Un « succès » dont le Qatar se félicite. Doha a annoncé, mercredi 22 novembre, qu’un accord avait été conclu entre Israël et le Hamas pour une « pause humanitaire » dans la guerre qui les oppose. Un compromis a été trouvé entre les deux ennemis, grâce aux « efforts de médiation entrepris conjointement avec l’Égypte et les États-Unis ». Le plan prévoit la libération d’au moins 50 otages détenus dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre en échange de 150 Palestiniens retenus dans les prisons israéliennes.
Le 7 octobre, au cours d’une série d’attaques qui a fait plus de 1 200 morts en Israël, le Hamas a également enlevé 240 personnes. Depuis, des tractations ont eu lieu entre Tel-Aviv et le mouvement islamiste palestinien pour obtenir le retour de certains de ces captifs, sous l’égide notamment du Qatar. « On sait que des agents du Mossad, les services de renseignement israéliens, sont arrivés à Doha il y a plusieurs jours déjà », souligne Didier Billion, directeur adjoint de l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). Ces échanges avaient déjà abouti à la libération, fin octobre, de quatre otages, deux Américaines et deux Israéliennes.
Le Qatar entretient des relations avec toutes les parties
Et pour cause : le Qatar jouit d’une position unique d’interlocuteur à la fois du Hamas, d’Israël et des Occidentaux. Le petit pays du Golfe abrite la plus grande base militaire américaine de la région, rappelle Le Monde. Mais il cultive également des « contacts très réguliers et étroits avec la direction du Hamas », relève Didier Billion. Doha accueille en effet depuis 2012 le bureau politique du groupe au pouvoir dans la bande de Gaza, « avec l’aval tacite des États-Unis », rappelle David Rigoulet-Roze, chercheur attaché à l’Institut français d’analyse stratégique (Ifas) et rédacteur en chef de la revue Orients stratégiques.
Le chef du Hamas, Ismaël Haniyeh, vit en outre en exil dans la capitale qatarienne depuis 2019. « Ces liens sont d’autant plus importants que la matrice du Hamas est la mouvance des Frères musulmans, soutenue par le Qatar », poursuit David Rigoulet-Roze. L’émirat verse par ailleurs « 30 millions de dollars chaque mois à la bande de Gaza, pour financer la construction d’infrastructures et les salaires des fonctionnaires, avec l’aval d’Israël ».
Doha coopère également avec Tel-Aviv. Il n’y a « pas de liens diplomatiques officiels » entre les deux États, explique David Rigoulet-Roze. Le Qatar a cependant accueilli une représentation commerciale israélienne entre 1995 et 2000, jusqu’au début de la seconde intifada (2000-2005). Depuis, les deux pays « maintiennent des contacts informels », notamment sur les questions sécuritaires ou pour la coordination de l’aide financière versée à la bande de Gaza.
« Le Qatar parle directement à toutes les parties prenantes au conflit, ce qui en fait un interlocuteur incontournable pour ces négociations »
David Rigoulet-Roze, chercheur attaché à l’Ifas
Européens et Américains, qui ne veulent pas négocier directement avec une organisation qu’ils ont classée comme terroriste, « utilisent Doha comme intermédiaire » pour échanger avec le Hamas, poursuit David Rigoulet-Roze. « C’est une courroie de transmission très utile pour les Occidentaux », insiste-t-il. Dans ce dossier, Doha bénéficie du soutien des États-Unis, principal allié d’Israël et acteur essentiel de la gestion du conflit israélo-palestinien depuis des décennies.
D’autres pays auraient pu jouer ce rôle, comme la Turquie ou l’Égypte. Le Caire a d’ailleurs participé à la médiation qui a mené à l’accord annoncé mercredi. Mais « l’Égypte a participé au blocus imposé à la bande de Gaza par Israël » depuis 2007, rappelle Didier Billion. Le pays est en outre « directement concerné par l’issue du conflit, car il cherche absolument à éviter l’arrivée massive de réfugiés gazaouis sur son territoire ».
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