L’Europe et le Canada viennent d’achever la rédaction de leur accord de libre-échange (Accord économique et commercial global ou AECG), qui préfigure l’accord avec les États-Unis. Barroso et Van Rompuy se sont déplacés à Ottawa pour le confirmer officiellement. Reste maintenant à le ratifier, pendant que la nouvelle commission conclura la négociation du traité avec les États-Unis. La commission Juncker sera la commission du libre-échange transatlantique !
Un traité de libre-échange fleuve
On commencera d’abord par saluer la performance des négociateurs, qui ont rédigé ensemble un texte de 1634 pages… On est loin du choc de simplification qui hante les esprits français. Voici le texte :
On souhaite un bon amusement à ses lecteurs, surtout qu’une grande partie du texte formalise sa place dans la hiérarchie des normes existantes et renvoie donc en permanence à d’autres traités en vigueur. Cette seule petite particularité permet déjà de dissiper tout malentendu : le libre-échange n’est même plus une affaire de spécialiste, mais une affaire de cabinets d’avocats internationaux et de directions juridiques pléthoriques des États signataires.
Le Canada crie victoire sur l’Europe
Face à cette oeuvre monumentale, le Premier ministre canadien s’est senti monter une larme d’émotion à l’œil, et s’est fendu d’un communiqué tout aussi fleuve où il vante les mérites de cette création.
Lorsqu’il entrera en vigueur, l’Accord procurera au Canada un accès privilégié au marché intégré le plus vaste et le plus lucratif au monde, un marché comptant plus de 500 millions de consommateurs, qui génère presque 18 mille milliards de dollars en activité économique annuellement. En fait, une étude menée conjointement avec l’UE, qui favorisait le lancement de négociations, a conclu qu’un accord pourrait faire augmenter les revenus du Canada de 12 milliards de dollars par an et le commerce bilatéral, de 20 p. 100, ce qui reviendrait à créer presque 80 000 nouveaux emplois ou à augmenter de 1 000 dollars le revenu familial moyen au Canada.
On ne sait pas si Stephen Harper (le Premier canadien) est sincère ou cynique lorsqu’il prend pour argent comptant les chiffres annoncés par l’étude préparatoire au traité, mais il ne lésine pas sur la quantité dès qu’il s’agit de vanter les mérites de son bébé diplomatique. On est en tout cas heureux d’apprendre que l’Europe fait rêver certains parce qu’elle est le marché intégré « le plus vaste et le plus lucratif au monde ».
Les Québécois dindons de la farce libre-échangiste ?
Ce communiqués triomphaliste comporte une petite mention sur l’agriculture, qui en dit long sur l’imposture de l’accord.