Le ton monte encore d’un cran entre la Turquie et la France : après la réception d’une délégation de responsables kurdes de Syrie à l’Élysée le 29 mars, Ankara voit rouge et accuse Paris d’encourager le terrorisme.
Le 7 avril, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a accusé la France d’« encourager les terroristes », témoin des tensions entre Ankara et Paris sur le dossier syrien. En cause : la réception le 29 mars par Emmanuel Macron de représentants des Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition arabo-kurde dirigée par les milices kurdes YPG (Unités de protection du peuple), visée par une opération militaire turque dans le nord de la Syrie.
« La France encourage les terroristes en les recevant au palais présidentiel », s’est indigné Recep Tayyip Erdoğan, selon l’agence Reuters, lors d’un discours à ses partisans dans la province de Denizli, dans le sud-ouest de la Turquie. Et de préciser : « Tant que les pays occidentaux continueront à soutenir des terroristes, ils continueront d’être la cible d’attaques terroristes en réaction. »
Selon des propos rapportés par France 24, le président turc a également prévenu les puissances européennes : « Aussi longtemps que vous nourrissez ces terroristes, l’Occident se noiera. »
Avant ces déclarations du chef d’État turc, son ministre des Affaires européennes, Omer Celik, avait déjà invité Paris à choisir son camp – entre la Turquie et les milices kurdes – « dans le cadre de la lutte contre Daech » dans le Nord syrien, dans un entretien accordé le 5 avril à Reuters.
Emmanuel Macron avait appelé à un dialogue entre Turcs et FDS
Lors de sa rencontre avec les représentants des forces kurdes à l’Élysée, Emmanuel Macron avait espéré « qu’un dialogue puisse s’établir entre les FDS et la Turquie avec l’assistance de la France », tout en précisant que Paris ne prévoyait pas – contrairement à ce qu’avaient affirmé des responsables kurdes – « de nouvelle opération militaire sur le terrain dans le nord de la Syrie en dehors de la coalition internationale anti-Daech ».
Le président turc n’avait guère goûté cet appel français au dialogue entre Ankara et les milices kurdes syriennes. « Qui êtes-vous pour parler de médiation entre la Turquie et une organisation terroriste ? », avait lancé le 30 mars Recep Erdoğan, avant d’ajouter : « Nous n’avons pas besoin de médiation. Depuis quand la Turquie veut-elle s’asseoir à la table d’une organisation terroriste ? D’où avez-vous sorti cela ? ». L’Élysée avait apporté le même jour des précisions sur ses propositions de médiation.
Les Occidentaux tiraillés entre Ankara et milices kurdes
La Turquie a lancé fin janvier l’opération militaire « Rameau d’olivier » dans le nord de la Syrie, sans l’autorisation de Damas, afin de chasser les milices kurdes des YPG de la ville d’Afrin. Le 18 mars, l’armée turque et ses alliés, parmi lesquels les rebelles de l’Armée syrienne libre (ASL), ont repris le contrôle de la ville. Une conquête militaire, entachée de scènes de pillage rapportées notamment par l’AFP, contre laquelle les chancelleries occidentales ont haussé le ton.
À présent, la Turquie entend étendre son opération contre les milices kurdes dans le Nord syrien à Tal Rifaat, située à une cinquantaine de kilomètres à l’est d’Afrin, avant de continuer vers Manbij, Aïn al-Arab (nom de Kobané en arabe), Tal Abyad, Ras al-Aïn et Qamichli.