Dominique Baettig est un psychiatre et homme politique suisse.
Quelle est votre réaction à l’affaire liée à la députée socialiste Lisa Bosia Mirra qui aurait aidé quatre migrants mineurs africains à franchir la frontière helvétique ?
Une irritation qui se transforme en exaspération face à l’attitude de certaines politiciennes de la gauche moraliste, féministe, qui se croient autorisées, au nom de leur ressenti subjectif et péremptoire de ce que sont les droits de l’homme individualiste, de transgresser la Loi qu’elles sont censées respecter ou alors modifier par des interventions parlementaires. Imposer sa compassion arbitraire à toute une population est une attitude infantile, émotionnelle et toute puissante, qui se moque de l’Intérêt général et de l’État de Droit. Si elle le voulait pourtant, la Lisa Bosia Mirra aurait pu accueillir chez elle les requérants mineurs non-accompagnés (la dernière trouvaille de l’industrie ingénieuse de la transgression des frontières et du droit, no borders, no limits)) en assumant personnellement démarches et coûts.
Mais les socialistes de droit humain se croient autorisés à la redistribution des requérants d’asile illégaux en les mettant à la charge de la Confédération, de la collectivité. Facile, déposer la patate chaude, ne pas se soucier des conséquences ,difficultés sociales , culturelles et financières occasionnées et croire jouir d’un droit supérieur (comme un pape, un monarque, un Bernard-Henri Lévy) qui s’autorise d’en faire à sa guise, selon son bon plaisir, sa morale personnelle. Privatiser la morale et collectiviser les coûts et les conséquences. Je ne peux qu’espérer (mais sans me faire beaucoup d’illusions) qu’elle sera sanctionnée, comme les passeurs, les contrebandiers, les trafiquants de chair humaine et autres esclavagistes modernes et « ubérisés ».
À propos des Érythréens qui arrivent en Suisse chaque année, voici la position d’Alain Soral :
« On ne comprend pas pourquoi, d’abord, ils choisissent la Suisse. Ils n’ont aucune attache ethnico-culturelle et religieuse avec ce pays. C’est une démarche de pur parasitisme puisqu’il n’est pas question qu’ils travaillent. On ne voit pas pourquoi la Suisse accepte ces parasites et ces prédateurs nomades. C’est totalement incompréhensible, sauf si on comprend l’idéologie mondialiste qui pousse au métissage forcé et qui pousse à dévier les colères légitimes envers les prédateurs financiers en tournant la colère populaire vers des parasites du sous-prolétariat, pour cacher leur propre parasitisme. Malheureusement, on voit que la Suisse subit la même offensive orchestrée de loin en loin par Soros et son Open Society Foundation, sa fondation pour la société ouverte, qui est en fait la destruction des nations, la destruction des frontières, la destruction des identités par le métissage forcé et le métissage avec des gens qui ne peuvent que produire un déclin et un effondrement civilisationnels ».
Que vous inspire cette réflexion ?
La Suisse a toujours considéré avec bienveillance les migrants qui disent vouloir s’échapper de systèmes politiques totalitaires, de gauche ou de droite. Les Hongrois après 1956, les Vietnamiens (boat-people) et maintenant les Érythréens qui se présentent comme des victimes d’un service de défense nationale de longue durée, spartiate, sous la guidance d’un gouvernement qui a acquis son indépendance par la lutte et qui maintient la cohésion nationale d’une main de fer. Les bobos libéraux et gauchistes suisses ont des hauts le cœur lorsqu’on leur parle de service militaire de longue durée (sauf en Israël bien sûr).
Éviter la conscription où l’on deviendrait l’esclave d’un État autoritaire et souverainiste, susceptible et méfiant vis-à-vis de la Communauté internationale, donne droit à un préjugé favorable qui permet de rentrer dans la longue enquête pour obtenir l’asile. Ceci dit, il y a aussi une exception suisse, un arrêt du Tribunal fédéral administratif de 2008 qui reconnaît comme juste motif d’asile le fait d’être un ressortissant déserteur érythréen. Le taux d’acception en 2016 est de 46 %. Le regroupement naturel familial fait le reste il y a actuellement (chiffres de début 2015) plus de 20 000 ressortissants d’Érythrée en Suisse. L’intégration n’est pas bonne (87 % sans activité et bénéficient de prestations sociales, ou d’activités « au noir »), la communauté vit plutôt en circuit fermé et le gouvernement érythréen en tirerait aussi un certain profit en prélevant des taxes sur ses ressortissants qui veulent voyager au pays.
Il est extrêmement difficile de combattre de face cette migration opportuniste en raison de tout l’imaginaire occidental concernant les victimes d’États autoritaires et totalitaires qui sont intouchables dès qu’on évoque les mythes de la dictature, le droit des victimes à vivre une vie meilleure ailleurs. L’agacement de la population monte, mais il y aussi une gauche exotique qui joue au Bon Dr Schweitzer en imposant sa compassion, sans trop se préoccuper des conséquences à long terme de leur politique émotive, au grand bénéfice (plus de 3000 euros le trajet) des passeurs.
Il y a aussi un business de l’asile. Les requérants consomment plus ici que chez eux, en portables, biens de consommation, location d’appartements, s’endettent. C’est bon pour une partie du commerce, la croissance, l’endettement, surtout que l’aide sociale paie pour mettre à flot les précarisés qui veulent le standard minimum. L’idéologie du métissage généralisé imposé, alors que des groupes discrets et influents savent très bien conserver leur identité et leur culture, me paraît ici jouer un rôle plus marginal que les calculs économiques à court terme et le besoin bien sûr d’une ingénierie sociale qui crée des conflits et des clivages de diversion, du sociétal larmoyant au lieu de se préoccuper de démocratie directe économique.
Les autorités italiennes viennent chercher les migrants à proximité des côtes libyennes. Pensez-vous que Matteo Renzi agit uniquement de sa propre initiative ?
C’est une argumentation humanitariste « perverse ». Pour éviter que les migrants, qui sont « aspirés » vers l’Europe et sa Terre Promise fantasmée, ne prennent des risques, il faut aller les chercher tout prêt du point de départ. Idéal pour l’investissement sécuritaire minimaliste des passeurs. Les autorités politiques de l’Union européenne et les milieux économiques transnationaux veulent de la croissance, des nouveaux consommateurs relocalisés, « uberisés », ils veulent rapatrier certaines entreprises en important des travailleurs captifs, endettés par les passeurs, prêts à tout pour casser les coûts du travail, le dumping salarial, culturel, démocratique. Ce n’est pas parce que des hommes jeunes, sans perspective d’avenir dans leur pays, veulent migrer qu’il faut s’incliner devant le fait accompli, l’attaque du patrimoine commun, la destruction du filet de solidarité sociale. Renzi, comme Hollande et Merkel sont les commis de la gauche mondialiste américanisée et des multinationales qui avancent dans leur travail d’uniformisation du tissu social. Il est temps de restaurer la souveraineté nationale et les frontières protectrices.
Vous habitez le Canton du Jura. Quels changements, liés à l’immigration, avez-vous noté au cours de ces vingt dernières années ?
La population a changé, le tissu social s’est « exotisé ». Vous avez l’impression d’être en vacances dans le Sud, sauf que c’est vous qui travaillez de plus en plus dur à aménager votre cadre de vie habituelle pour le bien-être des « Autres ». Vous ne savez plus à qui vous avez affaire. La méfiance, le repli communautaire, les sourires contraints, le lien social se transforme en « faux-self » comme disent les psychanalystes.
Comprendre l’erreur internationaliste,
avec Kontre Kulture