoniques, etc.) qui transitaient par ses équipements. » Dans le paragraphe en question, il n’est d’ailleurs nullement question de matériel américain.
Aux assises de la sécurité à Monaco, François Quentin président de Huawei France s’est abrité derrière le succès commercial de ce géant chinois, présent dans 140 pays. Un gage de confiance alors qu’en France, le matériel chinois est présent chez tous les opérateurs et possède France Télécom comme dixième compte mondial.
L’entreprise a d’ailleurs engrangé 32 milliards de chiffre d’affaires l’an passé. « Il appartient au gouvernement de créer un climat de confiance, de transparence, de coopération et d’ouverture » recommandait-il ajoutant que « Huawei met tout sur la table vis-à-vis des instances gouvernementales ou des instances tierces pour obtenir les certifications dédiées comme nous l’avons fait en Grande-Bretagne ». Le numéro un de Huawei France a même tenu à affirmer ce curieux et solennel : « nous nous engageons à ne pas mettre de backdoor », tout en reprochant à Bockel de ne pas les avoir auditionnés avant de rédiger son rapport.
Dans une conférence de presse Bockel a expliqué avoir manqué de temps pour mener à bien cette audition... Dans la même foulée, il affirme avoir « passé des heures et des heures ensemble, presque ligne par ligne » avec l’Anssi (NDLR : Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information) sur son rapport insistant - pour ceux qui n’auraient pas compris - « il n’y a pas une virgule dans ce rapport qui n’ait pas été discutée avec l’Anssi. »
Aux mêmes assises, l’Anssi, par la voix de son directeur, Patrick Pailloux répondait à la problématique des routeurs chinois sous une forme interrogative : « quand vous avez des systèmes essentiels, comment vous assurez que vos systèmes font exactement ce pour quoi ils sont faits et qu’ils fonctionnent correctement ? C’est un problème d’analyse de risque. »