Est-ce qu’Amis Amri était un agent infiltré des services secrets ? Le Premier ministre de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Hannelore Kraft, a effectué une déclaration à ce sujet qui n’a pas manqué de surprendre.
Elle a ainsi indiqué que dans le traitement du cas Amri, il s’agissait également « d’obtenir plus d’informations sur des cellules terroristes présumées ».
Pour elle, c’est le rôle de l’administration que d’évaluer ce genre de risques. Le ministère de l’Intérieur fédéral ainsi que celui de Rhénanie-du-Nord-Westphalie ont conjointement déclaré, dans un but de clarification, qu’Amri n’était pas un agent infiltré des services secrets. Malgré tout, de nombreux épisodes dans les défaillances répétées de l’administration suscitent des questions dans la scandaleuse affaire Amri :
Suite à l’une des arrestations d’Amri à Ravensburg en juillet 2016 pour possession de faux passeports et de stupéfiants, ce dernier est rapidement relâché sur décision du ministère de l’Intérieur de Rhénanie-du-Nord-Westphalie au motif que son expulsion n’est pas possible.
Selon le journal Welt am Sonntag, Amri prenait régulièrement de l’ecstasy et de la cocaïne et se finançait en grande partie grâce à la vente de stupéfiants. L’homme de 24 ans avait déjà été repéré pour des délits liés aux stupéfiants dans son pays d’origine. Les enquêteurs se demandent s’il était sous l’influence de drogues au moment de l’attentat.
Manifestement, la consommation de drogues par l’intéressé a mené la police judiciaire de Berlin à une fatale erreur de jugement : comme le Bild Zeitung le rapporte, la police a arrêté de le considérer comme un islamiste précisément car il consommait de la drogue.
En novembre, la police a arrêté plusieurs islamistes de son entourage, sans qu’il ne soit inquiété ni même interrogé.
En outre, selon des informations publiées dans les médias, un agent infiltré l’a accompagné et conduit à Berlin en mars.
De plus, Amri se déplaçait en Allemagne avec au moins 14 identités différentes et a plusieurs fois bénéficié de prestations sociales de l’État. Selon des informations du Rheinischen Post, la procédure lancée contre Amri pour fraude sociale n’a pas été traitée dans le service habituellement responsable de ce genre de délits, mais par le « service politique ». Si Amri n’était pas un agent infiltré, était-il destiné à être recruté ? Devait-il servir de source d’informations ?
Frank Tempel, vice-président du groupe parlementaire du parti Die Linke [extrême gauche, N.D.L.R.], a déclaré dans le Bild am Sonntag que « de nombreux indices indiquent que quelque chose ne tourne pas rond dans cette affaire ».
La présidente du groupe parlementaire du parti Die Grünen [écologistes, N.D.L.R.], Kathrin Göring-Eckardt, déclarait quant à elle au Bild Zeitung : « Je ne veux pas exprimer de soupçons avant d’avoir tous les faits sur la table. Malgré tout, j’ai du mal à comprendre pourquoi monsieur Amri pouvait se déplacer librement malgré les éléments factuels concernant sa personne ». D’autres détails vont émerger dans la semaine qui vient. La Commission des affaires intérieures et le Conseil de contrôle du parlement national tentent d’obtenir une première vue d’ensemble. La CDU [droite conservatrice, N.D.L.R.] veut mettre en place une commission d‘enquête alors que le SPD [parti socialiste, N.D.L.R.] demande l’intervention d’un enquêteur spécialisé. L’objectif est de savoir ce qui n’a pas fonctionné dans la consultation réciproque et dans la collaboration entre les administrations régionales et nationales.
Volker Kauder, président du groupe parlementaire de la CDU : « Si l’on pense qu’il est nécessaire d’aller plus loin, je suis ouvert à l’idée de créer une commission d’enquête ».
Thommas Oppermann, président du groupe parlementaire du SPD, déclarait quant à lui dans le Bild am Sonntag : « Nous sommes tous d’accord sur le fait que le cas Amri doit être complètement élucidé ». Mais Oppermann attire également l’attention sur le risque d’une procédure « fastidieuse de plusieurs mois ». Les politiciens au pouvoir ont le même avis sur cette question : les éventuelles failles de sécurité dans l’administration doivent être résolues le plus rapidement possible.