Le Conseil constitutionnel se penche jeudi sur les assignations à résidence décidées dans le cadre de l’état d’urgence, alors que montent les critiques contre ce régime d’exception décrété après les attentats du 13 novembre.
Derrière la technique juridique, ce qui est en jeu, c’est la « dialectique éternelle entre l’ordre et la liberté », selon l’expression de Xavier Domino, rapporteur public au Conseil d’État, qui l’a employée vendredi dernier.
Saisie par sept militants écologistes qui contestaient leur assignation à résidence pendant la COP21, la plus haute juridiction administrative avait certes rejeté leurs demandes, jugeant que le risque qu’ils participent à des actions violentes existait.
Mais le Conseil d’État n’en avait pas moins estimé qu’il fallait examiner la conformité de ce régime contraignant avec la « liberté constitutionnelle d’aller et de venir ». Les militants qui l’avaient saisi étaient par exemple tenus de pointer trois fois par jour au commissariat et de rester chez eux la nuit.
Ce renvoi aux Sages d’une « question prioritaire de constitutionnalité », demandé par l’un des militants écologistes, est le premier depuis l’entrée en vigueur de l’état d’urgence, qui trouve son origine dans une loi de 1955 et qui renforce les pouvoirs des forces de l’ordre.
« La bride est lâchée »
Alors que ce régime d’exception doit durer au moins jusqu’à fin février, il est de plus en plus critiqué par les défenseurs des libertés publiques, qui jugent son bilan bien maigre.
Me Patrice Spinosi, qui représentera jeudi la Ligue des droits de l’homme (LDH) devant le Conseil constitutionnel, assure ainsi à l’AFP que « la bride est lâchée au bénéfice des forces de police », et ce avec un contrôle seulement « illusoire » du juge.
Jeudi, la LDH et une centaine d’organisations tiendront d’ailleurs une conférence de presse pour protester contre les « abus » liés à l’état d’urgence, et exprimer leur crainte qu’il soit encore prolongé.