Photographié portant un foulard à tête de mort pour se protéger de la poussière, un légionnaire du 1er Régiment Étranger de Cavalerie (REC), alors engagé dans l’opération Serval au Mali, en janvier 2013, fit le « buzz » sur les réseaux sociaux, certains, peu au fait de la chose militaire, se disant « choqués ».
Par le passé, une telle symbolique ne suscitait guère d’indignation (que l’on pense à l’avion de Charles Nungesser ou des Hussards de la mort commandés par Kellerman à Valmy).
Contrairement à ce qui avait pu être avancé à l’époque, et même si l’État-major des armées marqua sa désapprobation à l’égard du port d’un tel foulard, ce légionnaire d’origine polonaise (mais dont la famille a émigré en Suède) ne fut pas l’objet de lourdes sanctions (« vol bleu » et 40 jours d’arrêt) en lien avec cette affaire.
En revanche, le retour de mission fut pour lui difficile, très probablement à cause de la pression médiatique à son endroit. Ayant sombré dans l’alcoolisme et une médication à outrance, désireux de quitter la Légion, il fut porté déserteur. En novembre, l’on apprenait qu’il venait d’être condamné à 3 mois de prison avec sursis pour le braquage d’une pharmacie avec une arme démilitarisé.
Plusieurs mois après les faits, le quotidien Le Parisien a retrouvé ce légionnaire à Göteborg (Suède), où il s’est installé après avoir quitté le 1er REC. Désormais conducteur d’engins, Joachim Tybora (telle est son identité) est donc revenu sur cette période de sa vie.
Le masque ? Acheté à une boutique pour motards parce qu’il le trouvait « cool ». Les sanctions ? « On m’a dit de rester concentré sur la mission en cours, mais qu’il y avait des pressions en haut des politiques », a-t-il confié. Plus, loin, il ajoute : « Mes chefs m’ont dit que je faisais du bon travail. Ils m’ont expliqué que j’allais être puni pour calmer la pression médiatique ». Et d’assurer que cette punition est restée « lettre morte », les indignés du clavier étant passés à autre chose…
Ce qui confirme les propos tenus en novembre dernier sur cette affaire par le colonel Bruno Louisfert, du Sirpa Terre. Dans les colonnes du Parisien, ce dernier insiste : « Nous ne pouvions pas tolérer le port de ce masque, mais ce n’était pas une faute gravissime ».
Dans son entretien accordé au Parisien, Joachim Tybora explique avoir voulu dénoncer son contrat avec la Légion étrangère. Ce qui lui fut refusé. Pourquoi alors a-t-il perdu pied par la suite ? Des séquelles de la pression médiatique ? La crainte de voir sa carrière stoppée ? Lui seul le sait.
Reste que selon lui, la photographie qui a fait polémique a été mal interprétée. « Ce n’était pas une menace. Je ne voulais pas montrer la supériorité d’une armée sur une autre. Derrière le masque, j’étais juste un petit soldat », dit-il. Mais il relativise, en affirmant qu’ « il faut garder le positif dans toutes les situations. C’est une belle photo même si elle est devenue très négative pour moi ». Mais le plus important, sans doute, est qu’il se dit « fier d’avoir été un petit bout de la légion ».