D’abord, Sleaford machin c’est quoi, c’est qui ? Un duo qu’on pourrait appeler electro-punk. Pour les définitions branchées se référer aux Inrocks ou à Technikart (qui fusionneront un jour, synergie capitalistique oblige), les spécialistes de la branlette socioculturelle.
Pour nous, il s’agit de deux excellents prolos britanniques, Jason et Andrew, qui arrachent à peu près 40 fois plus que le gangsta rap habituel qui fait l’apologie du cul, du fric et des bagnoles, un ramassis de tocards adeptes du shopping qui veulent singer les Blancs et qui ne réussissent que dans le ridicule.
Sleaford Mods c’est de l’électro-rap white trash et dans BHS – tombé pas loin de BHL mais vous allez voir que c’est pas incompatible – on dénonce une affaire sociale qui a secoué la vieille Angleterre.
Résumé de l’affaire par le site soundofbrit.fr :
« Dans ce titre, ils dénoncent la perfidie de Green et son désintérêt total des conséquences humaines. Green, c’est Sir Philip Green, propriétaire du groupe Arcadia, à la tête entre autres des magasins Topshop, Burton, Dorothy Perkins et Outfit. Cet homme s’est distingué à la direction de British Home Stores (BHS), une chaîne de supermarchés britannique qui a mis la clé sous la porte à l’été 2016 laissant 11 000 personnes sur le carreau et un trou de 571 millions de livres dans le fond de retraite, abandonnant ainsi 22 000 employés sans pension. Avec pas moins de 400 millions de livres de dividendes engrangés sur le dos de sa défunte chaîne, Green profitait quant à lui d’une croisière en Méditerranée sur son nouveau yacht dernier cri alors que les derniers magasins tiraient définitivement le rideau. Tout ce que dénonce le clip de B.H.S des Sleaford Mods… »
Le clip montre la croisière du salopard et dans la voix éraillée de Jason, on sent toute la détresse des prolos défaits, la défaite du Travail sous le joug du capitalisme financier, transnational, prédateur. Philip Green, dont Wikipédia nous détaille le pedigree, représente l’absolue dégueulasserie du Système. La chanson de nos deux punks n’y changera rien mais ça changera au moins des bluettes habituelles sur les migrants et les histoires de fesse.
Pour info Green est né en 1952 au sud de Londres, et est issu d’une famille de la classe moyenne juive. À la mort de son père il hérite de son business de détaillant et à 21 ans seulement, il importe des jeans d’Extrême-Orient. Il s’enrichit en revendant le travail des esclaves à des bobos et fait fortune dans le discount. Malgré ses (maigres) dons à des organismes de charité (Basil Zaharoff faisait pareil histoire de se dédouaner de ses gains fabuleux réalisés sur le dos des millions de morts de la guerre 14-18), Green monte dans la hiérarchie des affaires britanniques et fait de la politique avec Cameron. Il fait partie du gotha mondain.
- Philip, Chloe et Tina, qui s’est fait raccourcir le nez façon Planète des Singes
Sinon Green est un bon gros fêtard qui sait dépenser son argent pour la famille et parfois les amis : la bar-mitzvah de son fils lui coûtera 4 millions de livres sterling, soit près de 5 millions d’euros ; pour ses 50 ans il loue un A-300 dans lequel il fourre ses 200 invités ; il fait venir la vénale Rihanna pour l’anniversaire de sa fille, etc. Hélas, aucune de ces fêtes ne verra pointer le personnel de BHS, la boîte qu’il achète en 2000 pour 200 millions de livres et dans laquelle il creusera en 15 ans un trou de plus d’un milliard pour foutre 11 000 pesonnes dehors. Pendant que lui empoche plus de 500 millions (de livres toujours) en dividendes.
Bon, pas la peine d’aller plus loin, Green est une grosse ordure et Sleaford Mods lui rend hommage à sa façon. Attention : la personne qui incarne la pourriture n’est ni Philip Green ni Harvey Weinstein, même s’il y a un vague cousinage.
Pour revenir à la musique, la chanson suivante, une décharge d’énergie, s’appelle Jolly Focker. On peut l’entendre dans la dernière vidéo SAPTR#4 :