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Les États-Unis, l’OTAN et Israël, premiers responsables de la mort de journalistes dans le monde

Dans la foulée des attaques terroristes perpétrées par des agents autoproclamés d’al-Qaïda et ayant coûté la vie à douze personnes, dont huit journalistes du journal satirique français Charlie Hebdo, l’élite et les médias dominants occidentaux, en exprimant leur compassion et leur indignation, ne font que mettre en lumière leur complaisance envers le terrorisme d’État occidental et israélien.

 

Avant d’explorer de plus près cette question, il convient de noter que les attentats de Paris comportent des signes indiquant la possibilité d’un attentat sous faux pavillon, par exemple la carte d’identité laissée dans la voiture par un terroriste. Cette hypothèse ne fait toutefois pas l’objet d’une analyse et est exclue d’emblée, complètement ignorée par les médias traditionnels. Par ailleurs, l’un des terroristes présumés, Cherif Kouachi, a déclaré à un média français qu’il avait été financé par l’ancien chef d’al-Qaïda Anwar Al-Awlaki, un religieux états-unien ayant dîné au Pentagone quelques mois après le 11 Septembre. Selon le lieutenant-colonel états-unien Anthony Shaffer, Al-Awlaki a « travaillé comme agent triple et était un atout du FBI avant le 11 Septembre » [1].

Depuis les attentats meurtriers du 7 janvier 2015, les médias occidentaux, en particulier les médias québécois, clament d’une manière très ethnocentrique que « la planète est en deuil » et pleure la mort des journalistes français. Cet événement tragique doit être condamné, mais il doit être examiné dans un contexte approprié. Dans les pays où la France a bombardé des civils, par le biais de l’OTAN et des invasions militaires menées par les États-Unis, et là où des terroristes soutenus par l’Occident tuent des civils innocents (Libye, Syrie), les populations vivent constamment le deuil de leurs proches. Ces décès ne sont cependant pas signalés. Le monde occidental n’est pas « la planète » et « tout le monde n’est pas Charlie », contrairement à ce que les médias nous portent à croire [2].

 

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Plusieurs salles de rédaction du réseau public Radio-Canada ont pris des photos tenant des affiches « Je suis Charlie ».

 

Lors de la dernière attaque contre Gaza, dix-sept [3] journalistes palestiniens ont été tués par l’armée israélienne. Ces journalistes ont été tués dans le but de supprimer la vérité concernant les atrocités israéliennes. On n’a vu nulle part des journalistes occidentaux tenant des affiches de solidarité.

Avant les décapitations de James Foley et Steven Sotloff, des dizaines de journalistes ont été tués en Syrie par des terroristes armés, entraînés et financés par des pays de l’OTAN et leurs alliés antidémocratiques comme l’Arabie saoudite. Des centaines de civils ont également été décapités bien avant eux, environ deux-cents dans un seul village, selon un rapport de Human Rights Watch [4].

L’indignation a cependant été réservée aux journalistes occidentaux décapités.

La guerre en Syrie a été très meurtrière pour les journalistes : 153 morts, selon certaines estimations, et ce grâce au terrorisme appuyé par l’OTAN. Là encore, aucun journaliste occidental brandissant des pancartes de compassion pour les journalistes syriens en vue.

Le pays le plus meurtrier dans le monde pour les journalistes a toutefois été l’Irak durant l’occupation des États-Unis. Selon le Comité de protection des journalistes (CPJ) :

La guerre menée par les États-Unis en Irak a coûté la vie d’un nombre record de journalistes et a remis en question certaines perceptions répandues sur les risques de la couverture des conflits. Par exemple, plus de journalistes ont été tués dans des assassinats ciblés en Irak que dans des circonstances liées au combat [...]

Selon des recherches du CPJ, au moins 150 journalistes et 54 travailleurs de soutien ont été tués en Irak à la suite de l’invasion étasunienne, de mars 2003 à la fin déclarée de la guerre en décembre 2011.

Les décès en Irak dépassent de loin tout autre bilan documenté pour la presse en temps de guerre. Le CPJ, fondé en 1981, a enregistré la mort de 58 journalistes au cours de la guerre civile algérienne de 1993 à 1996, 54 autres décès dans la guerre civile non déclarée en Colombie, qui a commencé en 1986, et 36 décès dans le conflit des Balkans de 1991 à 1995 [...]

Des insurgés de tous acabits ont été responsables de la mort de 110 journalistes et de 47 travailleurs des médias en Irak. Les actions des forces états-uniennes, incluant des tirs provenant de points de contrôle et des frappes aériennes, ont entraîné la mort de seize journalistes et de six travailleurs des médias [5].

Les chiffres du Tribunal BRussells concernant les meurtres de journalistes en Irak sont beaucoup plus élevés :

Selon les statistiques du Tribunal BRussells, au moins 404 professionnels des médias ont été tués en Irak depuis l’invasion états-unienne en 2003, parmi eux 374 Irakiens. L’impunité en Irak est bien pire que n’importe où ailleurs dans le monde [6].

Parmi les morts, deux journalistes – un Irakien, Yasser Salihee, et un États-unien, Steven Vincent – lesquels enquêtaient sur les escadrons de la mort soutenus par les États-Unis en Irak.

Le 24 juin, Yasser Salihee, un correspondant spécial irakien pour l’agence de nouvelles Knight Ridder, a été tué d’une seule balle à la tête alors qu’il approchait d’un point de contrôle mis en place près de son domicile dans l’ouest de Bagdad par les troupes états-uniennes et irakiennes. Le coup aurait été tiré par un tireur d’élite américain. Selon des témoins oculaires, aucun coup de semonce n’a été tiré.

L’armée états-unienne a annoncé qu’elle mène une enquête sur le meurtre de Salihee. Cependant, Knight Ridder a déjà déclaré qu’il n’y a aucune raison de croire que la fusillade était liée à son travail. Au contraire, sa dernière affectation donne des raisons de soupçonner qu’elle l’était.

Au cours du mois passé, Salihee avait recueilli des preuves que les forces irakiennes soutenues par les USA ont mené des exécutions extra-judiciaires de membres présumés et de partisans de la résistance anti-occupation. Son enquête était basée sur un reportage du magazine New York Times en mai et détaillant comment l’armée états-unienne avait constitué les commandos de la police du ministère irakien de l’Intérieur, appelés la Brigade des Loups, en prenant pour modèle les escadrons de la mort déployés au Salvador dans les années quatre-vingts pour écraser l’insurrection de la gauche [7].

Le journaliste américain Steven Vincent a été enlevé et assassiné le 2 août à Bassorah, la ville irakienne du Sud où il travaillait comme auteur et blogueur à la pige. Les soupçons de ce meurtre, le premier d’un journaliste états-unien en Irak, pèsent non pas sur al-Qaïda ou les insurgés sunnites, mais sur la police de l’administration à majorité chiite installée à Bassorah avec le soutien des forces d’occupation états-uniennes et britanniques [8].

Pour des raisons inconnues, le journaliste irakien Yasser Salihee, n’a pas été inclus dans la liste du CPJ.

Le Tribunal BRussells rapporte en outre que de nombreux décès ne sont pas signalés par le CPJ et Reporters sans frontières. L’explication reflète le contraire de ce qui se passe avec la couverture biaisée et émotive des meurtres de Charlie Hebdo, à savoir la dédramatisation de la mort des journalistes irakiens.

Depuis l’invasion de 2003, les grands médias ont constamment cherché à minimiser le nombre de mortalités. Il s’agit d’un fait bien établi et le meurtre des professionnels des médias ne fait pas exception. Il est évident que les groupes occidentaux de défense des droits des journaliste hésitent à dire exactement combien de leurs collègues ont perdu la vie sous l’occupation impitoyable des États-Unis et de la Grande-Bretagne, une occupation qui perdure. Ces groupes réduisent alors les critères d’inclusion dans leurs listes. Cette attitude est inacceptable, surtout parce qu’il est question de collègues professionnels [...]

 

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L’Irak était le pays le plus meurtrier pour les professionnels des médias en 2003, 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2010, 2011 et 2013 (Adriaensens, op. cit.)

 

Presque 400 journalistes irakiens morts et pourtant nos compatissants professionnels des médias n’ont jamais affiché leur solidarité.

Julie Lévesque

Notes

[1] Kurt Nimmo, Le FBI admet que le convive du Pentagone Al-Awlaki a travaillé pour eux, Infowars 2 août 2012.

[2] http://cbcrcblog.com/news/charliehebdo-2/?lang=en

[3] L’article original mentionnait treize journalistes palestiniens tués durant le dernier assaut à Gaza. Selon plusieurs sources journalistiques, ils seraient en réalité dix-sept. Selon le CPJ, seize journalistes et quatre travailleurs des médias ont été tués en « Israël et dans les territoires occupés », comme s’il s’agissait d’un seul pays. Reporters sans frontières a enregistré seulement sept décès en Palestine.

[4] Voir Julie Lévesque, « L’État islamique : un groupe terroriste "prodémocratie" appuyé par les États-Unis et formé pour décapiter », Mondialisation.ca, 19 septembre 2014.

[5] Frank Smyth, Iraq war and news media : A look inside the death toll, Committee to Protect Journalists, 18 mars 2013.

[6] Dirk Adriaensens, The Killing of Journalists in Iraq, BRussells Tribunal, 4 janvier 2014.

[7] James Cogan, Journalist killed after investigating US-backed death squads in Iraq, World Socialist Web Site, 1er juillet, 2005.

[8] Patrick Martin, US journalist who exposed Shiite death squads murdered in Basra, World Socialist Web Site, 5 août 2005.

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