Egalité et Réconciliation
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De Belgrade à Tripoli, les ravages du droit d’ingérence

par Maurice Livernaut

Un certain nombre d’Etats de par le monde affrontent, de manière sporadique ou permanente, des séditions locales, ethniques ou religieuses, ou les deux à la fois, tendant au séparatisme, et qu’ils s’efforcent de contenir, d’affaiblir, voire de résorber.

Pendant longtemps ces conflits furent généralement considérés par les instances internationales comme relevant exclusivement de la responsabilité des nations au sein desquelles ils se manifestaient.

Ainsi, lorsque le problème de l’insurrection algérienne était évoqué à l’ONU par un membre qui mettait la France en cause, son délégué rétorquait invariablement qu’il s’agissait d’une question interne à son pays, et la polémique était close. Mais les temps ont changé. Le droit d’ingérence, conçu et inauguré par un histrion français, infatué de sa misérable personne, est devenu un dogme.

De nos jours, plusieurs Etats ont le droit, soit au regard de leur appartenance à l’empire nord-américain, soit de leur propre puissance, de lutter comme bon leur semble contre les émeutes et actes de violence qui se produisent sur leur territoire. C’est le cas par exemple du Royaume-Uni et de l’Espagne à l’intérieur de l’Union Européenne, mais aussi, au-delà, de la Fédération de Russie et de la Chine.

Mais lorsque la Serbie, en 1997, dut faire face à une nouvelle résurgence du séparatisme albanais dans sa province du Kosovo, armée et donc plus dangereuse que les précédentes, le droit à la combattre non seulement lui fut refusé, mais ses protagonistes furent aussitôt adoubés par l’ensemble de l’Occident qui, sans ordre de mission de l’ONU, s’empressa de l’agresser militairement, uniquement par la voie des airs, pendant 78 jours, puis d’en occuper la province, sans limitation dans le temps, comme nous le constatons. En somme, une agression historiquement comparable à celles perpétrées par l’Allemagne en 1938 et 1939.

Officiellement, il s’agissait d’empêcher que la Serbie se livrât à un génocide supposé sur sa minorité albanaise, explication qui fut très largement admise et relayée, les Serbes ayant été préalablement démonisés par les versions déformées de leurs luttes d’auto-défense en Croatie et en Bosnie-Herzégovine, de 1991 à 1995, lors du dépècement de la Yougoslavie. Pourtant, c’est bien l’inverse de ce qui était annoncé qui se produit depuis 12 ans, alors que les initiateurs de la subversion, angélisés par les médias occidentaux et, qui eurent l’honneur d’être chastement étreints par Hubert Védrine, révèlent aujourd’hui leur véritable nature.

Le pli était pris. L’OTAN, sur la base de falsifications éhontées, envahit successivement l’Afghanistan et l’Irak, où elle s’enlise et se déconsidère, se bornant à soutenir certains islamistes contre d’autres, choix erratiques dont pâtissent essentiellement les populations civiles. C’est maintenant le tour de la Lybie. Un mouvement insurrectionnel para-militaire surgi à l’est du pays – dont il n’est pas question ici d’évoquer la légitimité et les buts – a eu la chance de mettre en transes un guignol télévisuel mondain et coutumier du fait. Cela ne serait qu’anecdotique s’il ne s’était précipité pour aller transmettre sa nouvelle fièvre à un autre compère en rodomontades, qui n’a alors eu de cesse de recevoir les aventuriers censés diriger la révolte (dont on peut s’interroger sur les facilités de déplacement) et de leur promettre son appui.

Malheureusement, il se trouve qu’il s’agit de celui que l’on peine de plus en plus à identifier comme le président de la République Française. Voilà où nous en sommes. Est-il possible de tomber encore plus bas ?