L’enseignement est sans aucun doute, avec les médias de masse, un des meilleurs relais de l’idéologie dominante. Les programmes scolaires, drapés dans l’objectivité républicaine, permettent de distiller dans les esprits les plus jeunes des « acquis » clôturant par avance certains débats, imposant certaines vérités.
L’actuel ministre de l’Éducation Vincent Peillon s’est parfaitement illustré dans cet exercice, avec sa proposition de « cours de morale laïque » (devenu depuis morale « civique » pour rendre la ficelle moins grosse) [1], ou encore avec l’arrivée discrète d’une documentation à l’attention des enseignants visant à promouvoir la théorie du genre, sous sa forme la plus absolue, en vue d’une adoption générale dans les programmes [2].
La géopolitique et la question de la gouvernance mondiale sont elles aussi des sujets à travers lesquels la pensée unique s’impose, pas à pas, via les postulats établis et le vocabulaire employé. Dans les documents servant de ressources pour l’enseignement [3], la mondialisation économique et l’accroissement des interactions géopolitiques sont présentés par des réalités factuelles et statistiques qu’on ne saurait certes contester. Cependant, en ce qui concerne les causes, la mondialisation et toutes ses caractéristiques sont présentées comme un phénomène endogène, une voie historique inévitable. Assez logiquement, la question de la gouvernance mondiale est alors approchée comme une « nécessité » indiscutable, pour assurer des relais au marché et le réguler.
Les auteurs cités, qu’ils soient des défenseurs du libéralisme ou inspirés par la tradition « interventionniste » (Stiglitz, Krugman, ou le fondateur d’ATTAC Liêm Hoang-Ngoc, aujourd’hui député européen PSE, etc.) auront en commun de considérer l’État-nation comme enterré, au profit du « laisser faire » ou de structures de régulation d’échelles supranationales.
L’avenir de la gouvernance se trouverait donc dans les firmes internationales, garantes de l’optimisation des ressources, les ONG, garantes d’une démocratie participative, le G20, garant d’un pouvoir multilatéral, ou l’Europe, garante des intérêts occidentaux…
En bref, tous les débats existant autour de la légitimité de la gouvernance mondiale et de son caractère irrémédiable sont ainsi évincés de l’enseignement. Ainsi, toute défense de l’intérêt national bien compris est reléguée au niveau de passéisme ringard. On notera d’ailleurs que l’apprentissage de l’histoire de France s’est vu récemment considérablement élagué, tout comme celui de la langue française [4]. Ces phénomènes trouveront sans aucun doute une continuité dans la politique de Vincent Peillon, qui déclare par exemple souhaiter « alléger » les programmes du primaire [5].
L’enseignement contemporain présente le monde comme les tenants du pouvoir souhaitent qu’il soit vu. Sur ces bases, il est primordial de s’intéresser aux travaux exclus par l’école de la République. Après quelques lectures réellement alternatives, la très « démocratique » gouvernance mondiale qui nous avait été promise prend alors un tout autre visage.