Le chef de la Mission européenne de police et de justice (Eulex) au Kosovo Gabriele Meucchi a déclaré jeudi que les accusations sur des actes de corruption portées contre trois responsables d’Eulex feraient l’objet d’"une enquête approfondie".
"Nous prenons ces accusations très au sérieux", a dit le diplomate italien lors d’une conférence de presse à Pristina.
Les accusations portées par la procureure britannique Maria Bamieh contre le procureur en chef de la mission, la Tchèque Jaroslava Novotna et l’ancien juge d’Eulex, l’Italien Francesco Florit feront l’objet "d’une enquête approfondie".
Les accusations "ne seront pas ignorées", a-t-il insisté lors de cette première conférence de presse depuis que Mme Bamieh a révélé ses accusations, mardi, à la presse locale et à l’AFP.
L’Eulex, qui compte aujourd’hui 1.500 employés, a été mise en place en 2008, quelques mois après que le Kosovo ait proclamé son indépendance de la Serbie, avec pour mandat de se charger des dossiers jugés trop sensibles pour la justice locale.
Répondant mardi à l’AFP à la question : avez-vous des soupçons fondés selon lesquels de hauts responsables d’Eulex ont accepté des pots-de-vin pour classer des dossiers délicats ? , Mme Bamieh a répondu "oui".
Mme Bamieh avait accusé Mme Novotna, M. Florit ainsi que le procureur canadien Jonathan Ratel d’avoir accepté des pots-de-vin du milieu kosovar afin de classer des dossiers. Elle a également accusé M. Ratel d’avoir tenté de l’empêcher de révéler ces informations.
Des informations qui "devraient choquer l’UE"
"Je ne sais pas quelles sont leurs explications (ndlr : celles des responsables mis en cause), mais mon devoir en tant que procureur est de faire état de ce genre de choses. Si je ne l’avais pas fait, on m’aurait reproché d’être impliquée", a-t-elle déclaré mardi.
M. Meucchi a affirmé que l’Eulex était au courant de ces accusations depuis 2013 et ajouté que la mission et "le système juridique kosovar avaient depuis lancé une enquête conjointe" sur ce dossier.
Un procureur et des enquêteurs de la police ont été chargés de ce dossier, a-t-il précisé.
"Une enquête en profondeur est en cours, en accord avec ce qui est l’essence même de l’engagement d’Eulex, à savoir la lutte contre la corruption et l’impunité", a précisé M. Meucchi.
"Je ne peux pas dévoiler à quel stade se trouve en ce moment cette enquête criminelle", a-t-il ajouté.
Selon les médias locaux, près de 350 000 euros ont été offerts à Mme Novotna et M. Florit pour qu’ils classent des dossiers.
Mme Bamieh, qui fait partie de la mission depuis ses débuts en 2008, et qui était dernièrement chef de son unité chargé des crimes financiers, a été suspendue la semaine dernière, quelques jours avant que le scandale n’éclate.
"Il ne s’agit pas d’une sanction mais d’une mesure" qui s’applique dans ce genre de situation, a expliqué M. Meucchi.
"Ils veulent me punir pour ce que j’ai découvert, par hasard, en faisant simplement mon travail", avait assuré Mme Bamieh mardi.
Elle avait également affirmé que, si elles étaient dévoilées, les informations dont elle dispose "devraient choquer l’Union européenne". "Oui, ça devrait choquer l’UE car cette organisation (ndlr, Eulex) gaspille l’argent des contribuables et ne fait rien pour le peuple du Kosovo", a-t-elle dit.