Derrière les jeunes tunisiens expédiés avec des faux passeports en Syrie pour le « jihad », il y a des imams et des prédicateurs, d’ici et d’ailleurs, et tout un réseau organisé, mais les autorités ne font rien pour mettre fin à cette tragédie.
C’est ce qu’a affirmé Aïcha, la maman d’un jeune Tunisien de 22 ans envoyé au djihad en Syrie, invitée mercredi soir, dans l’émission Labess, animée par Naoufel Ouertani, sur Ettounissia TV.
Elle raconte, au bord des larmes :
« Mon fils Yassine a quitté le pays depuis le 19 février. Il m’a appelé à trois reprises de la Turquie. Je l’ai supplié de rentrer, en vain. Son père et son oncle sont allés là-bas le chercher, en vain aussi. Mon fils était comme tous les jeunes, moderne et branché et ses cheveux toujours laqués au gel. Du jour au lendemain, il a changé. Depuis que des prédicateurs sont venus d’ailleurs enseigner à nos enfants un autre islam. Depuis qu’un imam de Boumhel (banlieue sud de Tunis, Ndlr) fait depuis des mois le bourrage de crâne à tant de jeunes dans les mosquées. Il s’habille aujourd’hui en qamis et s’est fait pousser la barbe... La veille de son départ, il s’est rasé la barbe, son père et ses sœurs, contents, ont cru qu’il est revenu à la raison. »
La maman a raconté aussi que son fils n’a pas fait le voyage avec son passeport. La police lui a d’ailleurs donné le numéro d’un autre passeport avec lequel son fils a pu prendre le vol de Tunis vers la Turquie. Selon elle « la police, dépassée, m’a dit qu’il y a un dangereux réseau », qui envoie les jeunes tunisiens en Syrie.
Comme Aïcha, une dizaine de mamans dans son quartier à Ben Arous ont vu leurs enfants partir au jihad.
Selon un ami de la famille d’Aïcha :
« Menacées, elles n’ont pas voulu témoigner. Nous avons plein de numéros de téléphone, nous avons des traces et si la police veut enquêter, nous leur indiquerons des pistes. On m’a déjà menacée de mort à travers des appels masqués, mais ceci ne va pas me faire reculer, car j’ai une fille et je crains le pire pour mon pays. Et je peux affirmer que certains policiers sont complices dans cette affaire. Où est passé le gouvernement ? Où est passé le président de la république ? Que font nos députés pour ne jamais parler de ce fléau ? »
Il y a deux jours, une vidéo enregistrée dans un aéroport turc a montré une scène horrible : une maman et sa belle fille ont fait scandale et, au final, ont réussi à faire rentrer le fils au pays via la Libye, à quelques minutes de son départ vers la terre de jihad en Syrie.