Les grandes puissances et l’Iran n’ont pas réussi à rapprocher leurs points de vue sur le problème du nucléaire iranien à l’issue de deux jours de négociations à Moscou, sur fond de menace d’un embargo pétrolier contre Téhéran, voire d’une intervention militaire.
"La pression doit désormais s’accroître sur l’Iran avec la pleine application le 1er juillet par l’Union européenne de l’embargo pétrolier décidé en janvier dernier. Les sanctions continueront d’être durcies tant que l’Iran refusera de négocier sérieusement", a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, dans un communiqué.
"Il y a des divergences significatives sur l’essentiel entre les deux parties ", a déclaré de son côté le chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, émissaire du groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) dans les négociations avec l’Iran, soupçonné par les grandes puissances et Israël de vouloir se doter de l’arme atomique.
"Nous avons présenté nos positions au cours d’échanges qui ont été détaillés, âpres et francs" avec la délégation iranienne, a poursuivi Mme Ashton au cours d’une conférence de presse après neuf heures de négociations dans un grand hôtel de la capitale russe.
"Les divergences sont très significatives", a renchéri le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, représentant la Russie dans les négociations.
Au cours des pourparlers, les grandes puissances ont réaffirmé leur demande à l’Iran d’arrêter l’enrichissement d’uranium à 20%, d’échanger le stock d’uranium enrichi à 20% contre du combustible nucléaire dont Téhéran a besoin et de fermer son usine souterraine à Fordo, a souligné Mme Ashton.
Mais l’Iran ne l’entend pas de cette oreille, réaffirmant son droit à enrichir de l’uranium comme il l’entend.
"Nous avons insisté sur le fait que l’enrichissement d’uranium dans un but pacifique à tous les niveaux (d’enrichissement ndlr) était du droit de la République islamique", a déclaré le négociateur en chef du nucléaire iranien, Saïd Jalili, au cours d’une conférence de presse séparée.
"Ces négociations étaient plus sérieuses et plus réalistes" que les précédentes à Istanbul en avril et à Bagdad en mai, a déclaré M. Jalili, soulignant que les discussions étaient allées "au-delà des déclarations de principe".
L’Iran a proposé cinq axes pour les négociations et les deux parties se sont accordées sur une nouvelle réunion à Istanbul le 3 juillet, cette fois au niveau des experts, une initiative considérée comme un succès par Téhéran.
"La condition pour des négociations réussies est la tenue de réunion d’experts", a souligné M. Jalili.
"Le principal accord de Moscou est qu’ils (les grandes puissances, ndlr) ont accepté la position de la République islamique pour la tenue de réunion d’experts, même s’ils l’ont fait avec deux mois de retard", a-t-il ajouté.
"Maintenant nous espérons que cette occasion permettra (aux grandes puissances) de choisir la bonne voie pour sortir de l’impasse", la crise du nucléaire iranien qui dure depuis près de dix ans, a encore dit M. Jalili.
Ce dernier a par ailleurs estimé que l’entrée en vigueur le 1er juillet d’un embargo pétrolier de l’Union européenne contre l’Iran et le renforcement des sanctions des Etats-Unis, avec des restrictions imposées aux pays achetant du pétrole iranien, risquaient de faire dérailler le processus de négociations.
"Si cette approche est mise à mal et qu’elle est perturbée par certaines actions, cela aura sans aucun doute un impact sur le résultat de ces négociations", a déclaré M. Jalili.
"Tout geste inapproprié et toute mesure n’allant pas dans le sens de cette approche ne sera sans aucun doute pas constructive, et il y aura une réponse appropriée", a-t-il encore dit.
La réunion d’experts à Istanbul le 3 juillet sera suivie par une autre rencontre entre des adjoints de Mme Ashton et M. Jalili, a dit le chef de la diplomatie européenne.
Un échec des négociations pourrait être lourd de conséquences dans la mesure où les Etats-Unis et Israël ont recommencé à évoquer l’éventualité d’une option militaire pour bloquer le programme nucléaire iranien.