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Frédéric Taddeï hors-sol : "Le fait qu’on peut plus rien dire pour moi est une connerie"

Après 10 ans d’animation de Ce soir ou jamais sur France 2 et France 3 entre 2006 et 2016, Frédéric Taddeï a été remplacé par la très pistonnée Léa Salamé, devenue madame Gluksmann à la ville. Officiellement, ses audiences (500 000 téléspectateurs) n’étaient pas suffisantes ; officieusement, c’est parce qu’il avait osé inviter Soral et Dieudonné. La direction de la chaîne ne le lui a pas reproché, c’est le petit commissaire politique socialo-sioniste de France 5 qui s’en est chargé, en 2013, dans une vidéo qui a consacré son surnom : Patrick « Liste Noire » Cohen.

 

 

Débarqué du service public audiovisuel, Taddeï, qui incarnait alors la défense de la liberté d’expression contre la censure, a été embauché en 2018 sur la chaîne russe en français RT pour une émission quotidienne de débats. Du côté de la contestation et de la réinformation, tout le monde s’attendait à une programmation encore plus ouverte, avec tous les dissidents qui frappaient à la porte : ils ont vite déchanté, Interdit d’interdire a glissé dans le débat culturel politiquement inoffensif. Taddeï a finalement déclaré l’arrêt de l’émission deux jours avant le déclenchement du conflit en Ukraine, le 22 février 2022.

Le 11 janvier 2023, il est invité par la paire mixte du Crayon, une chaîne YouTube qui fait dans le débat gentillet, pour faire le point sur la liberté d’expression en France. Taddeï est effectivement le dernier animateur à avoir pris des risques avec sa programmation d’invités. Il peut en parler. Et il va surprendre tout le monde à 4’30...

Taddeï : Le fait qu’on peut plus rien dire pour moi est une connerie. Ce qui est certain, c’est qu’aujourd’hui vous avez plus de sensibilités différentes à ménager. Autrefois vous étiez obligé de ménager la sensibilité de la majorité, qui créait la norme. À partir de là vous ne pouvez pas dire « caca prout » ou ou « je t’encule » par exemple. […] Il y a différentes normes, et à l’aune de chacune vous pouvez froisser des susceptibilités, donc effectivement comme les susceptibilités peuvent se manifester à travers les réseaux sociaux, c’est plus compliqué. Mais on peut tout dire.

La Crayon : Est-ce que vous pensez qu’on a une plus grande liberté d’expression aujourd’hui qu’à l’époque ? Justement à cause des réseaux sociaux ? Ou pas forcément parce qu’il y a des sujets beaucoup plus sensibles que tout le monde peut rebondir dessus ?

Taddeï : Moi je crois que on peut, on peut, y a à la fois une plus grande liberté d’expression parce que la norme commune à tout le monde est faible, donc vous pouvez beaucoup plus vous exprimer, mais les sensibilités et les susceptibilités étant plus nombreuses, il faut faire attention à ce qu’on dit.

Donc si on suit bien la pensée taddéiste, on peut tout dire, mais il faut faire attention à ce qu’on dit, donc on ne peut pas vraiment tout dire. Ce qui a été le cas d’Interdit d’interdire, où, à force de faire attention, on n’y disait plus rien. On reprend à 17’08.

La Crayon : Il y a beaucoup de gens qui pensent qu’aux États-Unis il y a une plus grande liberté d’expression qu’en France…

Taddeï : Ça c’est sûr ! […] La liberté d’expression est totale aux États-Unis, la liberté d’expression est extrêmement réduite en France.

Taddeï vient de dire le contraire de ce qu’il a avancé quelques minutes plus tôt. On appelle ça une contradiction majeure. Il va néanmoins préciser sa pensée.

Taddeï : On peut défiler après l’attentat contre Charlie Hebdo pour la liberté d’expression, ça mange pas de pain. Mais en réalité notre liberté d’expression est extrêmement réduite. Et elle a été réduite par la loi pour toutes sortes de raisons, qui vont de la diffamation au respect de la vie privée en passant par un certain nombre de lois, contre l’apologie du racisme ou de la haine, ou pour des lois mémorielles. Pour toutes ces raisons-là, notre liberté d’expression est réduite. Il se trouve que j’ai grandi dans ce pays et que je suis fait comme ça aussi. J’ai pas du tout envie qu’on puisse se traiter de « sale Arabe » ou de « sale juif » dans le journal. On peut le faire aux États-Unis, y a pas de problème, on peut défiler en criant « sale juif ». En France non, je trouve ça mieux.

Message reçu 5 sur 5. Il faut rappeler à l’animateur que la liberté d’expression ne consiste pas forcément à haïr ou à insulter ses adversaires politiques, mais à discuter avec eux, même si c’est tendu. Or, en France, on ne peut pas discuter avec les représentants du lobby sioniste : ses contradicteurs sont interdits de plateau. Taddeï le sait, mais il ne le dit pas ouvertement. De ce fait, son émission sur RT, qui devait être le refuge de la liberté d’expression – on s’est naïvement fiés au titre, inspiré du slogan phare de Mai 68 – a sombré dans le culturel dépolitisé.

Avoir défendu la liberté d’expression devant Patrick Liste Noire Cohen en 2013 pour arriver à justifier sa réduction extrême en 2023, ça s’appelle tourner casaque, ou renoncer. Tout ça pour ça, aurait dit Lelouch. Taddeï officie aujourd’hui sur Europe 1, chez Bolloré.

 

Comme prévu, sur E&R :

 






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