Les talents vocaux d’Alain Soral n’y auront pas suffit, « Je te veux si tu veux de moi » aura fait un flop auprès de Frédéric Haziza, envers qui la main pourtant se tendait. Celle de la Réconciliation au moins – parce que pour l’Égalité, on a compris désormais que cela serait malheureusement éternellement impossible. Pire, repoussant l’offre de paix, l’aigri journaliste alla se plaindre dans les jupes de la Justice.
Entraînant dans son aspiration toute une nuée d’associations opportunistes flairant le bon coup, et à moindre frais, sur le dos d’un résistant nu devant l’arbitraire, l’Haziza fendit courageusement la salle du tribunal où il a son couvert désormais. Celui qui tient l’affiche sur une télévision nationale, y diffusant ses haines et ses obsessions – quand ce n’est pas lors des questions télévisées au Président de la République himself – ne souffre pas qu’on le taquine un peu. Petit par la taille, grand par l’acrimonie vindicative, notre pigiste expose ses plaintes au juge :
En l’espèce, les propos visent Monsieur Frédéric HAZIZA à raison de son appartenance à la religion juive – le prévenu rappelle que Monsieur HAZIZA est « de la communauté juive », communauté qu’il avait préalablement qualifiée de celle « dont on n’a pas le droit de parler » – et plus généralement l’ensemble des personnes de confession juive.
Monsieur HAZIZA est présenté par Alain BONNET comme l’exemple topique des juifs et l’incarnation de ce qu’il leur reproche. En s’adressant, dans un premier temps, à Monsieur HAZIZA, Alain SORAL tient à son égard des propos qui, exprimés dans des termes généraux, concernent l’ensemble des personnes de confession juive.
Puis, Alain SORAL s’adresse directement « aux juifs », qualifiés de « gens qui représentent moins de 1% de la population française », faisant écho aux expressions de « communauté juive et communauté dont on n’a pas le droit de parler ». Ces propos tenus visent également Frédéric HAZIZA, en tant que membre de la communauté juive et sujet de la vidéo litigieuse.
On appréciera alors l’inversion accusatoire venant de quelqu’un dont le Premier ministre rappelait qu’il faisait partie de l’avant-garde, reléguant par voie de conséquence Alain Soral dans le monde sombre de l’arrière-garde :
Ainsi, Frédéric HAZIZA, journaliste – ce qui serait dû au fait qu’il appartient à la communauté juive –, est qualifié de « censeur tribaliste ». Par ces propos, il est imputé à Frédéric HAZIZA de pratiquer la censure et de « tordre » l’information délivrée dans l’intérêt de « la communauté juive ». Cette dernière est ici qualifiée de « tribu » dans une intention manifestement dégradante, cette terminologie suggérant que la « communauté » serait composée d’individus primitifs. Il faut sans doute comprendre que cette catégorie s’oppose à celle des êtres civilisés dont Monsieur Alain BONNET semble se revendiquer.
Enfin, extrapolant au-delà de toute mesure les propos du prévenu, Frédéric Haziza, toujours par l’entremise de ses avocats, déclare :
Les propos poursuivis tendent également à susciter des actes de discrimination et de violence à l’égard de Monsieur HAZIZA et des juifs.
En premier lieu, l’opposition faite entre « les Français » et « les juifs » suggère que ces derniers n’ont pas leur place en France et qu’il est ainsi légitime de les en chasser, ce qui serait dans l’intérêt « des Français ».
En outre, les expressions « je commence à en avoir plein le cul et je pense que je ne suis pas le seul » et « je fais partie des très nombreux français qui en ont plein le cul » suggèrent que « la domination » des juifs n’a que trop duré et qu’il est temps, pour la faire cesser, de commettre des actes discriminatoires et violents à l’encontre de ces derniers.
Alain BONNET cherche à fédérer ses auditeurs autour d’actions discriminatoires contre « la communauté juive », en laissant penser qu’un mouvement est en marche puisque son « ras-le-bol » serait partagé par de très nombreux autres « Français comme lui ».
La conclusion de ce réquisitoire ne fait plus de doute désormais, l’accusé devient, déployant le cas particulier à une situation générale, le responsable de toutes les souffrances du Monde :
Il est incontestable que les propos tenus par Alain SORAL contribuent à la montée de l’antisémitisme et des actes de violence commis sur le territoire national à l’encontre des personnes de confession juive (pièce n°10).
L’ensemble des éléments constitutifs du délit de provocation à la haine en raison de l’appartenance à une religion déterminée, prévu et réprimé par l’article 24 alinéa 8 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, est réuni au préjudice de Monsieur Frédéric HAZIZA et de l’ensemble des personnes de religion juive.
Les plus grandes douleurs n’ont certes pas de prix, mais elles ont au moins un coût. L’avocat demande au tribunal de :
CONDAMNER Monsieur Alain BONNET à verser à Monsieur Frédéric HAZIZA la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral
ORDONNER la suppression, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de la vidéo intitulée « Alain Soral : entretien de novembre 2012, partie 1 »
ORDONNER la publication du communiqué judiciaire suivant, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, en page d’accueil du site Internet www.egaliteetreconciliation.fr :
« Par jugement en date du ---- prononcé par le Tribunal de Grande Instance de Paris, en audience correctionnelle, Monsieur Alain BONNET dit SORAL a été condamné à une peine de ------ pour avoir commis au préjudice de Monsieur Frédéric HAZIZA et de l’ensemble des personnes de confession juive le délit de provocation à la haine raciale en tenant, dans une vidéo mise en ligne au mois de décembre 2012 sur le site internet « www.egaliteetreconciliation.fr », des propos ayant pour objet de provoquer à la discrimination, à la haine et à la violence à l’encontre de Monsieur Frédéric HAZIZA et des personnes de confession juive. »
ORDONNER la publication du communiqué judiciaire (...) sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, dans la limite de 5 000 euros TTC par insertion, dans les journaux LE MONDE, le FIGARO, LIBERATION et LE POINT aux frais de Monsieur SORAL.
CONDAMNER Monsieur Alain BONNET à verser à Monsieur Frédéric HAZIZA la somme de 3 000 euros en application de l’article 475-1 du Code de procédure pénale.
Le jugement en première instance fut rendu le 21 novembre 2014. Les vœux étant magiquement presque tout exaucés, le nébuleux essaim d’associations victimaires prirent leur part du gâteau : LICRA, UEJF, SOS Racisme, LDH, J’ACCUSE AIPJ. En revanche, sans que l’on comprenne vraiment pourquoi, le MOUVEMENT DU PEUPLE CONGOLAIS – dont on ne sait, il est vrai, s’il n’était pas arrivé ici par accident – se voit débouté de ses prétentions. Mais ce ne sont que des Congolais, aurait dit Pascal Bernheim...
Puis vint l’appel, le 7 octobre 2015. Las, la cour confirma à peu près tout dans une longue litanie juridique qui mérite qu’on l’offre à nos lecteurs quasiment en l’état :
LA COUR (...) confirme le jugement du 21 novembre 2014 en ce qu’il a déclaré Alain SORAL coupable dans les termes de la prévention ainsi que sur la peine pronconcée, (...)
Confirme le jugement (...) le retrait des propos litigieux (...) sous astreinte de 1000 € par jour de retard (...)
Reçoit les constitutions de partie civile de la LICRA, de l’UEJF et de SOS Racisme,
Condamne Alain SORAL à payer à chacune de ces associations une somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts,
Condamne Alain SORAL à payer à Frédéric HAZIZA une somme de 3000 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale en cause d’appel,
Condamne Alain SORAL à payer à la LDH et J’ACCUSE AIPJ, une somme de 500 euros chacune au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale en cause d’appel,
Condamne Alain SORAL à payer à la LICRA, l’UEJF et SOS Racisme, chacune, une somme de 1500 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale, au titre des frais exposés devant le tribunal de la cour.La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d’un montant de 169 euros dont est redevable le condamné.
Mais en ajoutant quelques amendes accessoires et tous les faux-frais dont la justice a le secret, la somme se porte véritablement à 24.505 euros !
Cependant, un procès d’Haziza en cache toujours un autre, un peu comme en matière de train... C’est ainsi que ce 10 février nous apprenions, par voie de presse (!), qu’Alain Soral était condamné dans une autre affaire Haziza. Les sommes sembleraient se monter cette fois à 33.000 euros. Une véritable surenchère !
Et ce n’est pas tout, un troisième procès Haziza se profile, mettant en cause, encore une fois, des commentaires de nos lecteurs. Mais, parfaite victime qu’il s’agit d’assassiner politiquement, c’est Alain Soral qu’on poursuivra. Plus de 57.000 euros en deux procès, déjà. Jusqu’où monteront-ils ? pourrait se demander désormais l’essayiste traqué.
Valls avait raison. Nous sommes en guerre, désormais. Enfin, plus précisément, ils sont en guerre.