Quand nous avions écrit voilà quelques années, sur la base des transcriptions de Wikileaks, que le gouvernement grec avait compris « qu’il y avait eu une tentative symptomatique de la part du FMI de faire chanter Athènes, la menaçant d’un possible blocage total du crédit pour l’obliger à céder sur la baisse des retraites que le gouvernement grec refusait d’approuver », l’article avait immédiatement fait le tour du monde. Même s’il n’est toujours pas prouvé que le FMI a bien proféré ces menaces implicites, la chose surprenante est de voir qu’autant de gens s’étonnent que le FMI puisse s’abaisser à ce point, même en considérant ses propres « standards », et puisse utiliser un pays de 11 millions d’habitants comme objet de recherches sur lequel il peut mener ses expériences politiques. Pourquoi autant d’étonnement ?
Voici la transcription d’une interview donnée en 2012 par Christine Lagarde à la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie, où l’on entend la présidente du FMI admettre que le Fonds monétaire international prospère dans les périodes où le monde « va mal » et que pour considérer l’action du FMI comme soutenable, l’institution « se devait d’être très proche de sa clientèle de base ».
Elle a ajouté que « lorsque le monde va bien et qu’il y a des années de croissance » comme cela est advenu en 2006 – 2007, ces années-là sont dures pour le FMI, « financièrement, mais pas seulement ».
Il va de soi que la seule prérogative de Christine Lagarde, en tant que Directrice générale du Fonds monétaire international, est de s’assurer que « le FMI aille bien ».
L’interview se conclut sur ces mots : « Nous devons être en mesure d’inventer et de nous réinventer de plusieurs façons ». Et il se trouve que l’une de ces façons de se « réinventer » face à « un client » a été enregistrée par vidéo. En voici la partie la plus intéressante :
Question : Parmi les nombreuses choses que vous faites, qu’est-ce qui vous passionne le plus ? Que voudriez-vous vraiment voir se produire ? Il peut s’agir aussi d’une petite chose, pas nécessairement de quelque chose d’important. Qu’est-ce qui anime véritablement votre cœur ?
Ch. Lagarde : C’est assez compliqué. Je crois que c’est une chose importante… que c’est ma toute première préoccupation. Voyez-vous, cette institution est vraiment fascinante, car elle est complètement à contre-courant : Quand le monde qui tourne autour du FMI va mal, nous, nous allons bien. C’est dans ces périodes que nous commençons à devenir particulièrement actifs, car nous prêtons de l’argent et nous gagnons sur les intérêts, et toutes les autres charges, et c’est là que notre institution prospère, qu’elle se porte bien.