S’exprimant aujourd’hui devant la Douma (l’équivalent de notre Assemblée nationale, NDLR), où il a rendu compte de la politique internationale de la Fédération de Russie, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a abordé les relations avec l’Union européenne et les États-Unis.
Il a notamment évoqué le dossier du traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE). En 1990, celui-ci établissait le nombre d’armements conventionnels de l’OTAN et du Pacte de Varsovie présents en Europe, puis fut modifié en 1991 afin de tenir compte de la disparition de l’URSS. Les nombreuses adhésions à l’Organisation atlantique de pays de l’ancien Pacte de Varsovie ayant profondément modifié la donne géopolitique en Europe, le contenu du traité est devenu caduc. Afin de prendre en compte le nouvel équilibre des forces, la Russie a présenté en 1999 une version remaniée du traité, qu’elle a signé avec l’Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan. En 2007, devant l’indifférence des pays de l’OTAN à l’égard de ce traité, la Russie a suspendu son application. Désormais, pour M. Lavrov :
« Le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE) n’est pas applicable pour nous. Quand l’organisation du Pacte de Varsovie a été dissoute, l’ancien Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe a été adapté à la nouvelle situation politique. La Russie a ratifié cette nouvelle version du Traité FCE et l’OTAN a refusé de le faire. Nous avons attendu pendant plusieurs années, avant de jeter l’éponge. Nous ne considérons plus l’ancien Traité FCE comme un document contraignant, nous nous en sommes retirés en utilisant les procédures prévues à cette fin. Nous avons suspendu sa réalisation, il est mort pour nous et c’est une décision irrévocable. »
Cependant, en ce qui concerne le traité START, le Kremlin espère que la Maison Blanche se montrera raisonnable et acceptera son application. Cet accord sur la réduction des armes stratégiques offensives a été signé en avril 2010 à Prague et prévoit un maximum de 1 550 ogives nucléaires déployées pour chacun des deux pays. Une avancée considérable puisque cela représente une baisse de 30 % par rapport au précédent traité de désarmement nucléaire de mai 2002. À ce sujet, le chef de la diplomatie russe a déclaré :
« START répond à nos intérêts stratégiques fondamentaux, et à condition que la partie américaine le respecte (…), nous sommes intéressés à sa réalisation complète. Cela renforcera la stabilité dans le monde sans porter aucune atteinte à nos capacités d’assurer notre sécurité et la stabilité stratégique au niveau planétaire. »
M. Lavrov est revenu aussi sur l’attitude de Washington, qui suscite des initiatives antirusses tous azimuts et essaye d’entraîner Moscou à s’impliquer davantage dans le conflit ukrainien :
« J’ai récemment rencontré John Kerry à Pékin, je lui ai dit directement, à ce sujet, notamment que les émissaires des États-Unis voyagent à travers le monde : il n’y a pas un seul gouvernement qui n’a pas été visité par eux afin d’exiger avec un degré différent de persévérance de soutenir les sanctions contre la Fédération de Russie. Toute tentative visant à faire de la Russie une partie impliquée dans le conflit est absolument contre-productive et provocatrice et n’a aucune chance de réussir. »
Enfin, le ministre des Affaires étrangères russe a rappelé la position de son pays à propos du conflit qui oppose Kiev aux régions séparatistes du Donbass :
« Nous appelons à établir des contacts stables entre Kiev et les représentants du Donbass en vue de parvenir à des accords mutuellement acceptables. L’Occident doit encourager ce processus au lieu de soutenir d’une façon inconditionnelle tout ce que fait le parti de la guerre à Kiev, en fermant les yeux sur les violations criantes des droits de l’homme, sur l’arbitraire flagrant et les crimes de guerre. La vérité sur ce qui se passe fait son chemin même à travers la partialité des médias occidentaux. Il est impossible de se cacher derrière les sanctions unilatérales illégales qui ne font que saper les efforts visant à stabiliser l’économie mondiale et ne contribuent pas à la venue d’un règlement de la crise ukrainienne. »