Un des généraux à l’origine du coup d’État avorté mi-mai au Burundi a affirmé sur une télévision kenyane que les putschistes étaient derrière les récentes attaques dans le pays et qu’ils entendaient chasser par la force le président Pierre Nkurunziza.
« Toutes ces actions en cours dans le pays, nous sommes derrière, et nous allons les intensifier jusqu’à ce que Nkurunziza comprenne », a déclaré le général Léonard Ngendakumana, bras droit du chef putschiste Godefroid Niyombare, resté selon lui au Burundi pour « résister » et « se battre » contre le pouvoir en place, dans un entretien diffusé dimanche soir sur la chaîne KTN.
La capitale Bujumbura ainsi que d’autres villes du pays ont été les cibles d’attaques à la grenade meurtrières à l’approche des législatives et communales qui ont ouvert le 29 juin les élections générales burundaises.
Contestation
L’annonce en avril d’une candidature du président Nkurunziza, déjà élu en 2005 et 2010, à un troisième mandat jugé anticonstitutionnel par l’opposition lors de la présidentielle du 15 juillet a suscité un mouvement populaire de contestation violemment réprimé par la police. Elle a aussi motivé, le 13 mai, un coup d’État organisé par l’ancien responsable des services de renseignement, le général Godefroy Niyombare, qui a tourné court deux jours plus tard.
« Après l’échec de notre coup d’État, le 15 mai, nous avons jugé nécessaire de poursuivre la lutte […] pour contraindre M. Nkurunziza à la démission », a expliqué le général Ngendakumana.
Le général Niyombare, qui n’a pas donné signe de vie depuis sa fuite, « est toujours dans le pays et continue de se battre », a-t-il assuré.
« Nous combattrons au Burundi jusqu’à ce que nous ayons atteint notre but », a poursuivi le général Ngendakumana, accusant M. Nkurunziza de n’être « prêt à négocier avec personne ».
Entêtement
Le président a ignoré les appels de la Communauté est-africaine (EAC), réunie lundi en sommet, de l’Union africaine et de nombreux partenaires internationaux en faveur d’un report du scrutin, a-t-il rappelé. Le parti au pouvoir a aussi récusé dimanche le nouveau médiateur dépêché par l’ONU, le Sénégalais Abdoulaye Bathily, accusé d’avoir manqué au respect de la souveraineté du pays.
Le coup d’État du 13 mai était « nécessaire », car « le président Nkurunziza et ses proches entraînaient le pays sur la voie de la guerre civile », a par ailleurs justifié le général Ngendakumana.
« Douze généraux de l’armée et de la police ainsi que le ministre de la Défense » soutenaient l’opération « donc nous étions certains de notre succès », a-t-il expliqué. Mais « le ministre de la Défense a accepté de l’argent du président […] et donné des contre-ordres, ce qui a causé notre échec », a-t-il affirmé.
Le ministre de la Défense, Pontien Gaciyubwenge, a été limogé peu après le putsch et a fui à l’étranger. Des centaines d’autres putschistes sont sous les verrous ou en fuite, selon des sources concordantes.
Le maquis
Le sort des militaires mutins ayant pris le maquis depuis l’échec du coup d’État, mais aussi le départ en exil, au Rwanda notamment, d’opposants notoires au pouvoir alimentent depuis des semaines des rumeurs d’une possible attaque d’envergure.
Ces rumeurs, insistantes avant les législatives, avaient même conduit une bonne partie de la population de Bujumbura à partir se réfugier en province ou à l’étranger avant le début des élections.
Au moins 70 personnes sont mortes depuis le début de la crise et plus de 140 000 Burundais ont fui dans les pays voisins un climat préélectoral délétère.
La communauté internationale, et en particulier les pays de la région, qui a connu son lot de guerres, massacres, et flots de réfugiés ces deux dernières décennies, s’inquiète d’un retour de la violence à grande échelle au Burundi, dont l’histoire post-coloniale est marquée par des massacres et une longue guerre civile (1993-2006).