Nos lecteurs de long terme se rappelleront que depuis 10 ans au moins, nous considérons le Japon comme un modèle. Ce n’est pas là que nous voulons aller… mais nous sommes condamnés par les dieux à suivre les traces du Japon.
Pourquoi ? Nous ne le savons pas vraiment. Le Japon a eu son heure de gloire financière dans les années 80. À l’époque, tout le monde voulait être japonais. La Japan Inc. avait les industries les plus dynamiques au monde et une planification centrale qui fonctionnait !
Et puis la Japan Inc. a pris une raclée en 1990. Elle est entrée dans ce que Richard Koo appelle « une récession de bilan ». Les entreprises avaient trop de dettes. Elles devaient réduire leurs dépenses pour se refaire une santé. Cela causa une récession… un ralentissement… la déflation… et une morosité économique générale qui dure encore de nos jours.
La baisse du cycle du crédit a été aggravée par deux choses :
La démographie : les Japonais vieillissaient… prenaient leur retraite… dépensaient moins d’argent.
La stupidité : les décideurs se sont mis à utiliser des politiques contra-cycliques… des déficits… des taux zéro… du QE.
Vous remarquerez que les pays occidentaux en général et les États-Unis en particulier ne sont pas étrangers à ces facteurs.
Les marchés américains ont dégringolé environ 10 ans après le Japon — en 2000. C’était l’éclatement de la bulle des dot.com. Mais les autorités — instruites par l’exemple japonais — ont réagi plus vigoureusement.
Quand le remède aggrave le mal
Sauver le monde était déjà devenu populaire parmi les économistes, dans les années 90. Alan Greenspan, Robert Rubin et Larry Summers avaient travaillé de concert pour secourir la planète après la crise asiatique, par exemple.
L’équipe s’est remise au travail après la crise des dot.com avec son outil préféré — l’argent facile. Ce qui a bien entendu mis le monde en plus grand danger sept ans plus tard, dans la mesure où cela a causé une bulle encore plus grosse aux États-Unis, centrée sur la finance et l’immobilier.
La crise de 2008-2009 a mis les États-Unis encore plus nettement sur la route de Tokyo. Les taux de croissance ont décliné. Le taux de natalité est passé sous le seuil de remplacement. En utilisant les politiques inventées par les Japonais — les taux zéro, l’assouplissement quantitatif, les déficits, les renflouages –, les autorités américaines ont pu gonfler une bulle de plus sur les actions et la dette, mais la « reprise » était quand même la plus faible jamais enregistrée… et probablement pas une reprise du tout.
Et maintenant ? Qu’est-ce qui nous attend ? Nous nous tournons vers le Japon pour le savoir.
Après 24 années de performances économiques faiblardes, les Japonais étaient prêts à faire quelque chose de vraiment idiot. « Quelles options le Japon a-t-il ? » s’est demandé Shinzo Abe.
Quelle a été la nouvelle politique d’Abe ? Plus d’argent facile, bien entendu. Simuler jusqu’à ce qu’on stimule.
Cela peut fonctionner dans certains domaines de l’existence, mais pas en économie. Abe a réuni son comité pour sauver le Japon. Il avait la presse mondiale derrière lui et la banque centrale dans la poche. Il a injecté des milliards dans l’économie… et dans le marché boursier (y compris en poussant les fonds de pension à investir dans des valeurs surévaluées !).
À présent… la croissance des salaires diminue, tout comme les revenus des ménages. Les dépenses privées sont en chute. Les actions baissent. La production industrielle dérape. Et les dernières estimations montrent que l’économie a perdu 6,9 % au deuxième trimestre.
L’exemple japonais n’est pas à imiter. Mais nous allons le faire quand même.