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Darmanin : ministre de l’Intérieur ou de l’Extérieur ?

Le ministre de l’Intérieur, le très ambitieux Gérald Darmanin, au milieu des hauts représentants de la communauté juive – le Consistoire, le CRIF et le Fonds social juif –, a tenu le 17 octobre 2023 à 20 heures dans la ville de Créteil un discours, ou plutôt lu un texte, sur l’antisémitisme en France.

 

Entouré de six représentants des principales associations juives, le ministre a délivré un discours de 12 minutes dans lequel il assure que la République, c’est-à-dire l’ensemble des Français, va protéger la minorité juive en France, suite à l’invasion du Hamas du 7 octobre 2023 dans les colonies juives, illégales au regard des lois internationales.

Le discours, où le ministre du Culte semble ravalé au rang de porte-parole, apprend aux représentants des juifs de France qu’ils verront leurs lieux de culte – mais pas ceux des chrétiens et des musulmans – protégés par la force publique, soit 10 000 soldats et policiers.

Le 17 octobre est habituellement une date commémorative des victimes algériennes – majoritairement musulmanes – de la manifestation interdite du 17 octobre 1961 à Paris, qui a été réprimée sévèrement par les CRS de l’époque, et qui a donné lieu à une polémique sur le nombre de victimes.

Curieusement, le ministre n’a pas eu un mot pour elles, alors qu’un représentant du culte musulman était dans la salle [Chalghoumi ? NDLR]. Ce rappel historique a peut-être été omis par les auteurs de ce discours, qui a évidemment été applaudi par l’assistance, acquise à la cause israélienne.

Ceux qui se souviennent du Manuel Valls de 2014 retrouveront les mêmes accents, ceux d’un ambitieux qui voulait être président à la place du Président. Valls tombera de haut pendant les années de sang (2015-2016), qui l’empêcheront d’accéder à la fonction suprême, qu’on lui avait peut-être promise...

***

La transcription du discours

Monsieur le président du Consistoire, monsieur le grand rabbin, monsieur le président du CRIF, monsieur le président du Fonds social, mesdames et messieurs, messieurs les présidents, monsieur le président du Consistoire de Paris, mesdames et messieurs,

J’aurais évidemment aimé venir dans une période moins dramatique, moins dramatique pour Israël, moins dramatique pour la France, moins dramatique pour tous nos compatriotes.

Mais je veux évidemment dire au nom du président de la République, au nom du gouvernement et de la Première ministre, d’abord notre grande pensée, notre grande émotion, parfois aussi notre colère devant les drames ignobles qui ont eu lieu en Israël suite à l’attaque islamiste et terroriste du Hamas, devant aussi l’assassinat odieux de ce professeur à Arras, et comme vous l’avez dit tout à l’heure, pour nos amis belges et nos amis suédois qui ont eux aussi hier payé le prix du terrorisme islamiste.

Je le dis dans le département de madame Knoll et de Sarah Halimi, je le dis au moment où la police et la gendarmerie française et les militaires de l’opération sentinelle gardent 596 lieux de la communauté juive en France.

Je le dis au moment où le ministre de l’Intérieur constate aujourd’hui à 20 heures depuis le 7 octobre, depuis les attentats terroristes du Hamas, 3 176 signalements à la plateforme de police judiciaire Pharos, signalements d’apologie du terrorisme ou d’actes antisémites numériques, pour 281 transmissions à la justice, mais aussi devant 327 actes antisémites, si j’ose dire physiques, devant des synagogues, devant des écoles juives, devant des lieux communautaires, mais grâce à la police et à la gendarmerie, grâce à la vigilance de toute la communauté, c’est 183 interpellations qui ont eu lieu en quelques jours dont 55 personnes d’origine étrangère, dont j’ai demandé à la suite des instructions du président de la République, que systématiquement leur titre de séjour leur soit retiré, qu’ils soient placés en centre de rétention administratif comme c’est le cas de 12 d’entre eux.

[Applaudissements]

Parce qu’il ne peut pas y avoir de vie en France, il ne peut pas y avoir de vie dans les valeurs de la République lorsqu’on a l’antisémitisme dans la tête et lorsqu’on a l’antisémitisme dans les actes, oui je veux le dire ici à tous les Français de confession juive, les temps sont très difficiles, je n’ignore pas ni la colère ni la tristesse ni la peur, mais la République vous rend en ce moment ce que vous lui rendez tous les samedis, une prière pour la protéger, et c’est aujourd’hui à la République de vous protéger, donc je dis aux juifs de France, au nom du gouvernement de la République, n’ayez pas peur !

[Applaudissements]

N’ayez pas peur parce que la police, la gendarmerie, les militaires, les préfets, sont là pour protéger contre tout acte antisémite. N’ayez pas peur parce que nous saurons dénoncer que l’antisionisme aujourd’hui, incontestablement, est une forme d’antisémitisme.

[Applaudissements]

N’ayons pas peur parce que nous savons que lorsqu’on s’en prend aux juifs en France on s’en prend à la République, on s’en prend à ceux à qui nous devons protection, et on s’en prend bien évidemment à l’idée que nous nous faisons d’un pays à la liberté de culte, à la liberté de croire, à la liberté de s’exprimer, à la liberté de porter un vêtement religieux dans la voie publique qui doit évidemment être connue pour toutes et tous, je sais qu’il y a des endroits encore plus difficiles qu’ailleurs et c’est pour ça que ce soir je suis en banlieue parisienne, parce qu’il y a des maires, monsieur le maire, parce qu’il y a des représentants des institutions, messieurs les présidents, qui savent faire vivre les communautés partout sur le territoire national et personne ne touchera un cheveu d’un juif de France sans attendre la réponse foudroyante de l’État.

[Applaudissements]

Mesdames, messieurs, le djihadisme islamiste, et il ne faut les confondre en aucun cas avec l’immense majorité de nos compatriotes musulmans qui sans doute ont des haut-le-cœur de voir que l’on commet des choses en leur nom, et je voudrais saluer ici le représentant des cultes, je voudrais aussi représenter, saluer les représentations diplomatiques en effet du Maroc et des Émirats arabes unis de leur soutien ici.

[Applaudissements]

Mais le djihadisme islamiste n’est pas intermittent, la menace elle est dans toutes les sociétés occidentales, et elle touche la France depuis très longtemps, et en plus d’être une attaque terroriste, le Hamas est une organisation islamiste, et il ne faut pas se dire que les choses qui se passent en Israël ne concernent que le Proche-Orient, elles concernent toutes les sociétés occidentales et elles concernent évidemment ceux qui devrons être combattus avec la plus grande des énergies, les islamistes radicaux qui dévoient leur religion et qui tuent, qui massacrent et ils le font au Bataclan comme ils le font en Israël.

Je veux aussi dire que les indignations ne peuvent pas être sélectives et on peut pas choisir ses victimes, on peut pas choisir cette tragédie, on ne peut pas faire comme si des bébés décapités, des femmes enceintes éventrées, des jeunes fauchés en pleine vie, valent d’autres crimes : c’est une barbarie terroriste, et mettre le nom de résistance en face d’une barbarie terroriste, souiller le nom des Justes, souiller le nom de Jean Moulin, de Joseph Kessel, des gaullistes, des communistes, de tous ceux qui ont eux été résistants, c’est non seulement ignominieux, mais c’est condamnable politiquement, moralement, et je l’espère judiciairement.

[Applaudissements]

La République s’arme, par ses policiers et par ses gendarmes, elle s’arme par une justice, et je remercie monsieur le garde des Sceaux qui à la suite des instructions données par le président de la République en ce qui me concernait a pris immédiatement une instruction de circulaire pénale pour demander que tout fait d’antisémitisme puisse avoir une réponse pénale la plus forte, et nous voyons déjà tomber ces décisions. Songez, mesdames, messieurs, qu’il y a déjà des personnes condamnées et détenues en prison pour des faits d’antisémitisme constatés par la police nationale depuis le 7 octobre. Elle s’arme pénalement, elle s’arme pour les policiers, les gendarmes, et elles s’arment mentalement. Le président de la République très courageusement a souhaité une loi avec laquelle nous avons beaucoup discuté avec les représentants des cultes, tous les cultes, qu’on appelle classiquement la loi séparatisme, qui lutte contre l’islamisme radical, qui lutte contre les dérives sectaires de certains groupes qui utilisent la faiblesse, qui utilisent la manipulation, qui utilisent le complotisme, qui utilisent ce virus terrible qu’est la haine de l’autre pour pouvoir créer ce que d’autres appellent le djihadisme d’atmosphère et les passages à l’acte dans le monde numérique, dans le monde physique, et nous devons les combattre.

Et depuis cette loi séparatisme voulue par le président de la République, c’est 1 100 établissements islamistes radicaux, des associations, des maisons d’édition, des lieux de culte, je mets des guillemets, des sites Internet, des commerces, ceux de la médecine prophétique qui ont été fermés. C’est plus de 922 islamistes radicaux qui ont été expulsés du territoire national et c’est, je veux le dire ici, avec un énorme merci pour leur travail de l’ombre, au mépris parfois de leur propre vie, des agents des services secrets français, à l’extérieur de notre pays comme à l’intérieur de notre pays, notamment je pensais à la DGSI, qui déjoue un attentat tous les deux mois en France, et souvent, malheureusement, les juifs sont la première cible de ces terroristes.

[Applaudissements]

Alors nous armons la France pour nous protéger contre l’islamisme radical, les paroles du président de la République ont été fortes dans le concert des nations pour condamner l’attaque terroriste du Hamas. Nous protégeons quotidiennement jour et nuit et on le fera mesdames et messieurs autant de temps qu’il le faudra, les lieux pour que les juifs de France puissent vivre dans le plus beau pays du monde, pour protéger la première communauté d’Europe, pour protéger la troisième communauté du monde, mais cette crise, mesdames, messieurs, elle a permis aussi d’abattre un certain nombre d’hypocrites, elle a permis de révéler quel était le projet politique d’un certain nombre de responsables qui parle à des millions de personnes et dont la voix porte. La haine du Juif et la haine du flic se rejoignent...

[Applaudissements]

...pas par conviction, pas par conviction, mais par calcul électoral. Le cynisme pousse à penser qu’en portant des messages aussi décalés, aussi incompréhensibles, aussi ignominieux, on arrivera à récupérer quelques pourcentages de plus dans des endroits où on pense que certains Français sont pris à souhaiter la haine de l’autre, la haine d’Israël, la haine des juifs, tout ça pour quelques voix de plus.

Alors, mesdames, messieurs, si jamais cela peut être salutaire, si en des choses aussi ignobles et dramatiques quelque chose peut être salutaire, si je forme trois vœux : le fait que les juifs de France n’aient jamais à craindre de leur sécurité en France, et quand il y a des crises que l’État français soit là et qu’il le voit ; le deuxième vœu, c’est le fait que nous pourrions tous considérer, que s’en prendre à la sécurité d’Israël, c’est s’en prendre de la sécurité de tous les juifs dans le monde, et d’arrêter de distinguer l’antisionisme de l’antisémitisme qui sont des discussions désormais de salon ; et enfin de pouvoir montrer que ceux qui n’ont pas été là au moment où il fallait utiliser des mots justes, où il fallait pas faire la confusion des esprits, quel cerveau peut confondre terrorisme et résistance sans souvenir et se dire que ce jour-là, alors la République aura besoin de défense, quand on défend les juifs, on défend toute la République, quand on met des mots sur les choses, on défend tous les juifs et surtout on respecte les morts, merci à vous.

[Applaudissements]

 

Sauver l’honneur, comme en 40

 






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