Pendant que les Français s’arrachaient le premier numéro Charlie Hebdo depuis l’attaque contre son siège, de grands quotidiens du monde ont décidé de ne pas publier la Une représentant Mahomet.
Parmi eux : des journaux américains, britanniques et du Canada anglais aussi. Pierre Fraidenraich, directeur des opérations à Libération, qui héberge l’équipe du journal satirique, leur reproche d’avoir manqué de courage.
« Je m’étonne que ces nations, qui participent pour la plupart à la force internationale qui lutte contre le terrorisme, y compris au prix de la mort de nos soldats, aient peur de publier à la une de leur média ce message fort : de dire que malgré l’effroi, l’horreur et, l’abomination, la presse est en vie », a réagi Pierre Fraidenraich, en entrevue à l’émission 24/60.
Plusieurs des médias qui ont choisi de ne pas montrer le prophète expliquent ne pas avoir voulu offenser la communauté musulmane, dont la religion interdit la représentation de Mohamet.
La caricature de Mahomet en Une du journal soulève une vague de colère dans le monde musulman. Même en France, la communauté musulmane est divisée.
Mais Pierre Fraidenraich se dit « peiné » que plusieurs médias occidentaux se soient montrés frileux. Surtout, ajoute-t-il, que la majorité d’entre avait couvert sans retenu les attaques de Paris au point de laisser entendre qu’eux aussi étaient Charlie.
En France, l’engouement pour l’édition des survivants de Charlie Hebdo a été tel, qu’à 10 heures, tous les points de vente étaient en rupture de stock. En tout, 5 millions d’exemplaires seront imprimés. C’est cinq fois plus que le million prévu au départ, et plus de 80 fois le tirage habituel.
« Je ne m’y attendais pas, mais je m’en réjouis ! » dit Pierre Fraidenraich. « L’union nationale continue après la grande marche du week-end dernier », croit-il.
Pour son journal, il allait de soi d’accueillir l’équipe de Charlie Hebdo, dit le directeur des opérations.
« Lorsque la liberté d’expression est ainsi assassinée, la fraternité est notre réponse, alors nous avons tendu la main tout de suite sans restriction. [...] On ne s’est pas posé la question si nous courions un risque, a-t-il soutenu. J’ai pris toutes les dispositions auprès de la préfecture de la police de Paris et du ministère de l’Intérieur pour sécuriser le bâtiment. Mais je peux vous assurer que pas un collaborateur ne s’est interrogé sur les conditions de leur arrivée. »
Selon lui, les employés de Libération sont non seulement ravis de partager leur bâtiment, mais surtout honorés de pouvoir jouer un rôle.