Le nouveau Premier ministre du Liban Najib Mikati a tenu à rassurer la communauté internationale en affirmant que le pays ne basculera pas dans le camp radical, après l’annonce lundi de la composition de son gouvernement, dominé par le Hezbollah et les alliés du puissant parti chiite.
Washington, pour qui le Hezbollah est une formation terroriste, a réagi avec prudence, affirmant qu’il jugerait la nouvelle équipe "sur ses actes".
La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton avait pourtant prévenu en janvier qu’un gouvernement "contrôlé" par le Hezbollah aurait "clairement un impact" sur les liens bilatéraux.
"Le fait que le Hezbollah et ses alliés disposent de 18 (des 30 portefeuilles) ne signifie pas que le Liban basculera dans le camp radical en ce qui concerne ses relations avec la communauté internationale", a toutefois affirmé M. Mikati dans une interview à l’AFP.
Le Hezbollah et ses alliés, dont le chrétien Michel Aoun, ont raflé 18 portefeuilles, le reste (12) étant répartis entre les partisans du chef de l’Etat Michel Sleimane, de M. Mikati et du leader druze Walid Joumblatt, considérés comme "neutres".
Sur ces 18 postes (dont notamment la Justice et la Défense), deux vont au Hezbollah, les 16 autres reviennent à ses alliés.
C’est la première fois qu’une coalition menée par le Hezbollah, un parti qui a mené une guerre destructrice contre Israël en 2006, domine le gouvernement.
Le président syrien Bachar al-Assad, confronté à une contestation de son régime, a immédiatement félicité le Liban voisin, où l’ancienne puissance de tutelle continue d’exercer son influence.
Le gouvernement Mikati est boycotté par le camp de l’ex-Premier ministre, le pro-occidental Saad Hariri, désormais dans l’opposition.
"Que vous soyez au pouvoir ou dans l’opposition, c’est votre gouvernement à tous (...) ce gouvernement (...) oeuvrera pour tous les Libanais", a affirmé M. Mikati appelant à l’unité.
Peu après l’annonce du gouvernement, un allié du Hezbollah, le député druze Talal Arslane, a démissionné, protestant contre le fait qu’il n’ait pas obtenu un portefeuille clé.
Le système libanais garantit un équilibre délicat entre les 18 confessions du pays.
Le 12 janvier, le Hezbollah et ses alliés avaient retiré leurs ministres du gouvernement d’union de Saad Hariri, sur fond de tensions liées au tribunal de l’ONU en charge de l’enquête sur l’assassinat en 2005 de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, père de Saad.
Le Hezbollah, qui s’attend à être accusé par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) dans ce meurtre, a réclamé de M. Hariri, en vain, qu’il désavoue cette instance.
Bien qu’il ait été nommé grâce aux députés du camp du Hezbollah, M. Mikati a refusé dès le départ de donner au parti chiite un engagement concernant le TSL.
Le tribunal sera l’un des principaux défis de son gouvernement, alors que l’acte d’accusation est attendu cette année.
Le porte-parole du département d’Etat américain, Mark Toner, l’a ainsi rappelé lundi affirmant : "L’important, à nos yeux, est que le nouveau gouvernement libanais se conforme à la Constitution du Liban, qu’il renonce à la violence, notamment aux tentatives de chercher vengeance contre d’anciens responsables gouvernementaux, et qu’il respecte ses obligations internationales, y compris les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU et son engagement envers le Tribunal spécial".
"Nous allons voir les implications du tribunal sur la situation locale, et puis on prendra une décision", a-t-il indiqué sans plus de précisions.