Le choix éditorial incombe-t-il complètement au nouvel animateur de Sud Radio ? Toujours est-il qu’Étienne Chouard a reçu le 21 mars 2019 la patronne de Causeur, Élisabeth Lévy, une journaliste nationale-sioniste de première bourre, et qu’il est invité à débattre le 11 avril avec Raphaël Enthoven, le sioniste qui imite les philosophes, le tout sous la surveillance d’Éric Morillot.
Logiquement, on ne devrait pas tarder à voir arriver le Premier ministre israélien dans l’émission. Entre-temps, on n’a pas vu d’invité mal-pensant notable, mais ça peut venir, personne n’est à l’abri d’une bonne surprise. Toute la réinfosphère attend l’invitation d’Alain Soral, histoire de mettre un terme aux petites explications emberlificotées de chaque début de Y a du peuple, Seul contre tous ! ou de Parlons vrai et de faire un gros carton d’audimat.
Connaissant assez bien les positions de chaque débatteur, nous avons sélectionné les passages notables, les marqueurs idéologiques, les points de friction. Pour des raisons de confort de lecture, nous avons supprimé les guillemets.
05’30 – Chouard : Le mouvement est naissant ou mourant ? Je vois un mouvement qui n’a jamais été aussi fort (...) à Paris les gens ne viennent plus ? C’est normal on nous tire dessus !
06’25 – Enthoven : C’est pas parce qu’on n’est pas assez nombreux qu’il n’est pas raisonnable de se castagner avec la police, c’est parce qu’il n’est pas raisonnable d’aller se castagner avec la police dans un état de droit...
Chouard : Ha bah non, imaginez que nous soyons 20 millions, nous serions légitimes à nous castagner avec la police.
06’58 – Enthoven : Les gaz lacrymogènes ne sont pas de Zyklon B, quand j’entendais des Gilets jaunes dirent "vous nous gazez comme des putains de juifs", si vous voulez y a un sens de l’analogie qui impose la mesure (...)
07’18 – Enthoven : Pour moi le mouvement est fini (...) étonnamment depuis l’apparition d’Alain Finkielkraut dont les pouvoirs sont étonnants. Quand il est apparu à Nuit Debout il a tué Nuit Debout, quand il est apparu devant les Gilets jaunes il a tué les Gilets jaunes, par sa simple apparition.
09’44 – Morillot : Vous l’avez traité de rouge-brun.
Enthoven : J’ai présenté mes excuses (...)
12’56 – Morillot : Est-ce que vous vous êtes aussi indigné quand BHL a traité Étienne Chouard d’antisémite ?
13’48 – Enthoven : Je pense que BHL faisait référence à cette fameuse vidéo qu’on a tronquée, qu’on a réduite à cette phrase malheureuse sur Soral que vous présentiez comme un résistant (...) Ce que je veux dire ici c’est que ce que vous dites stricto sensu n’est pas antisémite, mais un antisémite trouvera dans vos paroles la confirmation de tout ce qu’il pense. Il regrettera juste que vous n’ayez pas mis le mot « juif » derrière le groupe de gens qui contrôlent en sous-main le pouvoir et il verra peut-être dans le fait que vous ne disiez pas « juif » explicitement la preuve que les juifs eux-même vous bâillonnent.
16’03 – Enthoven : Eustace Mullins ! Vous le célébrez ! Le seul livre de lui que vous brandissez où il n’est pas antisémite ou en tout cas il ne l’dit pas.
Chouard : C’est le seul que je connaisse et il est remarquable (...). C’est le livre qui décrit la création de la FED, c’est une enquête sur laquelle je crois il a passé 20 ans, et c’était avant qu’il soit antisémite si j’ai bien compris, j’ai pas fait d’étude sur sa vie je ne sais pas ce qu’il était, il n’y a pas un mot d’antisémite dans ce bouquin.
16’53 – Chouard : Je ne pense même pas aux juifs évidemment quand je parle des banquiers, je parle des banquiers parce que les banquiers ont un... Les humains ont un problème avec la gestion de l’argent et le prêt à intérêt. Donc le mécanisme même de la banque devrait à mon avis être public. Je me fiche d’ailleurs pas mal de savoir qui sont les humains dans les banques.
18’04 – Enthoven : L’antisémitisme c’est pas seulement la haine des juifs, c’est un système global d’explication du monde. On n’est pas antisémite de temps en temps. Quand on est antisémite ici on l’est là-bas. (...) C’est une pensée qui trouve dans le discours intelligent, construit, structuré et le bel effort constituant que vous faites paradoxalement de quoi se nourrir, et en tout cas elle ne trouve pas matière à contradiction, c’est tout ce que je dis.
30’48 – Chouard : Quand vous dites « le peuple doit être le souverain mais pas le roi » (...)
Enthoven : C’est une différence fondamentale, sinon on bascule dans un absolutisme populaire, c’est une dictature qui s’ignore (...)
Chouard : Qu’est-ce que ça veut dire une dictature populaire, c’est la démocratie ça, non ?
Enthoven : Tocqueville a formé une expression pour cela, il parle de tyrannie de la majorité (...)
– Chouard : Qu’est-ce qu’on met à la place ? On met la tyrannie de la minorité ?
37’00 – Morillot : Criminel ? Vous ne regrettez pas de tels propos ?
Chouard : Le chômage fait 10 à 15.000 morts par an. Morts ! C’est criminel.
Enthoven : Vous allez vous faire applaudir en faisant pleurer, c’est pas l’enjeu, on n’est pas là pour plaire aux gens, donc bien sûr qu’il y a des morts à cause du chômage, mais on est là pour essayer de comprendre quelque chose.
38’48 – Chouard : (...) à les gazer, ce sont des gaz neurotoxiques (...)
Enthoven : C’est pas du zyklon B !
Chouard : Non mais y a pas que le Zyklon B et l’air pur !
40’40 – Chouard : Quand vous dites il ne faut pas utiliser les mots fripouilles, gredins, crapules (...)
Enthoven : Vous faites ce que vous voulez je vous dis juste que je regrette cet emploi parce que je le trouve (...) Vous diriez ça de Mugabe, de Poutine, de Maduro, je veux bien. Macron élu légitimement qui, dans 3 ans s’il perd les élections, s’en va, non ça ne va pas, ça ne marche pas.
Notre analyse
Beaucoup de chouardiens s’interrogent sur l’opportunité pour le défenseur du RIC (ou du RIP) de rencontrer un sophiste qui passe son temps à « casser le jeu », comme on dit dans le monde du football. Il est vrai que Raphaël Enthoven est une pure créature médiatique qui se retrouve à la tête de rubriques radio ou d’émissions de télé sans avoir véritablement souffert. Face à Chouard, quand il est en difficulté, il brouille les pistes avec des phrases emberlificotées, il envoie la fumée, ou l’encre de la seiche.
Peut-être Chouard cherche-t-il, en sacrifiant de sa personne, à montrer en creux ce qu’on n’a pas le droit d’exprimer, c’est-à-dire ce que représente foncièrement Enthoven : le sionisme totalitaire et donc antidémocratique.
En effet, piégé par sa vanité et aspiré par son propre flux (en radio les phrases sortent parfois toutes seules et on a du mal à les contrôler, la pensée inconsciente, celle qui sous-tend le discours, a tendance à vouloir sortir du carcan du langage logique), Enthoven dit tout sans s’en rendre compte.
Par exemple, il explique que Finkielkraut a paralysé et « tué » Nuit Debout comme les Gilets jaunes. Le vieux philosophe sioniste régulièrement pris à partie dans la rue est donc, en creux, le rayon laser anti-antisémite qui flingue tous les mouvements qu’il touche. Cela veut dire, cette fois en creux dans le creux, qu’on en arrive souvent au problème sioniste quand on creuse les problèmes politiques. C’est logique : le sionisme fonde idéologiquement la politique profonde puisqu’il fonde le pouvoir profond.
Quand Enthoven parle du livre d’Eustace Mullins et de la banque, il dit clairement que ce discours donne matière à nourrir le discours antisémite. Ce faisant, il valide implicitement l’amalgame populiste entre « banque » et « juifs ». Ce qui n’est pas une preuve en soi, mais qui montre que le sophiste n’est là que pour protéger les sujets tabous. Les gardiens du Système ont fabriqué l’arme de l’antisémitisme dans ce but : ils décident de ce qui est tabou et de ce qui ne l’est pas.
La définition objective d’un pouvoir religieux.