Dieudonné Mbala Mbala est un humoriste bien connu en France, le pays où il est né. Hier adulé, il fait face désormais à l’hostilité de nombre de ses concitoyens outrés par le ton de ses dernières productions. Ce sont les autorités politiques qui manifestent le plus grand acharnement. Elles jugent ses sketches antisémites et intolérants. Ce qui a le don de braquer davantage le comédien. En réponse aux paroles et actes de l’ancien Premier ministre français Manuel Valls qui n’a cessé de s’en prendre à lui, il a annoncé courant décembre 2016 sa participation à l’élection présidentielle du Cameroun.
Une façon pour lui – expliquera-t-il – de contrer M. Valls qui venait de se porter candidat à la candidature à la présidentielle de France… Cet acte amène à s’intéresser à la relation particulière que le comédien entretient avec le Cameroun, pays de son père. L’artiste s’y est enraciné. Il s’y rend souvent, communie avec la famille de son père. Preuve de son attachement à cette terre, il envisage d’y finir ses jours et de s’y faire enterrer.
La nouvelle a fait le buzz sur la toile fin décembre 2016. Dieudonné Mbala Mbala, humoriste français d’origine camerounaise annonçait sur Internet son intention de retourner au Cameroun, pays de son père. Il disait qu’il y irait pour … participer à l’élection présidentielle prévue l’an prochain. Il tenait à faire savoir qu’il ne se présente pas contre Paul Biya, le président actuel qui est soupçonné de vouloir se représenter.
« D’emblée je précise que je ne me présente pas contre l’actuel Président ou son opposition, mais bel et bien contre la politique française en Afrique. Ce statut de candidat à l’élection présidentielle camerounaise va me permettre d’interpeller mes homologues français sur l’absolue nécessité de faire évoluer les relations entre l’État français et le continent africain », clamait alors le comique dans une vidéo diffusée sur sa chaîne youtube.
À l’entendre, sa candidature avait été suscitée par celle de Manuel Valls, l’ex-ministre français de l’Intérieur, qui ne lui a pas souvent fait de cadeaux. L’annonce du franco-camerounais a cependant laissé sceptiques certains. Ceux-là se sont en effet demandé si l’humoriste ne plaisante pas simplement. S’il faut considérer qu’il s’agissait d’une blague, ce n’était donc pas la première que Dieudonné Mbala Mbala en faisait.
Bientôt installé au Cameroun ?
Fin décembre 2015, le site internet de l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique révélait que Dieudonné projetait de quitter la France au terme d’une tournée de deux ans. « Mon spectacle “En paix” sera mon dernier spectacle, explique Dieudonné. Je me suis laissé jusqu’à fin 2017, je partirai ensuite en Afrique sur la terre de mes ancêtres. C’est là-bas que je compte terminer mon existence. »
L’on apprenait à l’occasion que Dieudonné avait quelques mois plus tôt, dans une vidéo, « fait part de son intention de s’installer au Cameroun, dont est originaire son père, natif du village de Olama (Centre) ». L’article de Jeune Afrique mentionnait aussi que l’humoriste appelait les internautes souhaitant quitter la France à le contacter pour venir s’installer et travailler dans la région de Kribi où un port en eau profonde devant désengorger celui de la capitale économique Douala était en train d’être aménagé.
« Vous avez des compétences, vous êtes électricien, charpentier, infirmier… Il y aura besoin de tout puisqu’on part de la brousse, on est dans la jungle équatoriale… et demain ça sera une ville », déclarait-il dans des propos repris par jeuneafrique.com. Ce n’est pour autant pas à cause du futur eldorado « kribien » que Dieudonné s’intéresse au Cameroun.
La relation du métis avec le pays de son père est bien vieille. Il se rend régulièrement au Cameroun depuis qu’il est tout jeune. Il y est allé enterrer son père voilà quelques années. Il dit que ça lui fait du bien de venir se recueillir sur sa tombe et se ressourcer. C’est au contact de sa famille paternelle qu’il découvre l’humour. Dieudonné a alors 14 ans et séjourne comme d’habitude au Cameroun.
Chez lui comme un inconnu…
« C’est au cœur de la forêt que j’ai éprouvé le flash. Avec l’un de mes oncles, Okepi, de culture ewondo. C’était une espèce de sage, marginal et super-cool qui aimait faire rire les enfants, surtout quand il avait forcé sur le vin de palme. Il vivait dans un autre rythme, en osmose avec la nature. Il parlait à peine français mais entre nous ça ne passait pas par des mots« , se souvient Mbala Mbala.
Reste qu’il n’est pas aussi connu des Camerounais que les Manu Dibango, Yannick Noah, ces autres fils de la diaspora. Explication d’un journaliste camerounais : « C’est un personnage un peu lointain pour nous. Les thèmes qu’il aborde ne touchent aucun intellectuel ici. Aucun lien intime n’existe entre lui et le public. À Douala, vous ne trouverez aucune vidéo de lui. (…) Que voulez-vous, ce n’est pas une vedette de la chanson ! De plus, il ne vit pas sur place et quand il vient dans le pays, ses séjours ne sont pas médiatisés. » Cependant, face aux déboires qu’il connaît en France, Dieudonné reçoit un peu de soutien au Cameroun de la part de certains Camerounais.
L’éditorialiste de renom Haman Mana salue le grand intérêt qu’il accorde au pays de Dieudonné MBala, son géniteur. « D’ici, nous voyons bien qu’il tient à ses racines camerounaises : l’entreprise qu’il a créée et dont on dit qu’elle a servi à envoyer ses sous au Cameroun est bien nommée Ewondo Corp… », constate-t-il avant de prendre littéralement sa défense devant les accusations d’évasion de capitaux vers le Cameroun. Le directeur de publication du quotidien Le Jour présente Dieudonné Mbala Mbala comme un « Robin des bois qui prend l’argent des riches pour venir le planquer chez les pauvres ». Rien de moins. Pour lui ce n’est qu’« une histoire de Blancs qui en veulent à notre frère ».
« Je viendrai me faire enterrer au Cameroun »
L’histoire à laquelle notre confrère fait allusion a fait la une de la presse française en 2013. Une enquête du parquet de Chartres conclut que Dieudonné qui doit 887 135 euros au Trésor public a organisé son insolvabilité en envoyant plus de 400 000 Euros au Cameroun dès 2009. La justice française croit savoir que l’entreprise Ewondo Corp Sarl qui a son siège à Yaoundé, la capitale du Cameroun fait partie de celles qui ont été créées pour planquer l’argent qu’il n’aurait selon elle pas voulu déclarer.
Dieudonné, lui, parle d’une aide qu’il a apportée à sa famille. « J’ai aidé la famille à lancer quelque chose mais je préfère que ce soit eux qui en parlent. Et puis, c’est une activité dans laquelle je n’interviens pas et il faut donc qu’elle se déroule en dehors de ma propre aura pour éviter qu’ils aient à subir les mêmes choses que moi », expliquait-il à une consœur camerounaise.
Dans sa posture de combattant, l’homme de 51 ans estime qu’il fait peur en France, un pays qu’il aime autant que le Cameroun, où il promet de revenir passer ses derniers moments.
« Je sais qu’il y a des Français qui se reconnaissent beaucoup en moi, dans ma combativité et c’est quelque chose qui transcende toutes les frontières, toutes les ethnies, toutes les religions. Je suis attaché à la France évidemment mais je viendrai me faire enterrer au Cameroun parce que c’est la terre de mes ancêtres. Je pense que l’Africain fait peur. Je suis camerounais parce que c’est là où je finirai mes jours. »