Dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, Christian, Luc, Célestin, Michel, Christophe, Paul et Bruno, sept moines cisterciens de Notre-Dame de l’Atlas de Tibhirine sont enlevés en Algérie.
Déjà menacés deux ans plus tôt, comme le rappelle La Croix dans un article paru le lendemain de l’enlèvement, ils avaient décidé de rester dans leur monastère situé à une centaine de kilomètres au sud-ouest d’Alger, dans le bastion d’organisations terroristes. Le Groupe islamiste armé (GIA) est alors immédiatement accusé par les services de sécurité algériens.
« L’espérance, tout autant que l’angoisse », auront duré cinquante-huit jours. Le jeudi 23 mai 1996, un communiqué portant le cachet du GIA indique que les sept moines ont été égorgés. Selon ce communiqué, signé du chef présumé du GIA, Djamel Zitouni, ils auraient été tués au matin du 21 mai. L’assassinat résulterait du refus français de négocier. Leurs têtes seront retrouvées le 30 mai dans les environs de Médéa.
Comme le souligne Bruno Frappat dans un éditorial de La Croix paru le 25 mai, en refusant de rentrer en France, « les sept trappistes de l’Atlas n’ont pas recherché l’héroïsme, ni la gloire du martyre. Ils ont suivi, avec une rectitude tranquille, leur vocation… Ils étaient en Algérie pour l’Algérie, pour les Algériens. »
Vingt ans plus tard, les enquêteurs français cherchent toujours à identifier les responsables de leur mort : les islamistes du GIA, qui ont revendiqué leur enlèvement puis leur exécution, l’armée algérienne lors d’une bavure ou les services secrets algériens dans une opération de manipulation destinée à discréditer les islamistes. Un rapport d’expertise, rendu public en juillet 2015, avance que la date de la mort des sept moines ne correspond pas à celle avancée à l’époque par le GIA.
Algérie. Sept cisterciens français ont été enlevés
(La Croix du 28 mars 1996)
Par Bernard Gorce
Proches de la population, attentifs au dialogue avec l’islam, ces moines avaient choisi de rester dans leur monastère installé en 1934 à Tibhirine, à une centaine de kilomètres au sud-ouest d’Alger.
Vers 1 h 30, dans la nuit de mardi à mercredi, sept cisterciens ont été enlevés dans leur monastère Notre-Dame de l’Atlas de Tibhirine, proche de Médéa, à une centaine de kilomètres au sud-ouest d’Alger. Annoncée par les services de sécurité algériens, l’information a été confirmée à Paris par le Quai d’Orsay, mercredi en fin de matinée. Hervé de Charette a appelé les 8 270 Français mononationaux toujours sur place à rentrer en France.
Joint en Algérie par La Croix, Mgr Henri Teissier, archevêque d’Alger, a précisé que six d’entre eux sont membres du monastère Notre-Dame de l’Atlas, le septième moine, de passage en Algérie, étant membre d’une communauté monastique cistercienne du Maroc.
Mgr Teissier a tenu à ce que l’identité des moines ne soit pas pour l’instant communiquée, et confirmé que deux autres membres de la communauté étaient absents du monastère lors de l’enlèvement.
Déjà menacés il y a deux ans
Selon le communiqué des services de sécurité algériens, un « groupe criminel » (le terme désigne les groupes islamistes armés du GIA) est l’auteur de l’enlèvement. Le monastère est situé dans le bastion de ces organisations terroristes, à quelques kilomètres du camp de Tamesguida où, le 14 décembre 1994, 12 Croates avaient été égorgés.
Les moines avaient été eux-mêmes menacés une première fois il y a deux ans par des groupes armés, mais tous avaient décidé de ne pas quitter ce pays. « Ils avaient fait le choix de rester », confirme, à Rome, le P. Armand Vieilleux, procureur général des cisterciens, qui s’est rendu récemment sur place : « Les moines ont toujours refusé la protection de l’armée et observent une très grande neutralité face aux événements ». Ce fut leur attitude durant la guerre d’Algérie.
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Un sujet sur Frère Luc, moine de Tibhirine, diffusé le 21 mai 2006 :
Tibhirine, l’avocat des moines accuse le pouvoir algérien
Qui a tué les moines de Tibhirine ? Si l’enquête judiciaire n’a jusqu’ici pas réussi à répondre à cette question, de nombreux éléments remettent en cause la thèse d’un crime islamiste. Pour l’avocat des moines, le pouvoir algérien est en cause.
C’était il y a vingt ans. Dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, sept moines français de Tibhirine sont enlevés puis assassinés.
À l’époque, cet assassinat est revendiqué par les islamistes du GIA qui mènent une guerre féroce sur le sol algérien depuis 1992 et l’annulation par le pouvoir en place des élections législatives remportées par le Front islamique du salut (FIS).
Plusieurs pistes mènent à un autre suspect : les services secrets algériens, qui auraient une part de responsabilité dans la mort des moines. Presque 20 ans jour pour jour après la mort de ces sept hommes, beaucoup de questions restent encore sans réponses. L’enquête judiciaire se heurte à un mur.
Trévidic enfin en Algérie en 2014
Pourtant, en octobre 2014, les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux avaient enfin réussi à se rendre en Algérie avec une équipe d’experts. Leur objectif était d’exhumer et d’autopsier les têtes des moines, leurs corps n’ayant jamais été retrouvés. Des prélèvements médico-légaux sont alors effectués sur place. Mais Alger refuse que les juges et les experts français repartent avec ces prélèvements qui pourraient livrer des indications cruciales sur la mort des moines.