Jean-Marc Morandini invitait dans Morandini Live du 25 juin 2020 sur CNews Albert Batihe, expert en communication et patron de Headsup, et Nadir Kahia, président de l’association « Banlieue Plus et nos quartiers », pour débattre autour du déboulonnage des statues.
Incroyable, du jamais vu à la télé : un débat sans sioniste, sans commissaire politique sioniste (Albert Batihe est néanmoins chroniqueur sur Balance ton post !) !
Mais bon, c’est Morandini, ça limite l’audace. Nos lecteurs remarqueront que l’animateur maintes fois pris la main dans le sac à trucages appelle l’un de ses invités par son prénom, « Nadir » ! Pour lui, l’Arabe doit être appelé par son prénom, comme au bon vieux temps du rock and roll algérien, ou comme sur les chantiers.
L’animateur ne le fait pas exprès mais cette familiarité, alors qu’il est censé arbitrer un débat autour des figures de l’Histoire de France qui symbolisent – ou pas – une forme de racisme, montre l’envergure intellectuelle du personnage.
Mais ne boudons pas notre plaisir, la liberté d’expression surgit là où on ne l’attend pas, de nos jours.
Morandini : « Ces statues, c’est pas notre histoire ? »
Kahia : « C’est l’histoire de France mais c’est l’histoire de France dans sa tragédie, dans sa violence la plus extrême. Donc je pense qu’il est important de le dire, de le véhiculer. »
Batihe : « C’est quoi la genèse ? C’est ça que je comprends pas, c’est quoi la genèse ? Un matin vous vous levez, vous vous dites “tiens”, en plus vous habitez en banlieue, vous vous dites “tiens, je passe devant la statue, je vais la déboulonner”, c’est quoi ? Parce qu’en plus je suis communicant, je me suis dit le mec il a les boules, il veut déboulonner. Je me suis dit ça au moins c’est marrant, ça j’aurais suivi. Mais c’est pas drôle. »
Kahia : « Je comprends votre question, ne souriez pas. Vous ne pouvez pas comprendre la genèse, et l’issue, et ce serait bien de m’entendre un petit peu. [...] Moi la genèse de tout ça, il y a un passif entre la France et certains Français, notamment ceux qui sont issus de l’immigration et de cet héritage de violence que la France a, a, a effectuée à une époque, donc je pense qu’aujourd’hui, je suis un peu comme Macron comme il le disait, “j’ai pas vécu certaines scènes tragiques de cette histoire mais j’aimerais qu’on tourne la page” et pour tourner la page je pense qu’il faut se dire les choses franchement et de façon apaisée. »
Plus tard, les choses s’envenimant mais se précisant aussi, le communicant reprend...
Batihe : « Ça fait du tort à mon business. »
Morandini : « Pourquoi ça fait du tort au business ? »
Batihe : « Mais parce que à un moment donné les médias, vous savez quoi ?, le problème avec les médias, les médias aujourd’hui, c’est qu’ils invitent que des Noirs qui vont se plaindre, qui vont pleurer, mais c’est pas ça. En coulisses on fait un énorme travail, on se bat... Donc taux de pénétration, quand on regarde les chiffres, mais ça l’intéresse pas, et c’est ça le problème ! »
Morandini : « Mais donnez-le, c’est quoi le taux de pénétration ? »
Là on sent que Morandini est intéressé. Mais Batihe va expliquer quelque chose d’essentiel...
Batihe : « Il est très faible ! C’est-à-dire que sur le type européen, en fait on a posé la question sur ce sujet, ils en ont rien à foutre. Sur le type maghrébin, c’est pire. »
Morandini : « Parce que vous faites des études en fonction de... »
Batihe : « Oui et on n’a pas trop le droit, en France vous le savez, mais voilà, entre collègues, on se pose des questions, je vais pas aller beaucoup plus loin, mais grosso modo, et sur le type africain, ils en ont rien à foutre ! Limite ils nous envoient chier ! »
Voilà qui est rassurant pour la nation française, et nous ne sommes pas ironiques !
Batihe marque donc un point en assénant que la plupart des Français, qu’ils soient noirs ou arabes, se fichent de cette histoire de statues. Où l’on comprend à travers cette statistique ethnique – eh oui, il en faut, ne soyons pas hypocrites – que l’opération « Traoré » est construite de toutes pièces par des ingénieurs sociaux qui ne sont pas forcément noirs ou arabes, ou habitants des quartiers. La fracturation de la France n’est pas à l’ordre du jour chez les minorités de couleur qui, comme les Français de souche, luttent aujourd’hui plutôt pour leur boulot et leur niveau de vie que pour le jugement rétroactif des grandes figures de l’Histoire.
Le débat entier est ici :
Pour ne pas rester sur une impression caricaturale, nous allons apporter un peu plus d’informations sur le président de l’association de banlieue (encore une). De ce point de vue, Batihe a raison en creux : la banlieue a plus besoin d’entreprises que d’associations, qui sont souvent des métastases de SOS racisme, plus besoin d’entrepreneurs que de pleurnichards, qui souvent vivent de la subvention publique (ou privée, voir les voyages de Rokhaya Diallo chez l’Oncle Ben’s, pardon, l’Oncle Sam).
Nadir Kahia était l’invité de la chaîne russe en français RT le 23 mars 2019 :
Chez Bercoff, sur Sud Radio le 5 septembre 2019, il revient sur les clichés qui collent à la peau des quartiers populaires :
« "Il faut parler de la banlieue avec les gens qui vivent en banlieue" juge Nadir Kahia, qui déplore une "mise à l’écart" de ces habitants, souvent "renvoyés à leurs origines". Si certains font des quartiers populaires un portrait noir et d’autres roses, le président de Banlieue Plus reconnaît une réalité "avec ses défauts et ses points positifs".
"La banlieue c’est la France, ce sont des millions de femmes et d’hommes qui y vivent". Si d’après lui, le mot banlieue signifie "mise à l’écart", Nadir Kahia rappelle que "paradoxalement, nous sommes bien en France" et espère sortir du "dialogue de sourd" pour enfin redonner la parole aux vrais acteurs des quartiers populaires.
"Ce qui est compliqué, c’est que ça fait des années qu’on n’a pas réellement la parole", constate Nadir Kahia, arguant que des émissions de 30 minutes ne suffisent pas à véritablement dépeindre la réalité de la vie dans les quartiers. "Cela explique la situation dans laquelle on est aujourd’hui, continue-t-il, il y a un manque de courage politique pour évoquer les vrais sujets : les violences, la délinquance, la drogue, la radicalisation". Mais Nadir Kahia le répète : « la réalité ce n’est pas que ça ».
Pour lui, les responsabilités sont partagées. "Je suis critique des politiques, de la police mais également des habitants des quartiers populaires". Nadir Kahia espère que les citoyens "auront la capacité de trouver une solution". Pas une solution frontale, mais "un accompagnement par les médias ou les politiques", notamment sur les activités proposées dans ces quartiers "qui regorgent de talents à tous les niveaux et dans tous les domaines". »
On attend de voir !