La directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, s’est présentée jeudi à Paris devant la Cour de justice de la République pour une audition cruciale sur son rôle dans un arbitrage litigieux, qui pourrait lui valoir une mise en examen (inculpation).
Souriante, l’ex-ministre française de l’Économie, 57 ans, est arrivée en voiture, entrant dans l’immeuble devant une trentaine de journalistes qui l’attendaient derrière des barrières.
L’arbitrage de 2008 pour lequel elle a été convoquée avait permis à l’homme d’affaires Bernard Tapie d’empocher 400 millions d’euros lors du règlement d’un différend entre ce dernier et une banque publique française.
Une inculpation fragiliserait considérablement la position de celle qui a succédé en juillet 2011 à la tête du FMI à son compatriote Dominique Strauss-Kahn, contraint à la démission après une accusation de viol à New York.
Christine Lagarde ne serait toutefois pas légalement tenue de démissionner de son poste. Elle est convoquée par la justice en tant qu’ex-ministre française et non en qualité de patronne du FMI.
Les conséquences politiques d’une éventuelle mise en examen dépendront du degré de bienveillance des principaux États membres du Fonds, notamment des États-Unis, premier actionnaire.
Ministre de l’Économie de 2007 à 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, Christine Lagarde est la cible d’une enquête pour « complicité de faux et de détournement de fonds publics », visant son choix de recourir à cette époque à un arbitrage privé pour solder un vieux contentieux entre l’ex-banque publique Crédit lyonnais et Bernard Tapie sur le rachat d’Adidas.
Lors de son audition, qui pourrait durer deux jours, elle doit expliquer ses choix à la Cour de justice de la République (CJR), juridiction compétente pour juger les infractions commises par les ministres dans l’exercice de leurs fonctions.
En septembre 2008, Christine Lagarde s’était déjà longuement expliquée sur le recours à un tribunal arbitral qui a condamné le Consortium de réalisation (CDR), structure publique gérant le passif du Crédit lyonnais après sa quasi-faillite des années 1990, à verser à M. Tapie 285 millions d’euros d’indemnités (400 millions avec les intérêts).
L’ancienne ministre a toujours justifié l’arbitrage par la volonté de mettre fin à une procédure, selon elle longue et coûteuse. Elle avait démenti avoir agi sur ordre de Nicolas Sarkozy, qui aurait voulu ainsi obtenir le soutien de Bernard Tapie, ex-ministre de gauche dans les années 1990 et ex-président du club de football de Marseille (sud), champion d’Europe en 1993.