Certes, les grandes universités étasuniennes dominent la plupart des classements internationaux, mais depuis quelques années, les critiques se font de plus en plus fortes, sur l’aspect inégalitaire mais aussi les dépenses somptuaires et le coût exhorbitant des études supérieures aux Etats-Unis.
Une bulle universitaire
La critique du coût délirant des études n’émane pas d’une officine gauchisante alter-mondialiste, mais bien du très sérieux et très libéral The Economist, qui n’en est pas à sa première attaque. Dans un nouveau papier intitulé « la calamité du coût de l’université », l’hebdomadaire reprend les conclusions d’un rapport du cabinet de conseil Bain, qui pointe l’explosion de coûts. Il pointe que les universités étasuniennes ont augmenté leur endettement de 12% par an de 2002 à 2008.
Les dépenses d’équipement ont augmenté de plus de 6% par an et celles consacrées à l’instruction de près de 5% par an. Résultat, The Economist rapporte une envolée du coût des études puisque depuis 1983, le coût moyen d’un étudiant é a progressé trois fois plus vite que l’inflation. De 2001 à 2010, le coût des études est passé de 23% du salaire annuel moyen à 38%. Résultat, les étudiants s’endettent massivement : 1000 milliards de dollars aujourd’hui (dont quelques subprimes).
Cette étude complète un papier du même journal d’il y a deux ans qui pointait également les dépenses somptuaires des universités et le coût exhorbitant des études, alors que les étudiants et les professeurs travaillent de moins en moins. The Economist comparait alors ces fleurons des classements internationaux aux constructeurs automobiles étasuniens avant leur faillite ! D’autres études ont également souligné l’explosion des frais administratifs et la bureaucratie envahissante.
L’échec du privé
Bien sûr, tout cet argent permet de figurer tout en haut des classements internationaux en payant des professeurs reconnus. Mais même The Economist se pose la question du mauvais fonctionnement du marché dans ce domaine. En effet, le prix semble être devenu un argument de vente : plus il est élevé, plus la formation semble demandée. La concurrence devient totalement malsaine et anti-économique avec une bulle digne de celle des starts-ups de la fin des années 1990.
Pire, comme Paul Krugman l’avait noté dans son livre « L’Amérique que nous voulons », ce système pose un gros problème d’inégalités et d’injustice. Il rapportait en effet une étude sur les élèves de 5ème qui montrait que ceux qui étaient dans le premier quart de leur classe mais dont les parents étaient dans le 4ème quart pour les revenus avaient autant de chances d’aller à l’université que ceux qui étaient dans le 4ème quart de la classe mais dont les parents étaient dans le 1er pour les revenus !
En clair, par-delà l’énorme gâchis financier de cette bullle financière, cette envolée des frais de scolarité des universités étasuniennes produit une société de plus en plus aristocratique où les mauvais élèves de parents riches ont autant de chances de faire des études que les bons élèves de parents issus des classes populaires. Voilà une nouvelle démonstration des très grandes limites du marché, outre le cas de la santé, 50% plus coûteuse qu’en France pour un moins bon résultat.
Contrairement à ce que veulent faire croire les ayatollahs néolibéraux, le marché ne fonctionne pas toujours. Et dans le domaine si important de l’éducation, il démontre des failles colossales aux Etats-Unis qui devraient être prises en compte avant tout projet de libéralisation ailleurs.