Le premier discours de Donald Trump devant le Congrès était très attendu, à la fois par son camp et par ses adversaires. Mardi 28 février 2017, le président des États-Unis a su se hisser à la hauteur de l’événement en prononçant une allocution de véritable chef d’État, mettant de côté la politique politicienne pour proposer aux Américains un programme de reconstruction nationale. Sans oublier de rendre un hommage appuyé aux héros nationaux et à leurs familles.
Fidèle à ses engagements de campagne, Donald Trump ne s’est pas renié lors de son discours devant le Congrès. On l’attendait plus mesuré, visant la concorde et le rassemblement. Il le fut mais sans rien céder – ou si peu – à son style et au contenu de son programme.
Beaucoup applaudi, par les Républicains bien sûr, mais aussi à plusieurs reprises par les Démocrates, Donald Trump a pris ce soir une envergure nouvelle, presque inattendue par ses adversaires. Adoptant la posture irénique des hommes d’État à la hauteur de l’histoire en marche, il a appelé à l’union :
« Si nous sommes divisés dans nos engagements politiques, nous sommes un pays uni dans la condamnation de la haine et du mal sous toutes ses formes (...) Chaque génération d’Américains transmet la torche de la vérité, de la liberté et de la justice, dans une chaîne ininterrompue jusqu’à aujourd’hui. »
Désormais tout nouveau président en exercice, il a assuré à plusieurs reprises qu’un nouveau chapitre des États-Unis débutait, qu’un nouveau vent de fierté balayait désormais la Nation.
Conservant sans faiblir ses positions protectionnistes, il a rappelé que la classe moyenne s’est vue fondre comme neige au soleil tandis que les emplois et les salaires partaient dans les pays étrangers.
Mieux, il a dénoncé les politiques étrangères ruineuses :
« Nous avons financé et construit projets internationaux sur projets internationaux, mais nous avons ignoré le destin de nos enfants dans les banlieues de Chicago, Baltimore, Detroit, et tant d’autres endroits de notre pays. (...) Et nous avons dépensé des milliards de dollars au-delà des mers, alors que nos infrastructures tombaient en ruines. »
C’est ainsi qu’il analyse l’origine de ce tremblement de terre électoral que fut son élection :
« Alors, en 2016, la Terre trembla sous nos pieds. La rébellion commença par des manifestations tranquilles de familles de toutes couleurs et de tous courants de pensée, des familles qui voulaient juste qu’on les écoute avec intérêt. Mais alors les voix devinrent un chœur bruyant, des milliers de citoyens parlant d’une seule voix de toutes les villes du pays.
Enfin, le chœur est devenu un tremblement de terre, et les gens se sont unis par dizaines de millions, et ils se sont unis autour d’une simple mais cruciale revendication : que l’Amérique donne la priorité à ses citoyens, car seul cela pourra rendre l’Amérique grande à nouveau ! »
Il a rappelé alors que, depuis son élection, de grandes firmes telles que Ford, Fiat-Chrysler, General Motors, Sprint, Softbank, Lockheed, Intel, Walmart, et tant d’autres, ont annoncé qu’elles allaient investir plusieurs milliards de dollars aux États-Unis et créer des milliers de nouveaux emplois américains.
De même, il a rappelé son attachement au libéralisme des origines :
« Je crois fermement au libre marché mais il doit être aussi un marché équitable et juste ! »
Le président américain entend dès lors réduire la bureaucratie et « pour chaque nouvelle loi, deux anciennes lois devront être éliminées ».
La lutte contre l’immigration n’a pas été oubliée :
« Nous voulons que tous les Américains connaissent le succès, mais cela ne peut se passer dans un environnement chaotique et sans lois. Nous devons restaurer notre intégrité et la loi à nos frontières »
Il a rappelé une des promesses phares de sa campagne, la construction du mur à la bordure mexicaine, et a été très largement applaudi pour cela.
La lutte contre Daech reste sa priorité :
« [...] ce réseau de sauvages qui ont massacré des musulmans et des chrétiens, des hommes, des femmes et des enfants de toutes croyances. Nous travaillerons avec nos alliés, incluant nos amis et alliés du monde musulman, pour éradiquer cet ennemi maléfique de notre planète. »
Ce sera le seul passage belliciste d’un président qui rompt avec la politique va-t-en guerre de ses prédécesseurs, fussent-il décorés d’un prix Nobel de la paix.
Rappelant ensuite le bilan désastreux de Barack Obama, sans le nommer, Trump a évoqué les 43 millions de gens vivant dans la pauvreté dépendant de bons alimentaires, les 20% de jeunes ne travaillant pas, les 60.000 usines parties en Chine depuis 2001, les 800 milliards de dollars perdus dans les échanges commerciaux.
Comme il l’avait fait à plusieurs reprises pendant sa campagne électorale, Donald Trump a rappelé que la guerre à travers le monde a coûté pas moins de 6000 milliards de dollars qui ne seront jamais investis dans les infrastructures américaines. C’est exactement le contraire de la politique qu’il va demander au Congrès d’approuver :
L’Obamacare, un de ses combats de campagne, sera abrogé et remplacé par une assurance moins chère et offrant un choix plus grand de prestataires pour les assurés. Il décrit alors en cinq points sa nouvelle politique de protection de santé.
La violence a été abordée longuement, Donald Trump voulant briser :
« [...] le cycle de la pauvreté qui demande de briser aussi le cycle de la violence [...] À Chicago, plus de 4.000 personnes sont mortes l’année dernière, et la criminalité n’a jamais été aussi élevée. Ce n’est pas acceptable dans notre société. »
C’est alors que Donald Trump a mis à l’honneur plusieurs citoyens américains, dont Jamiel, un homme noir d’âge mûr, « devenu un grand ami », qui a perdu son fils de 17 ans dans ce cycle de violence, tué par le membre d’un gang d’immigrés clandestins, tout juste sorti de prison.
Puis est venu un moment de grâce particulièrement émouvant, avec la citation de William « Ryan » Owens, un soldat américain mort au combat, dont la veuve fut saluée par Donald Trump puis par le Congrès, solennellement debout et applaudissant de longues minutes sans interruption :
Ce moment a marqué tous les Américains. Les commentateurs médiatiques, même les plus virulents comme Van Jones de CNN, ont dû convenir que ce fut un moment mémorable et, peut-être, un tournant dans la présidence encore naissante de Donald Trump :
Survolant un auditoire désormais conquis ou tout au moins rasséréné, Donald Trump a achevé son discours sur des thèmes fondamentaux, et l’on sait quel rôle délétère les États-Unis ont pu jouer en la matière ces dernières décennies : le respect de la souveraineté des pays et la paix dans le monde. Rompant avec une politique interventionniste et belliciste, il a déclaré :
« Nous respecterons les institutions historiques, mais nous respecterons aussi les droits souverains des nations. Les nations libres sont le meilleur vecteur d’expression de la volonté des peuples. Et l’Amérique respecte le droit des nations a disposer d’elles-mêmes. »
C’est alors qu’est advenue une citation historique qui ne restera pas, nous l’espérons, lettre morte :
« Mon travail n’est pas de représenter le Monde. Mon travail est de représenter les États-Unis d’Amérique. »
Le discours complet doublé en français (version originale ici) :