À l’occasion d’un discours pononcé lors de la conférence annuelle de l’Institut de politique et de stratégie d’Herziliya, le chef d’état-major des forces armées israéliennes, le général Binyamin « Benny » Gantz, a évoqué les défis sécuritaires et stratégiques auxquels Israël doit faire face ainsi que les priorités en matière de politique de défense.
“Malgré le semblant de calme en Israël, il ne se passe pas une semaine, pour ne pas dire de jour, sans que je n’aie à faire face à un problème dont vous n’avez pas entendu parler et qui aurait pu entraîner une menace stratégique”, a confié le général Gantz à son auditoire.
Nul doute que la situation en Syrie est la source d’une partie des problèmes évoqués par le chef d’état-major de Tsahal. Et, a priori, la perspective de la chute du régime de Bachar el-Assad, adversaire de l’État hébreu, ne semble pas réjouir les responsables israéliens.
“Nous voyons les organisations terroristes gagner des points d’ancrage sur le territoire [syrien] et elles se battent contre Assad”, a affirmé le général Gantz. “Et devinez quoi ? Nous allons être les prochains dans leur ligne de mire” a-t-il poursuivi.
“La probabilité d’une attaque syrienne conventionnelle contre Israël a considérablement diminué, mais elle a été remplacée par une menace terroriste le long de la frontière israélo-syrienne”, a ajouté le général Gantz. De fait, le conflit interne à la Syrie a déjà débordé hors des frontières, notamment sur le plateau du Golan, annexé par Israël.
Et, a estimé l’officier, il y a une “forte probabilité” de voir ces groupes terroristes s’emparer des arsenaux stratégiques syriens, composés d’armes chimiques et d’armes anti-aériennes.
L’éventuelle chute de Bachar el-Assad pourrait avoir des conséquences sur les menaces visant l’État hébreu depuis le Liban, notamment portées par le Hezbollah, le mouvement chiite, dont, par ailleurs, des militants sont partis se battre en Syrie contre les rebelles (du moins, telle est sa ligne officielle).
Par le passé, selon le général Gantz, Israël avait pu faire pression sur Damas pour calmer les ardeurs de la milice chiite libanaise. Mais désormais, cette carte ne peut plus être jouée. Et d’estimer qu’il y a un risque de “conflagration stratégique” au Liban, “qui peut survenir n’importe quand.”
“Nous espérons que l’effet de dissuasion que nous avons imposé au Hezbollah lors de la guerre de 2006 continuera, sinon nous saurons agir avec toute l’intensité nécessaire et de façon efficace contre le Hezbollah, mais aussi tout ce qui entoure cette organisation”, a prévenu le général Ganz. “Le Liban ne peut pas prétendre être un état souverain sans tenir compte des actions et décisions prises sur son territoire”, a-t-il affirmé. Ce qui suppose qu’en cas de nouvelle confrontation avec la milice chiite, les infrastructures libanaises seront visées.
Quant à la situation dans la bande de Gaza, le général Ganz a souligné que la brève opération “Pillier de défense”, lancée en novembre dernier, avait pour objet le retour au calme tout en dissuadant les tirs de roquettes des mouvements palestiniens vers le territoire israélien. “Ces objectifs ont été pleinement atteints”, a fait valoir le chef de Tsahal. “Mais si le calme ne se maintient pas, nous sommes prêts à agir encore plus fort”, a-t-il menacé.
Concernant le dossier du nucléaire iranien, le général Gantz n’a pas été très bavard. Si ce n’est qu’il a simplement affirmé que “c’est un sujet qui nous occupe, jour après jour, heure après heure.”
Alors que le budget israélien de la Défense pourrait diminuer dans les 5 ans qui viennent, le général Gantz a donné le détail de ses priorités. “Je préfère une petite armée de meilleure qualité qu’une armée plus grande, rouillée et inefficace”, a-t-il fait valoir. Mais les éventuelles restrictions budgétaires ne devront pas, selon lui, empêcher la modernisation de Tsahal et contraindre sa préparation opérationnelle.
“Nous ne pouvons pas laisser nos forces se rouiller” a-t-il dit. “Une armée qui ne s’entraîne pas, qui n’est pas équipée de fonctionnalités avancées est comme un tuyau rouillé : il se casse facilement. Nous devons maintenir un tube en acier poli, qui est élastique et solide”, a-t-il expliqué.
Aussi, pour faire face aux changements stratégiques qui “affectent la stabilité régionale” et à la “nature changeante des menaces”, lesquelles sont “plus dangeureuses, à plus longue portée et qui s’étendent sur un large spectre”, Tsahal doit être encore “souple et plus réactive” que jamais.
D’où les 7 priorités définies par le général Gantz, qui concernent le renseignement, les capacités d’attaque, la manœuvre au sol, avec un accent particulier mis sur le combat urbain, la cyberguerre, la protection de la zone économique exclusive israélienne, la défense aérienne et antimissile et, enfin, l’amélioration de la logistique.