En attendant Godot (1952) est une célèbre pièce de théâtre du dramaturge irlandais – récipiendaire du prix Nobel de littérature en 1969 – Samuel Barclay Beckett qui a notamment acquis « notoriété et aisance financière » grâce au succès de cette pièce. Si cette œuvre visait à illustrer la misère et l’errance humaines dans un monde en quête de sens et d’événements, son petit côté cynique et désabusé, voire dandy, nous rapproche de la posture médiatique du néo-marxiste François Bégaudeau, en promotion pour son nouveau livre Notre joie...
Notre joie, c’est l’essai du « radical » Bégaudeau qui prétend démontrer que les « extrêmes ne se rejoignent pas en politique ».
Définissons les termes pour que ce soit clair pour tous : selon Bégaudeau, les « extrêmes » sont d’un côté son fantasme d’une extrême droite autoritaire et raciste (dans laquelle il amalgame notamment Éric Zemmour et Alain Soral, nous y reviendrons) et de l’autre son ambition égocentrée d’incarner la « véritable » extrême gauche, celle d’un néo-marxisme humaniste et féministe qui semble être une version mainstream et mondaine d’Étienne Chouard, voire de Francis Cousin.
Pour faire court et concret, le cinquantenaire Bégaudeau a passé une soirée à picoler et débattre avec trois « jeunes hommes d’extrême droite » à Lyon après l’une de ses conférences et il en a pondu un bouquin sur les « différences fondamentales qui ne peuvent en définitive que séparer ces deux orientations politiques »...
Passons sur la énième et perverse réactivation du clivage droite-gauche et entrons dans le vif du sujet : au travers de ces trois « identitaires de 25 ans » qu’il imagine « soraliens », Bégaudeau pense croiser le fer avec Alain Soral, dont l’ombre semble finalement planer sur le parcours et la réflexion du critique littéraire vendéen.
Soral c’est le Bégaudeau qui a réussi, le Bégaudeau qui a été au bout de ses idées, le Bégaudeau qui s’est émancipé du Système, le Bégaudeau courageux.
Comparez plutôt : à 26 ans déjà, Alain Soral démontrait magistralement les limites des mouvements de mode quand à 29 ans, François Bégaudeau baignait encore dans l’anarcho-marxisme de fac avec son groupe de punk rock nantais (rires) Zabriskie Point (un nom de poseurs libertaires et idéalistes qui fait référence aux Pink Floyd et à Michelangelo Antonioni...)
Alain Soral en 1984 pour sa première télé :
François Bégaudeau en 2000 (avec 25 ans de retard sur les Sex Pistols...) :
Bégaudeau, c’est un peu le Yann Moix de gauche : jaloux du talent des autres et plus précisément du succès des autres... Et encore plus précisément du succès avec les femmes ! La question du physique a son importance, ce n’est pas un matérialiste comme Bégaudeau qui le contredira. Voyez plutôt cette envolée sur Marlon Brando qui suinte la jalousie :
Pas besoin d’avoir fait hypokhâgne comme Bégaudeau pour comprendre qu’il fantasme sur le président d’E&R, qui est devenu au fil des années l’adversaire numéro 1 du Système :
Soral était engagé au Parti communiste français dans les années 90 quand le fils d’enseignants agrégé de lettres Bégaudeau votait Besancenot en 2002 ;
Soral le spécialiste de la drague a eu (et a encore) du succès avec les femmes quand Bégaudeau est un torturé de la relation homme-femme (comme le prouve son roman de 2011 La Blessure, la vraie dans lequel il conte l’histoire d’un puceau léniniste de 15 ans ; ouvrage qui donnera le film Mektoub, my love : canto uno d’Abdellatif Kechiche, autre frustré des femmes qui aurait aimé avoir accès au mouvement libertaire) ;
et surtout Soral ne se couche pas devant la patrouille qui le persécute alors que le « radical » Bégaudeau n’a jamais été attaqué par le Système qu’il prétend combattre ! Il a même été primé par ce Système : Palme d’or du Festival de Cannes 2008 et César 2009 de la meilleure adaptation cinématographique pour Entre les murs du gauchiste Laurent Cantet...
D’ailleurs Bégaudeau reconnaît son admiration, à demi-mot :
« Soral est un très bon orateur, un bon rhéteur, c’est un producteur de pensée. (...) Il a de beaux restes du marxisme. »
On le comprend en l’écoutant, pour Bégaudeau l’auteur de Comprendre l’Époque (que Bégaudeau serait bien inspiré de lire, lui qui débute la vidéo par une critique de « l’époque ») n’est pas un agent du Système comme Zemmour (bien qu’il fasse de trois « identitaires bourgeois » des « soraliens »... bêtise ou malhonnêteté ?) mais plutôt un marxiste qui se serait fourvoyé. Nous encourageons donc l’antifasciste Bégaudeau à relire Sur la question juive de Karl Marx ! Quant à sa critique de « l’essentialisme » et du « concret », un abonnement à Faits & Documents semble de rigueur...
Invité par un Frédéric Taddéi en préretraite sur RT France (au moins il n’a pas rejoint l’équipe de Cyril Hanouna pour continuer à exister, à la différence d’Éric Naulleau), le néomarxiste qui défend les « minorités » va tout de même jusqu’à affirmer que le « plan » d’Alain Soral serait « l’extermination » et la « solution finale » (à partir de la 35e minute). Une accusation digne de BHL...
Prétendant lutter contre le « confusionnisme », le militant Bégaudeau prouve surtout à travers cet entretien qu’il est resté un parolier, un beau parleur en quête de posture, un apprenti artiste qui refuse l’action politique en tentant par tous les moyens de calquer les aspirations du peuple sur les siennes.
On ne t’attendra pas, Bégaudeau !
L’entretien en intégralité :