Un nouvel homme fort a été nommé à Riyad. Mais, au regard de ses récents faits d’armes, le journaliste Martin Jay s’interroge : ne sera-t-il pas incontrôlable ?
Pour ceux qui ne se penchent sur les nouvelles en provenance d’Arabie saoudite que maintenant, un petit rappel : le roi Salmane, 81 ans, a surpris sa cour en décidant de démettre de toutes ses fonctions officielles son neveu Mohammed ben Nayef. Il a mis à sa place son propre fils, Mohammed ben Salmane, 31 ans, désormais prince et héritier du trône.
Selon la plupart des observateurs, le jeune prince héritier était, il y a encore trois ans, un personnage tout à fait obscur dont la courte période à la tête du ministère de la Défense a été marquée par de nombreux revers, consistant notamment en des milliards de dollars perdus au Yémen. Il s’est ensuite un temps démené dans le secteur pétrolier, entraînant une chute des prix du pétrole qui a décimé l’économie saoudienne. Le nouveau prince héritier a donc vraiment beaucoup à prouver.
Outsider ambitieux et impitoyable, il est de fait dangereux et imprévisible. Mais pour les objectifs de Donald Trump, il s’agit là d’un partenaire idéal pour mener une campagne, mal conçue, contre l’Iran.
Mohammed ben Salmane va hériter d’un pays non seulement à la croisée des chemins, s’efforçant de se libérer de sa dépendance pétrolière, mais qui semble aussi étouffer sous ses propres problèmes de sécurité, ses faiblesses et sa paranoïa. Plus le temps passe et plus la maison des Saoud semble s’enfoncer dans les dysfonctionnements géopolitiques. En fait, les violences auxquelles se livre le pays dans la région ont échappé à bien peu d’analystes, à l’exception, peut-être, de David Ignatius du Washington Post, récemment accusé d’avoir des relations journalistiques ambiguës avec l’élite saoudienne. C’est comme si presque tout ce que faisait Riyad en dehors de ses frontières se transformait en cendres. En Syrie, au Yémen, et désormais au Qatar.
Ce nouveau leader, jeune, agressif, étrange, prendra le pouvoir alors que son père est de plus en plus mis en difficulté en tant que monarque. Mais aidera-t-il vraiment son pays ? Ou est-il voué à le pousser vers l’abîme, comme le craignent tant de commentateurs régionaux ?